E. Desmaizières (Icade Promotion) : "Notre volume de réservations en 2020 a été supérieur à celui de 2019"
Décideurs. Quel est l’impact à date de la crise sanitaire sur votre activité ?
Emmanuel Desmaizières. Nous avons été particulièrement impactés par la crise sanitaire lors du premier confinement avec l’arrêt total des chantiers. Sachant que notre chiffre d’affaires est lié à l’avancement des travaux, les pertes ont été lourdes. À fin septembre, il était en recul de 15 % sur un an, alors qu’il aurait été en progression de 20 % sans ces deux mois et demi d’arrêt et de reprise dans des conditions dégradées au printemps. La fermeture des bulles de vente lors des deux confinements a également pesé sur notre activité mais, grâce à la digitalisation, les lancements commerciaux ont pu avoir lieu aux dates prévues et le volume de réservation à l’unité ne s’est pas effondré. De plus, la progression des ventes en bloc, notamment du fait de la cession de 1 091 logements en Vefa à CDC Habitat pour 208 millions d’euros, a permis de compenser en partie le recul des ventes à l’unité. Pour finir, le volume de réservations enregistré par Icade Promotion en 2020 est supérieur à celui de 2019, alors que le marché est en recul. Dernier point à mentionner, nous avons accompagné les entreprises qui interviennent sur nos chantiers en participant aux frais engendrés par la mise en place des mesures de sécurité sanitaire nécessaires.
Quels sont les principaux enseignements que vous tirez de ces derniers mois et comment vont-ils modifier l’approche d’Icade Promotion ?
La crise sanitaire a consolidé la place du logement auprès des ménages. Nous avons commandé un sondage à Ipsos qui le confirme. Cette étude montre un renforcement des tendances existantes comme la demande de nature dans la ville ou le besoin d’accéder à l’extérieur. Avec l’aide de l’architecte Nicolas Laisné, nous avons réalisé un Livre blanc sur ces nouveaux usages et leurs incidences dans la conception de nos logements. Concrètement, nous proposerons systématiquement des espaces extérieurs, planterons un arbre pour un habitant, travaillerons sur la flexibilité des espaces pour permettre aux résidents de travailler la journée et de vivre le reste du temps dans leurs logements… La place donnée au vélo doit également être renforcée car une majorité des citadins en possède un, voire plusieurs aujourd’hui. Tous ces aspects sont d’autant plus importants que les nouvelles équipes municipales y sont très sensibles. En définitive, la crise sanitaire va amener une évolution positive des logements. Nous observons un mouvement similaire dans le tertiaire. Les utilisateurs veulent pouvoir sortir plus facilement à l’extérieur des ensembles tertiaires, ce qui va nécessiter des ajustements dans la conception des bâtiments et une transformation du parc existant afin de favoriser le vivre ensemble, la cohésion d’équipe, les échanges…
"Nous avons anticipé le sujet de la réglementation environnementale 2020"
Où en est l’exécution du plan stratégique 2019-2022 dans l’activité promotion d’Icade ?
Le plan stratégique reste très marqué par une ambition de croissance. Nos indicateurs avancés en matière de réservations et de backlog [ndlr : la partie à encaisser des programmes en cours de réalisation], estimés à 1,3 milliard d’euros à fin septembre (en croissance de 5 % sur un an), confortent notre objectif de réaliser 1,4 milliard d’euros de chiffre d’affaires à l’horizon 2022. Notre chiffre d’affaires potentiel, qui prend en compte les opérations gagnées, celles maîtrisées et celles en cours de montage, s’élève pour sa part à 7 milliards d’euros, soit 20 000 lots.
Quelle est votre approche en matière de bas carbone ?
Nous avons anticipé le sujet de la réglementation environnementale 2020. Aujourd’hui, 50 % de nos programmes répondent aux critères du label E+C-, préfigurateur de la RE 2020, alors que nous nous étions fixés initialement un objectif d’un tiers de nos opérations éligibles à cette certification. Il s’agit donc d’un véritable axe de différenciation qui donne une longueur d’avance à Icade Promotion vis-à-vis de ses concurrents et lui permettra de poursuivre sa croissance demain. Autre point à souligner en matière de bas carbone : nous développons des opérations en structures bois dans différentes métropoles françaises et nous généralisons les façades dans ce matériau au sein de nos opérations. Les 21 équipes d’Icade Promotion dans l’Hexagone maîtrisent les techniques nécessaires. À ce jour, nous comptabilisons plus de 320 000 mètres carrés de programmes en bois en cours de construction ou en phase de montage.
Quelle est votre définition de la ville de demain ?
Notre définition de la ville de demain fait écho à la raison d’être d’Icade : "Concevoir, construire, gérer et investir dans des villes, des quartiers, des immeubles qui soient des lieux innovants, des lieux de mixité, des lieux inclusifs, des lieux connectés et à l’empreinte carbone réduite. Des lieux où il fait bon vivre, habiter, travailler." Cette vision implique plusieurs prérequis comme l’utilisation des matériaux biosourcés, la conception de logements protégés de l’ensoleillement tout en étant lumineux, l’aménagement d’îlots de fraîcheur, l’attention portée à la mixité des opérations d’un point de vue social, générationnel et fonctionnel… Le projet des Quinconces dans le cadre du Village olympique sera un condensé du savoir-faire des équipes d’Icade Promotion dans tous ces domaines. Et cette référence nourrira nos autres opérations partout en France. Par ailleurs, d’autres programmes matérialisent d’ores et déjà notre vision de la ville de demain. À Bordeaux-Euratlantique par exemple, nous avons quatre projets mixtes en bois qui sont en cours de montage, dont Woodstone qui comprendra un parking silo dans ce matériau et un système avant-gardiste de gestion des véhicules électriques.
Propos recueillis par François Perrigault
*Cette interview est extraite du guide construction, promotion et infrastructures 2021 de Décideurs.
Icade Promotion construira une partie du Village olympique de Paris 2024 (©Alessandro Brotto – ailleurs.studio)