Les planètes semblent enfin s’aligner pour faire du Grand Paris une réalité et un facteur incomparable d’attractivité. Après une mise en place laborieuse et une certaine confusion politico-institutionnelle, tout semble effectivement s’accélérer.

Début 2016. L’impatience prévaut parmi les professionnels de l’immobilier. Quant aux Franciliens, ils ont beau être les premiers concernés, ils sont pour la plupart bien en peine de désigner ce que le projet même de Grand Paris recouvre. L’immense chantier, présenté comme le plus grand du siècle, est invisible : en scrutant le paysage, peu de constructions émergent, et son super métro de rocade inter-banlieues, le Grand Paris Express, n’est pas encore sorti de terre que, déjà, des retards s’amoncellent. À cela, une multitude de structures portant le dénominateur commun de « Grand Paris » ajoute à la confusion. Difficile effectivement pour les non-initiés de s’orienter entre la Société du Grand Paris, la Métropole du Grand Paris (MGP) ou Grand Paris Aménagement (lire encadré).  Cette complexité administrative toute française, mâtinée de réorganisation territoriale et de guéguerres politiques, bloque la mise en chantier d’un projet essentiel censé renforcer la place de la France en Europe et dans le monde. Résultat : une nébuleuse de promesses plus agaçante que porteuse.

 

Conjonctions
 

À peine une année plus tard, une conjonction d’éléments permet d’envisager l’avenir sous un jour nettement plus favorable. « L’idée de grande métropole a émergé dès 2008 en générant des attentes prévisibles. Les entreprises de taille moyenne se sont impatientées. Pour les grands groupes et les investisseurs qui se projettent à beaucoup plus long terme, le Grand Paris a toujours été tangible. Aujourd’hui, l’engagement redouble », explique Vincent Gollain, directeur du département économie de  l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la Région Île-de-France (IAURIF).

Le groupe immobilier Icade, qui a toujours misé sur le Grand Paris met par exemple le « turbo ». « Pour nos actionnaires et clients, le temps s’accélère. Des rendez-vous comme les JO 2024 ou même les championnats de rugby de 2023 ne paraissent plus si loin. Icade se met en ordre de bataille pour se positionner sur Paris et l’Île-de-France », note André Martinez, président du conseil d’administration.  De manière visible, le Grand Paris Express, structurant réseau de transports autour duquel va se construire les nouveaux quartiers, est enfin lancé. Les premiers coups de pioche du nouveau métro automatique ont été donnés en juin 2016 et les tunneliers commencent à creuser dans les sous-sols. Conjointement, la candidature de Paris aux Jeux olympiques 2024 attise la curiosité des investisseurs étrangers et cautionne les potentialités de la métropole en devenir. L’excellente réputation des infrastructures françaises rassure également et la date d’achèvement des lignes a été modifiée afin d’assurer la mise en service des gares d’ici 2024. « Les investisseurs ont besoin de très grands projets en zone euro. Et ils se trouvent dans un seul lieu : le Grand Paris. C’est le plus grand investissement d’infrastructure d’Europe de l’Ouest, et l’Île-de-France s’impose finalement comme la place la plus attractive et transparente juridiquement », insiste Olivier Wigniolle, directeur général d’Icade.

 

Ambassadeurs
 

De plus, si la lisibilité au niveau des instances institutionnelles n’est pas encore complètement acquise, elle est indéniablement sur les rails. Que l’on évoque Paris Région ou le Grand Paris, une forme de consensus s’est imposée parmi les décideurs politiques, bien décidés cette fois à ne pas louper le coche. Paris Région Entreprises, l’agence de développement économique de la Région Île-de-France constitue désormais « le point de contact incontournable de toutes les entreprises, étrangères et franciliennes, créatrices de croissance sur le territoire », indique son directeur, Robin Rivaton, et Ross McInnes, président du conseil d'administration du groupe aéronautique Safran, a de son côté été officiellement nommé « ambassadeur » de Choose Paris Region - Welcome To Greater Paris. Par ailleurs, la SGP engage des projets culturels sur l’ensemble des communes afin de fédérer une identité métropolitaine en dehors de la capitale. « Le message commence à passer. Les interlocuteurs internationaux perçoivent que quelque chose de très important se prépare. Ils ont compris que ce n’était pas qu’un grand projet de métro et que les hotspots n’étaient pas uniquement situés dans l’hypercentre », confirme Vincent Gollain.

 

Multipolaire
 

La dynamique est maintenant multipolaire : il s’agit de créer de la valeur dans tous les territoires de la « région capitale ». Si La Défense demeure le site phare des grands sièges d’entreprises, avec des produits immobiliers d’exception et des immeubles de grande hauteur, l’implantation des gares va radicalement modifier l’accessibilité de nombreuses villes, riches de lieux exceptionnels mais enclavés. À l’image du Bourget, où des investisseurs russes se sont déjà positionnés sur le musée de l’Air et de l’Espace, et Boulogne-Billancourt, qui entame une profonde mue culturelle avec l’île Seguin et son pôle de création contemporaine regroupant un centre artistique et une nouvelle cité musicale. « La région élargit sa gamme avec des projets économiques, mais aussi technologiques, scientifiques, hôteliers et culturels. Le Grand Paris n’est pas Londres : sa richesse réside dans sa diversité », précise Vincent Gollain. Dans la compétition avec la capitale britannique, l'un des points forts est également sa capacité d’innovation. L’ouverture de la station F, le plus grand incubateur de start-up au monde mais également les 5000 start-up multithématiques déjà implantées sur le territoire symbolisent le bouillonnement créatif qui secoue la Région Capitale dans tous les domaines.
Laetitia Sellam

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