Marcelina Stark (Angelys Group) : « Les Français sont des amoureux de la vieille pierre »
Décideurs. Quels sont vos critères de sélection de projets immobiliers ?
Marcelina Stark. Angelys Group se concentre sur les immeubles à caractère patrimonial situés en cœur de ville. Le premier critère de sélection sera, sans surprise, l'emplacement du bien. Vient ensuite le coût du foncier, qui doit être au prix du marché. Les autorisations de travaux, l'emploi d'un architecte et la longue préparation qu'implique ce type d'opérations ont un impact sur leur coût, en moyenne 20 % plus élevé que dans du neuf. Nous avons également à cœur la qualité architecturale des biens. Un service d'urbanisme et un architecte salarié gèrent les permis de construire. Nous travaillons également avec des architectes des Bâtiments de France afin de vérifier que les travaux envisagés sont en ligne avec les vœux de la mairie.
Chacune de ces opérations est-elle éligible à un seul dispositif fiscal ?
Il est possible de proposer plusieurs dispositifs fiscaux pour une même opération. Cela va dépendre de la nature des travaux qui seront réalisés sur l'immeuble : réhabilitation lourde, entretien, travaux d'amélioration... L'éligibilité de l'opération à plusieurs dispositifs sera étudiée en amont avec nos juristes internes ainsi qu'avec un cabinet d'avocats spécialisé en la matière.
Comment fonctionne le dispositif Malraux ?
La loi Malraux est, à l'image du Pinel, une réduction d'impôt. Le taux varie en fonction des zones dans lesquelles est situé le bien. Entre 22 % et 30 % du montant des travaux peuvent ainsi être déduits. Le grand avantage de ce dispositif est qu'il n'est pas soumis au plafonnement global des niches fiscales, contrairement au Pinel. Un contribuable peut investir chaque année un maximum de 400 000 euros. Toutefois, la réduction d'impôts s'applique uniquement aux revenus ordinaires. Elle s'adresse donc à des investisseurs dont le revenu principal provient du salaire.
« La loi monuments historiques est la Rolls Royce de la défiscalisation »
Et la loi monuments historiques ?
Cette loi est souvent considérée comme la Rolls Royce de la défiscalisation car le montant des travaux effectués dans le cadre de ce dispositif peut être déduit dans sa totalité, sans plafond, de tous les revenus ordinaires et fonciers. Il s'adresse donc à des personnes fortement imposées. Les biens pouvant entrer dans ce dispositif sont rares : il s'agit d'immeubles classés monuments historiques ou faisant partie du patrimoine national.
La loi de finances 2018 a-t-elle modifié ces dispositifs ?
La loi Malraux a été mise à jour en 2017 et aucun changement supplémentaire n'a été prévu dans la dernière loi de finances. Concernant la loi monuments historiques, un changement a été opéré : l'agrément jusqu'alors nécessaire lorsque la propriété faisait l'objet d'une division a été supprimé. C'est un changement très positif.
Le prélèvement à la source aura-t-il lui aussi un impact ?
En ce qui concerne les lois Pinel et Malraux, le prélèvement à la source aura des impacts positifs pour nos clients. S'ils investissent en 2018, l'administration va leur rembourser en 2019 le montant de la réduction d'impôt qu'ils auraient dû appliquer cette année selon les dispositions prévues par le crédit d'impôt modernisation du recouvrement (CIMR). Le client est donc gagnant car il investit, ne paie pas d'impôt sur ses revenus 2018 qui est une année « blanche », et conserve tout de même sa réduction d'impôt. Pour le déficit foncier, le calcul peut être avantageux selon les cas. Pour la loi monuments historiques, en revanche, investir en 2018 aura peu d'intérêt sauf pour les personnes qui toucheront cette année des revenus exceptionnels. Ceux qui n’en touchent pas verront les sommes investies en 2018 perdues : c'est pourquoi la majorité des opérations faisant appel à ce dispositif seront remises à 2019.
« L’investissement dans l’ancien génère une rentabilité moyenne de 3 % à 4 % avant réduction d'impôt »
Au-delà de l'avantage fiscal, investir dans l'immobilier ancien est-il rentable ?
Les investissements dans l'ancien en cœur de ville ne sont pas à grande rentabilité, mais celle-ci reste raisonnable : elle est en moyenne de 3 % à 4 % avant réduction d'impôt, soit tout de même entre 5 % et 7 % après réduction. Les rentabilités sont en général moins élevées dans des villes comme Bordeaux et Paris où elles oscillent autour de 1,5 % avant réduction d'impôt.
Quelle est la durée moyenne de ces investissements ?
Les Français sont des amoureux de la vieille pierre et, depuis mon arrivée en 2009, nous n'avons pas eu une seule revente de bien. Nous travaillons dans des grandes villes qui ont un fort potentiel locatif, où les biens sont prisés et se conservent longtemps. Au terme du délai de défiscalisation – neuf ans pour la loi Malraux, 15 ans pour la loi monuments historiques –, le contribuable passe généralement le bien en location meublée afin de le conserver. Il est bien entendu également possible de revendre une fois ce délai expiré.
Et les risques associés ?
Pour l'investisseur, le premier risque est la requalification fiscale. C'est pour cela que nous validons avec un avocat en amont de toute opération l'éligibilité des critères à ces dispositifs. Deuxièmement, lorsque l'investisseur passe par un opérateur, il doit vérifier dans le document de réservation que le montant des travaux est bien fixe et forfaitaire. Cela lui assurera, en cas de surprix, que le prix de vente de son lot ne changera pas. Enfin, il est également important de vérifier les garanties souscrites par l'opérateur, qui ne sont pas toujours obligatoires dans l'ancien. Ainsi, une garantie de parfait achèvement, une assurance chantier et une garantie de responsabilité civile sont sécurisantes pour l'investisseur.
Quelles sont selon vous les tendances à venir dans l'immobilier ancien ?
De nombreuses opportunités vont certainement éclore dans le domaine des monuments historiques. L’État a entrepris de rénover ses vieilles bâtisses et transforme de plus en plus de bâtiments, principalement des châteaux, en maisons de retraite, écoles, hôpitaux… Et il aura besoin d'investisseurs pour financer ces réhabilitations !