Biens de défiscalisation : les droits et devoirs des investisseurs
Investir dans un bien de défiscalisation implique généralement de faire appel à un intermédiaire, qui gérera le montage juridique mais aussi le financement de l'opération pour le compte de l'investisseur. Selon son statut, cet intermédiaire sera soumis à différentes obligations. Un conseiller en investissement financier (CIF) entre dans le giron de Mifid 2, un courtier en assurance doit respecter les préceptes de DDA et un courtier en prêt ceux d'IOBSP. Le conseil en immobilier, en revanche, n'est pas une profession encadrée. La seule obligation des professionnels exerçant ce métier est d'obtenir la « carte T », carte professionnelle d’agent immobilier délivrée par la CCI, et de suivre quatorze heures de formation par an. « L'AMF considère que le CIF œuvre dans le domaine de la finance, c'est pourquoi en principe le conseil en immobilier est hors champ, confirme Eric Gicquel, avocat à Paris et Saint-Malo. Mais à partir du moment où le conseil émet une opinion sur l'intérêt de tel ou tel placement, il entre dans le spectre du CIF. » De fait, il existe une certaine méfiance à l'égard des conseils en immobilier n'ayant pas le statut de CIF, car celui-ci soumet les professionnels à de nombreuses obligations. « Mifid 2 a étendu les piliers du texte initial (Mifid 1, publié en 2007, ndlr) à l'intégralité des produits financiers », étaie Pierre Reytier, conseiller en investissements financiers à Brive-la-Gaillarde.
La transparence, obligation suprême du conseil
Et la protection de l'investisseur est au cœur du texte. Deux volets principaux sont renforcés : la transparence du conseil délivré, et celle des frais appliqués. « Lorsque des conseils en investissement sont fournis, l’entreprise d’investissement doit indiquer au client, en temps utile […] si les conseils sont fournis de manière indépendante », énonce la loi. Mais le règlement va plus loin en exigeant du conseil qu’il informe son client si l’éventail des services « se limite aux instruments financiers émis ou proposés par des entités ayant des liens étroits avec l’entreprise d’investissement ». Les frais ne sont pas en reste avec la même exigence de totale transparence : « Les informations sur tous les coûts et frais liés doivent inclure des informations relatives aux services d’investissement et aux services auxiliaires, y compris le coût des conseils », précise le texte. Pour cette raison, il n’est plus possible aujourd’hui pour le conseil d’omettre certaines informations : il doit détailler le montage de l’opération, les risques et les frais associés.
L’étude du marché locatif à la charge de l’investisseur
Toutefois, l’investisseur a lui aussi des devoirs, comme le rappellent régulièrement les tribunaux. Car les obligations légales d’information des conseils ne dédouanent pas les investisseurs de s’informer eux-mêmes de la pertinence de leur investissement. L’article 78 de la loi Sapin 2 prévoit ainsi que « toute publicité relative à une opération d'acquisition de logement destiné à la location permet raisonnablement de comprendre les risques afférents à l'investissement ». C’est donc bien à l’investisseur de vérifier que le loyer prévu est en ligne avec la demande des locataires et que l’état du marché locatif permet une opération rentable – ou, au minimum, à l’équilibre. D’autant plus que le non-respect des engagements de location entraîne la perte du bénéfice des incitations fiscales. Autre point de vigilance, le business plan, qui doit prévoir une marge de rentabilité suffisante pour parer à l’inconnu : un mois sans locataire bien sûr, mais aussi un changement de loi impossible à prévoir, comme la hausse de la CSG entrée en vigueur en 2018.
Propos recueillis par Camille Prigent lors des Journées de l'ingénierie patrimoniale