Dans un contexte incertain qui a vu bureaux et commerces souffrir conjoncturellement des différents confinements, le résidentiel s’est distingué en enregistrant une progression des montants engagés sur le segment de l’ordre de 40 % en 2020. Retour sur les performances d’une classe d’actifs vaccinée contre le Covid-19.

Sur le segment du résidentiel en France en 2020, ce sont 5,5 milliards d’euros qui ont été engagés selon Immostat contre 3,9 milliards en 2019. Une progression spectaculaire compte tenu des circonstances particulières qui ont affecté l’immobilier ces derniers mois, et qui n’est d’ailleurs pas que le résultat de ces circonstances particulières. Stéphane Imowicz, président-directeur général d’Ikory, rappelle que le phénomène est plus ancien : "Le marché du résidentiel connaît depuis quatre ans un regain d’intérêt par comparaison au bureau, qui a subi une forte augmentation des valeurs vénales, et donc une compression de ses taux de rendement. Les profits tirés du résidentiel se sont donc révélés comparativement attractifs". Un intérêt qui perdure et à qui la crise donne malgré tout raison. 

Les institutionnels au rendez-vous

Ce succès s’explique également par une certaine aversion au risque : lors du premier confinement et de la mise en place presque généralisée du télétravail, le segment des bureaux, qui reste largement majoritaire en matière d’investissement, a suscité quelques anxiétés, dans l’attente du dénouement de la crise sanitaire. Celui des commerces, en souffrance structurelle depuis quelques années, et en tourment conjoncturel depuis le début de la pandémie, a également échoué à rassurer les investisseurs. C’est tout naturellement que les investisseurs, en recherche de sérénité, se sont tournés vers le résidentiel comme l’observe Jérôme Le Breton, notaire associé chez Le Breton Notaires : "Le résidentiel a également bénéficié des capitaux qui ne savaient pas où se loger, compte tenu de la confusion autour des bureaux et des commerces. Le logement s’affranchit de la vacance et profite de versements réguliers et garantis". Des arguments persuasifs dans un environnement aléatoire.  

Les fonds étrangers s’imposent

La révolution du résidentiel s’est également matérialisée par les investissements de fonds internationaux en France. Eux qui ne s’embarrassaient pas d'opérations inférieures à 100 millions d’euros, s’engagent à présent sur des volumes plus faibles, sous réserve qu’ils induisent d’autres opérations par la suite. À ce sujet, Jérôme Le Breton anticipe des bouleversements plus profonds : "L’ingérence des fonds internationaux va bousculer l’industrie, notamment en matière de production". Illustration de cette nouvelle aspiration, l’acquisition en Vefa de plus de 500 logements par Hines auprès de Kaufman & Broad. Un investissement sans précédent que Xavier Musseau, président d’Hines France, justifie : "Notre intérêt pour le résidentiel était antérieur à la crise sanitaire. Il répond à un souhait global du groupe Hines de diversifier ses lignes de produits pour répondre aux attentes de ses clients que sont les grands fonds souverains et fonds de pension". Il s’agissait, en outre, du premier portefeuille d’envergure à être présenté à des investisseurs privés sur un marché traditionnellement occupé par des acteurs publics.

L'offre peine à suivre

Malgré ces perspectives souriantes, les volumes investis sur le segment ne comptent que pour 10 % des investissements immobiliers en France contre 40 % en moyenne en Europe. Une marge de manœuvre inouïe si la classe d’actifs n’était pas soumise à des contraintes de production conditionnées, depuis de nombreuses années, par les permis de construire. En dépit d’une demande au rendez-vous, la Fédération des promoteurs Immobiliers (FPI) déplore une baisse des délivrances de permis de construire d’environ 15 % au premier trimestre 2021 par rapport au premier trimestre 2020, pourtant affecté par le premier confinement. Alexandra François-Cluzac, présidente de la FPI, s’inquiète d’ailleurs d’une "chute vertigineuse de la construction neuve avec près de 25 % de baisse d’octroi de permis de construire sur douze mois dans le collectif. C’est toute une filière qui est en difficulté alors qu’elle pourrait être un formidable vecteur de croissance économique, de progrès social et de développement durable". Aux pouvoirs publics donc de favoriser la production de logements neufs, pour que l’offre réponde, enfin, à la demande.

Alban Castres

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