L'émergence des nouveaux modes de travail et l'explosion des plates-formes numériques bouleversent les codes du marché de l'immobilier de bureaux. La question de la valeur ajoutée se pose, plus que jamais, aux acteurs historiques du marché.

Boire un smoothie, faire une séance de sport sur un tapis de course puis enchaîner une réunion avec son community manager : la tendance du coworking – cette nouvelle génération de bureaux équipés avec durées d'engagement réduites – a profondément modifié l'environnement du travail. Mixte entre bureaux connectés, salles de réunion atypiques, lieux de vie et de restauration : ces espaces offrent bien plus de services que le traditionnel immobilier d'entreprise, transformant ainsi le bailleur en maître d'hôtel.

En 2017, on en compte 235, contre une petite dizaine en 2010. En Île-de-France, ils représentent 2 % à 3 % de l'offre mais devraient atteindre les 10 % à 20 % d'ici cinq ans, selon l'Observatoire régional de l'immobilier d'entreprise en Île-de-France (ORIE). En effet, coworking et centres d'affaires représentent aujourd'hui 12 % de la demande placée à la location pour les transactions de bureaux de plus de mille mètres carrés. « Le coworking rebat les cartes et c'est toute la conception de l'aménagement des espaces de travail qui s'en trouve changé », affirme Cécile de Guillebon, présidente de l'ORIE. Une petite révolution sur le marché de l'immobilier de bureaux. « L'évolution forte du corwoking a changé la relation entre le bailleur et le preneur. L'arrivée des plates-formes numériques comme Wework ont glissé entre les deux parties un intermédiaire qui vend au locataire du service », analyse Emmanuel Cordié, conseil en marketing, numérique et immobilier chez DRE. De nouveaux acteurs du numérique (CoJob, Kwark, Easywork, Office Riders, etc.) côtoient désormais ceux de l'industrie immobilière, bousculant les fondamentaux du métier.

Risque d'une désintermédiation 
Une question se pose alors : l'explosion des plates-formes comme Leboncoin et Airbnb fait-elle courir aux les brokers le risque de la désintermédiation ? Pour Sophie Desmazières, présidente de BureauxLocaux.com, deux marchés coexistent : « Il y a le marché des acteurs nés grâce au Web, à l'image de Airbnb, et puis il y a l'immobilier d'entreprise où opérateurs et la nature des deals ne changent pas mais où l'accès au marché n'est plus le même », observe-t-elle. Si les professionnels sont les premiers à poster leurs annonces sur Leboncoin, elle est convaincue que les plates-formes spécialisées restent les mieux placées pour délivrer des informations qualifiées et exhaustives, nécessaires à une vision globale du marché.

Ce qui est manifeste, en revanche, c'est qu'Internet a apporté une transparence inédite, sur l'offre comme sur les prix, dans un secteur souvent qualifié d'opaque. « Depuis un an, le numérique a engendré une véritable remise en question de la part des conseillers en immobilier sur la valeur ajoutée qu'ils apportent. Le métier doit évoluer vers une offre d'accompagnement et de services plus pointue et spécifique », analyse Sophie Desmazières. Le développement des sites d'annonces en ligne insuffle un regain de vitalité sur un marché désormais ouvert à des entreprises jusqu'alors inconnues. « Comme on a pu le voir dans le secteur de la restauration, des taxis ou de l'hôtellerie, l'ubérisation a permis de fluidifier le marché et d'apporter de nouvelles opportunités », constate la chef d'entreprise. Une rupture des usages qui pourrait se révéler moteur de croissance.

Charlotte Danjou

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