P. Chabrol (Trésor) : "Treize fonds ont obtenu à date le nouveau label ISR immobilier"
Décideurs. Quelles sont les grandes lignes du label ISR appliquées à l’immobilier ?
Pierre Chabrol. Historiquement, le label ISR était dédié aux fonds de valeurs mobilières. Les fonds immobiliers ont souhaité en bénéficier. Les acteurs de cette industrie, Aspim en tête, ont ainsi travaillé pendant deux ans pour adapter le label ISR de 2016 aux spécificités de leur secteur. Un des principaux chantiers a consisté à définir les indicateurs de performance applicables à l’immobilier dans les domaines environnementaux, sociaux et de gouvernance. En définitif, un fonds immobilier doit adresser au minimum huit indicateurs, dont deux obligatoirement : la performance énergétique du bâtiment et ses émissions de gaz à effet de serre. Les critères en matière sociale sont orientés vers le bien-être et le renforcement du confort tandis que ceux relatifs à la gouvernance porte sur les relations entre la société de gestion et ses parties prenantes.
Comment les immeubles anciens sont-ils traités ?
Le label ISR dédié à l’immobilier ne doit pas seulement porter sur les bâtiments récents. Il s’applique donc à ceux plus anciens avec l’objectif d’accompagner leur adaptation aux nouvelles exigences environnementales.
Où en est le déploiement de ce label ?
La publication de la nouvelle version du cahier des charges du label incluant l’immobilier a pris un peu plus de temps que prévu. Elle est intervenue en juillet dernier pour une entrée en vigueur le 23 octobre. Le label est octroyé par trois entités indépendantes, EY, Deloitte et l’Afnor. Elles-mêmes sont certifiées par le Cofrac. A date, treize fonds immobiliers détenus par neuf sociétés de gestion et totalisant un encourt global de 7,7 milliards d’euros ont été labellisés.
"Un dossier doit respecter l’ensemble des prescriptions figurant dans les six piliers du label"
Quel est le processus pour l’obtenir ?
Une société doit déposer un dossier pour chaque fond. Ce document doit respecter l’ensemble des prescriptions figurant dans les six piliers du label. Premièrement, les objectifs recherchés par le véhicule doivent être clairement exposés aux épargnants. Le deuxième pilier consiste à mettre en place une méthodologie d’analyse et de notation des actifs immobiliers au regard des critères ESG. Le troisième pilier concerne la prise en compte de ces aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance dans la construction du portefeuille. Les fonds doivent fournir un inventaire complet de leurs actifs sous gestion chaque année et exposer la manière dont chaque immeuble est évalué. La société doit par ailleurs prouver qu’elle a une politique d’engagement ESG vis-à-vis de ses parties prenantes. Le cinquième pilier concerne le renforcement de la transparence vis-à-vis des investisseurs. Enfin, le dernier point concerne le suivi des performances ESG du portefeuille. La société de gestion doit ainsi démontrer que des progrès ont été réalisés année après année.
Combien de temps faut-il compter pour obtenir le label ?
Les premiers fonds l’ont obtenu rapidement en décembre 2020 mais ce sera très variable d’un dossier à l’autre car certaines sociétés de gestion sont déjà bien préparées tandis que le processus sera itératif pour d’autres.
Quelles sont les ambitions de l’Etat ?
Initialement, l’Etat a eu pour mission de s’assurer que le label soit créé avec l’exigence minimale nécessaire en termes de transparence et de fiabilité. Le développement de la gestion en matière d’ISR et d’ESG va nous amener à aller plus loin dans ce degré d’exigence. Le ministre de l’Economie a missionné fin 2020 l’Inspection générale des finances pour auditer le label ISR dans son ensemble. Son rapport pourrait conduire à une modernisation de la gouvernance et de la substance du label. Mais nous devons trouver le bon équilibre entre le temps nécessaire pour que les sociétés de gestion s’emparent pleinement de la version du cahier des charges publiée en 2020 et notre cap stratégique.
Propos recueillis par François Perrigault