Imerys : la transition écologique veut faire bonne mine
Les métaux rares sont le nerf de la guerre. Pour le numérique, mais aussi pour la transition écologique, tant ils sont indispensables à la construction d’éoliennes, de panneaux photovoltaïques, de batteries. Or, jusqu’ici les pays occidentaux avaient largement délégué leur production et excavation aux pays en développement, notamment en Chine, cachant à bonne distance d’avion de nos yeux prudes l’impact environnemental que nous ne voulions pas voir souiller nos jolies prairies. Le mondialisme béat n’étant plus tenable dans un monde qui se tend chaque jour davantage, l’idée de relancer une industrie minière fait peu à peu son chemin en Europe. A contre-courant des enjeux climatiques ? Oui, répondront les idéalistes. Peut-être, mais en moins hypocrite, pourront répondre les pragmatiques.
Métal souverain
Selon les premières évaluations, le projet serait l'un des plus grands projets d'extraction de lithium de l'Union européenne. Imerys finalise l'étude de cadrage technique afin d'explorer les différentes options opérationnelles et affiner les aspects géologiques et industriels relatifs au processus d'extraction et de transformation du lithium qui devra répondre à des critères techniques, environnementaux et économiques exigeants. L’entreprise évalue également le potentiel de valorisation de coproduits (feldspath, tantale, étain). Sur la base des technologies les plus avancées, le projet devrait nécessiter un investissement estimé à approximativement 1 milliard d’euros, pour un coût de production compris entre 7 €/kg et 9 €/kg. « Un niveau compétitif, en particulier sur le marché européen », souligne le communiqué. La production devrait débuter dans les cinq prochaines années, une fois les phases de laboratoire et de pilote industriels achevées. À terme, près de mille emplois directs et indirects devraient être créés faisant ainsi de la région Auvergne Rhône-Alpes un centre d'excellence européen pour l'extraction du lithium des roches dures. Pour Roland Lescure, ministre délégué à l’Industrie : « Le lancement de la première mine de lithium sur le territoire national est une étape historique pour l’industrie française. L'exploitation d'Imerys permettra de couvrir plus d'un quart des besoins des futures gigafactories françaises, avec une empreinte carbone bien plus réduite que ses concurrents extra-européens grâce à l’électricité décarbonée de notre pays. Ce projet que nous soutenons dans le cadre du plan France 2030 s'inscrit dans la stratégie industrielle portée par le Gouvernement, qui vise à implanter sur le territoire national l’ensemble de la chaîne de valeur des batteries, des matériaux de base au recyclage. Il démontre que la transition écologique est aussi un facteur de réindustrialisation. »
L’exploitation minière n’est jamais un jeu à somme nulle en termes d’impact sur l’environnement.
Terrain miné
Toute la viabilité et la potentielle réplicabilité du projet repose sur les promesses d’exploitation minière responsable du groupe et du gouvernement. Alessandro Dazza, directeur général d’Imerys l’assure : « Tout au long du processus, Imerys s’engagera avec toutes les parties prenantes, des communautés locales aux décideurs politique dans un esprit d’ouverture et de transparence. » L’objectif affiché : diviser par deux les émissions de CO2 par rapport aux autres exploitations existantes aujourd’hui dans le monde et minimiser l’impact sur le milieu naturel. Disons-le tout de suite : l’exploitation minière n’est jamais un jeu à somme nulle en termes d’impact sur l’environnement. Son retour en France aura cependant, peut-être, le mérite de nous mettre face à nos contradictions. Nous qui sommes tellement prompt à jurer fait et cause pour la cause environnementale derrière nos IPhone 13 ou notre voiture électrique sans penser une seconde à la manière dont ils sont conçus.
La transition énergétique a un coût écologique. Et au risque de rabâcher : seule nous sauvera la sobriété.
Antoine Morlighem