AG Real Estate, filiale à 100% d’AG Insurance, est un opérateur immobilier intégré actif dans plusieurs marchés européens dont la France. Xavier Denis, président de la branche tricolore, livre sa grille de lecture du marché.

Décideurs. Quelles sont vos convictions concernant l'évolution des marchés immobiliers français compte tenu de la crise sanitaire ?

Xavier Denis. Globalement, l’offre future du marché tertiaire français est maitrisée et le taux de vacance reste faible. La vigilance est néanmoins de mise car l’offre immédiate avait augmenté de 40 % en l’espace de 18 mois lors de la crise économique précédente. Concernant les taux de capitalisation, nous sommes confiants car la prime de risque de l’immobilier tertiaire demeure attractive. L’évolution des valeurs locatives constituera quant à elle le nerf de la guerre au cours des prochains mois. Un ralentissement de la demande placée est à craindre à court terme mais la qualité de nos immeubles et de leurs localisations nous protège. Dernier élément, la situation actuelle impactera le lancement de projets en blanc, ce qui pourrait nous offrir des opportunités intéressantes car nous disposons en interne d’une grande expertise sur le sujet.

Les commerces souffrent davantage. Les valeurs locatives reculeront, avec la volonté de plus en plus forte des enseignes de démocratiser les loyers variables en fonction du chiffre d’affaires. Dans ces conditions, nous estimons que les retail parks résisteront mieux que d’autres formats. Notons toutefois que certaines enseignes profitent de cette période pour faire des demandes non liées à la crise sanitaire et nous devons donc étudier les dossiers au cas par cas.

Nous continuons à regarder la classe d’actifs logistique avec intérêt. Les volumes d’investissement devraient se maintenir et les nouveaux projets prendront du temps à sortir de terre, ce qui contribuera à maintenir les loyers. Nous ne sommes pas directement actifs sur le segment des logements en France mais ce marché offre un fort degré de protection lors d’un cycle plus volatil.

Le marché de l’immobilier d’entreprise français présente donc de solides fondamentaux. Mais nous entrons dans un cycle où la méfiance l’emportera. Beaucoup d’acteurs seront impactés par la raréfaction de la dette, l’augmentation de son coût et par les problèmes de solvabilité des locataires. Les investisseurs comme AG Real Estate qui abordent cette période avec un taux d’occupation élevé partent clairement avec un avantage car nombre d’utilisateurs préféreront renégocier leurs baux plutôt que de déménager. Concernant la valorisation, tout le monde s’interroge sur l’évolution à venir. Le risque immobilier va probablement être repricer, ce qui est une bonne chose.

Dans ces conditions, comment évolue votre thèse d'investissement en France ?

Notre historique de compétences étant d’abord construit autour du tertiaire, les bureaux continueront à représenter notre cœur de cible même si nous serons un peu plus sélectifs au niveau de nos opérations et de nos localisations. Nous resterons également actifs dans la logistique, segment que nous maîtrisons depuis plusieurs années en France, et nous pourrions nous diversifier en résidentiel car nous avons les compétences en interne grâce à notre exposition en Belgique. Les projets mixtes urbains demeurent également dans notre scope car ils représentent l’avenir de la ville du XXIe siècle. La majorité des dossiers que nous regarderons se situeront en Île-de-France car c’est le marché où nous sommes le plus à l’aise. Nous privilégierons des actifs value-added qui nécessitent un asset management actif ou des projets à développer que nous garderons ensuite en patrimoine. La taille unitaire de nos opérations se situent généralement entre 50 et 100 M€. Nous pouvons également étudier des opérations au volume plus important dans le cadre de partenariat. Mais nous étudions davantage la qualité du sujet que sa dimension. Concernant l’effet de levier de la dette, nous investissons sans y avoir recours sauf dans le cadre de transactions avec des partenaires.

Nous ferons donc partie des investisseurs immobiliers qui resteront vraiment actifs sur le marché français dans les mois à venir grâce à notre taille, notre capacité de financement sur fonds propres et nos équipes basées à Paris qui savent gérer les dossiers complexes.

Quelles sont vos ambitions dans l’Hexagone ?

Nous faisons régulièrement tourner notre portefeuille pour cristalliser la création de valeur. Nous avons ainsi récemment cédé un portefeuille logistique à Allianz Real Estate en France. Notre volume d’actifs gérés en France s’élève aujourd’hui à environ 1 Md€. Notre ambition est d’avoir un portefeuille global, actuellement évalué à près de 7 Mds€, exposé à hauteur de 20-25 % à l’Hexagone.

Propos recueillis par François Perrigault (@fperrigault)

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