Le 28 juillet 2010, l’Assemblée générale de l’ONU adoptait une résolution dans laquelle elle déclarait que le droit à une eau potable, salubre et propre est un droit fondamental essentiel au plein exercice du droit à la vie. Après l’examen par le Sénat d’une proposition de loi déposée à l’Assemblée en avril 2015, on peut s’interroger sur l’éventuelle remise en question de ce droit.

Pour que le droit à l'eau devienne une réalité, même dans les municipalités et les départements les plus défavorisés, il faut que le législateur intervienne pour promouvoir et financer plus de solidarité au plan interne. Le 23 février 2017, le Sénat a examiné une proposition de loi, qui est le fruit d’un travail entamé par les associations, et poursuivi par les parlementaires. Elle vise à mettre en œuvre de manière effective le droit à l'eau potable. La proposition de loi suggère à cet effet, l'obligation pour les communes de prévoir des points d'eau potable d'accès public gratuit et non discriminatoire et en fonction du nombre d'habitants, des toilettes et des douches publiques ainsi qu’une aide préventive pour l'eau en faveur des personnes en situation de précarité. Ces dispositions s'adressent en particulier aux publics défavorisés ou en situation de précarité ainsi qu'aux personnes non raccordées au réseau de distribution d'eau ou qui n'ont pas un accès direct et permanent à l'eau potable.

Contrairement à ce qui avait été imaginé par de nombreux défenseurs de ce projet seuls trois articles sur les sept ont été retenus. Les sénateurs ont adopté des dispositions visant à supprimer l’instauration d’un droit à l’eau, sa portée normative étant jugée contestable, supprimer les obligations prévues par le texte pour les collectivités en matière d’accès gratuits à un point d’eau potable, à des toilettes publiques et douches, en raison notamment de la charge financière que cela induirait pour les collectivités. Lors de cette séance, le dispositif d’aide prévu pour les ménages dont les dépenses d’eau excèdent 3% de leurs ressources a également été supprimé. Un statu quo mis à mal par l’agenda parlementaire, puisque les travaux ont pris fin à partir du 23 février et n’ont repris que le 20 juin. Pour être définitivement adopté, le texte devra de nouveau être inscrit à l’agenda du Sénat lors de la prochaine session parlementaire qui débutera début juillet. La France ne rejoindra donc pas le Burkina Faso, ni l’Uruguay, qui ont déjà sacralisé ce droit fondamental. Ni la Slovénie qui l’a inscrit dans sa Constitution.

 

L’interdiction de couper l’eau en cas d’impayé même partiel

 

Le suspens de cette proposition de loi intervient à la suite de la campagne sur les coupures d’eau et après la condamnation de la société Veolia en février 2017. Le groupe, en charge de la distribution d'eau potable avait réduit en mars 2016 le débit d'eau dans le logement d’une cliente, à la suite d'un impayé partiel de sa facture. Le groupe avait été condamné par la cour d’appel de Nîmes à verser la somme de deux mille euros à la cliente concernée. Cet arrêt fait application d’une loi du 15 avril 2013 dite Brottes. Selon ce texte « les distributeurs d'eau ne peuvent interrompre la fourniture d'eau dans une résidence principale ». Cette condamnation montre que le groupe Veolia n'a pas du tout la volonté de respecter la loi, a réagi Emmanuel Poilane, le directeur de la fondation France Libertés.

Dans ce contexte, il n’existe toujours pas d’obligation pour les communes de prévoir des points d'eau potable d'accès public gratuit, non discriminatoire, en fonction du nombre d'habitants, des toilettes et des douches publiques jusqu’à sa possible reconnaissance lors de la prochaine session parlementaire qui a repris en juillet 2017. À suivre.

 

Vanessa Benesty 

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