Marseille en grand, la France en petit
Emmanuel Macron s’apprête à quitter la cité phocéenne après une visite de trois jours. Cimetière des promesses et des politiques publiques depuis des décennies, Marseille en a vu d’autres et regarde la caravane présidentielle s’éloigner, délestée d’1,5 milliard d’euros, comme un énième bateau quitte le vieux port. D’autres sont passés avant et d’autres suivront. Le temps s’écoule, inchangé. Qui veut un pastis ?
Réalité exacerbée
Immigration, sécurité, logement, transports, écoles, pauvreté, environnement, chômage… les problématiques auxquelles fait face la deuxième ville de France ressemblent à un concentré des maux nationaux. Avec des responsabilités tellement partagées dans le temps et entre élus locaux et nationaux, que nul ne saurait en endosser complètement la responsabilité. Surtout pas Emmanuel Macron qui enjambe ses cinq ans au pouvoir pour inventer le « Marseille de 2030 ». Le tout en prenant de vitesse ses concurrents du printemps prochain, toujours à se regarder dans le blanc des yeux dans l’attente de primaires ou de la clôture d’inutiles universités d’été. Le Marseille de 2021, lui, compte 174 écoles insalubres, ne dispose que de deux lignes de métro et trois de tramway pour 860 000 habitants, assiste à l’effondrement de ses immeubles délabrés et connaît une flambée de règlements de compte et de trafics en tout genre.
En même temps
C’est sous ce dernier prisme que le Président a entamé sa visite, promettant aux policiers effectifs, équipements et caméras de vidéosurveillance. Ainsi bordé sur sa droite, il s’est ensuite consacré à des sujets plus sociaux comme l’éducation, le chômage des jeunes, le logement. Avant de finir par l’écologie avec une visite du parc des Calanques aux côtés de son ancien ministre Nicolas Hulot. Une manière de lancer le Congrès mondial de la nature qui se tiendra dans la cité phocéenne jusqu’au 11 septembre. Le « en même temps » perdure, dans les apparences tout du moins.
Labo 2022
Au-delà des sommes débloquées, Emmanuel Macron a insisté sur une nouvelle méthode mêlant co-construction avec les élus locaux et la mise sur pied de deux structures de pilotage des fonds alloués qui devront s’assurer que les deniers publics ne s’égarent pas en route. Jupiter met de l’eau dans son vin. Le Président a aussi renoué avec ses tubes de 2017 : « entrepreneuriat des jeunes », refus de « l’assignation à résidence » et besoin « d’émancipation » pour que Marseille embrasse enfin son destin de « ville monde », au cœur de la méditerranée… Avec en point d’orgue l’annonce de quelques projets innovants : vingt micro-collèges et lycées pour les quartiers les plus en difficulté, la mise en place de nouvelles méthodes d’apprentissage censées préparer « l’école du futur », ou encore la création d’Odysséo, une fondation pour la recherche, l’innovation, l’éducation et la protection de l’environnement dans le bassin Méditerranéen.
Suffisant pour insuffler enfin une dynamique positive pour la ville ? Emmanuel Macron assure qu’il reviendra d’ici l’élection pour suivre l’avancée de son projet. Mais, chacun le pressent : l’essentiel était ailleurs.
Antoine Morlighem