Alain Taravella : Le précurseur
Originaire du Calvados, Alain Taravella monte à Paris faire ses études à HEC, dans la même promotion que Dominique Strauss-Kahn et Henri Proglio. À vingt-sept ans, en 1975, il rejoint le groupe familial Brémond, une entreprise de promotion immobilière, pour prendre la direction de son pôle loisirs. Ce dernier a été mis sur le devant la scène depuis la réalisation de la station de ski Avoriaz, ouverte en 1966. Le duo qu'il forme avec Gérard Brémond développe à vitesse grand V l'entreprise qui prend, en 1978, un nom qui deviendra emblématique : Pierre & Vacances, dont il devient le directeur général dix ans plus tard. Sous son impulsion, l'entreprise se développe dans d'autres stations alpines ainsi que sur des sites balnéaires, par l'acquisition d'autres sociétés, la reprise de sites et la participation à de nombreux projets touristiques. Le groupe est notamment à l'origine d'un business model nouveau, celui de « nouvelle propriété », permettant l'accession en pleine propriété avec un investissement réduit grâce à la récupération de la TVA et au prépaiement des loyers.
L'aventure Altarea
Âgé de quarante-cinq ans, c'est en 1994, au sortir de la grande crise immobilière, qu'il lance Altarea, foncière de développement de centres commerciaux. Il embarque dans l'aventure Jacques Nicolet, avec qui il travaillait depuis 1984 chez Pierre & Vacances. Il rachète dans la foulée Gerec, promoteur spécialisé dans les centres commerciaux, pour un montant de six millions de francs, soit un million de plus que les fonds propres d'Altarea ! Un avant goût du sens du pari qui a animé la carrière du Normand. Mais la réalisation qui fait définitivement basculer ce dernier dans la cour des grands, c'est Bercy Village : alors que la crise immobilière a gelé tout projet de développement dans ces anciens chais classés du 12e arrondissement de Paris, il y développe un village commercial Et si, après coup, développer une zone commerciale dans un secteur tout juste desservi par le métro, bordé par les voies sur berges et entouré de parkings pouvait sembler une évidence, il fut le seul à miser dessus : « L'immensité du succès m’a surpris, pas la réussite du projet », avoue-t-il plusieurs années après l'ouverture du site, en 2002.
La cour des grands
Fort de ses succès, Alain Taravella se décide à faire basculer Altarea dans une autre dimension. En 2007, il s'offre Cogedim, promoteur de premier plan en immobilier de bureaux résidentiel, contre un chèque de 650 millions d'euros... quelques mois avant que ne se déclenche la crise des subprimes. Si les analystes doutent, le groupe traverse presque sereinement la crise, grâce à la diversification et aux profondeurs de marché qu'ont permis la fusion.
S'ensuivent plusieurs opérations d'ampleur, parmi lesquelles le lancement d'une activité en Espagne et en Italie, ou encore l'achat de l'emblématique Cap 3000, l'un des principaux centres commerciaux de France situé à Nice, pour la bagatelle de 450 millions d'euros. En 2012, il franchit une nouvelle étape en matière de diversification, en mettant la main sur le site Rueducommerce, entendant créer des passerelles entre le commerce en ligne et le commerce physique. La plate-forme sera cependant revendue quatre ans plus tard au groupe Carrefour, sans pour autant qu'on en sache plus sur les raisons du divorce.
Aujourd'hui, Altarea Cogedim se revendique comme premier développeur domestique en matière de grands projets mixtes, de commerce, et de bureaux, occupant également la troisième marche du podium des plus gros promoteurs de logement. Après avoir révolutionné le commerce-loisir, Alain Taravella entend définitivement laisser sa marque sur la définition de la valeur urbaine de demain.
Chiffres :
- Sa fortune personnelle est estimée à 1,46 milliard de dollars. Il est actionnaire à 46 % d'Altarea Cogedim
- First : à la fin des années 2000, il fait une entrée fracassante sur l'immobilier de bureau, en tant que maître d'ouvrage délégué pour le redéveloppement de la tour First, plus haut gratte-ciel de France
- Mécénat : Altarea Cogedim est, depuis 2015, partenaire du Festival international d'art lyrique d'Aix-en-Provence
Boris Beltran