Gilles Betthaeuser (Colliers International France) : « Etre partie prenante du parcours de l’immeuble »
Décideurs. Vous avez fait l’acquisition des deux filiales services d’Icade fin septembre 2016 : Icade Asset Management spécialisée dans la gestion d’actifs et Icade Conseil. Comment cela s’inscrit-il dans la stratégie générale de Colliers International France ?
Nous avons en effet fait le choix de compléter notre offre avec un univers de services à destination des professionnels de l’immobilier. C’est un choix assumé, mûri depuis deux ans, que nous inscrivons dans notre trajectoire générale de développement. C’est également une forme de pari que nous avons la chance de démarrer avec une acquisition importante et un actif significatif. Cette dernière nous permet aujourd’hui de véritablement franchir un cap et illustre notre volonté d’étendre notre leadership du conseil aux utilisateurs au conseil aux investisseurs. Chez Colliers, que ce soit au Canada ou en Australie en particulier, l’alliance entre le service et les solutions de conseil s’est faite de manière très naturelle et s’est avérée très structurante. Il existe des résonnances évidentes entre les métiers. Ce nouveau positionnement est aussi exempt de conflits d’intérêts, ce qu’il est important de souligner. Nous continuerons à proposer à nos clients, entreprises ou investisseurs, une offre de services sur mesure, dans une logique de création de valeur tout au long de la chaîne des services immobiliers. La volonté chez Colliers France est d’explorer plusieurs sujets. Pour cela, nous avons quatre axes de développement tous également prioritaires : renforcer les métiers liés à l’occupant en particulier les métiers de conseil, étoffer notre implantation régionale où nous estimons avoir un potentiel important, nous ouvrir à d’autres métiers et enfin configurer de nouveaux dispositifs avec comme objectif d’atteindre cinq milliards d’actifs sous gestion. Le quatrième axe est de se tourner également vers de nouveaux secteurs d’activité tels que l’hôtellerie ou la logistique.
« Le propre de notre identité est d’être à l’écoute des marchés locaux sans appliquer un modèle universel »
Comment décririez-vous aujourd’hui la marque distinctive de Colliers France ?
Nous ne nous positionnons pas comme un ensemblier car nous souhaitons être partie prenante de l‘histoire et du parcours de l’immeuble. Les services à haute valeur ajoutée, les sujets porteurs de complexité et la capacité à apporter une chaîne de valeur sont nos attributs, ce qui nous distingue sans doute de nos concurrents. La plateforme française s’affirme comme un standard qualitatif, un étendard avec la capacité d’accompagner nos clients français à l’international.
L’idée est aussi d’utiliser ce qui marche bien dans d’autres pays, comme l’asset mangement en Belgique. Nous souhaitons aussi être pionnier et innovant au Maroc où les métiers vont se mettre en place. Nous regardons également comment installer notre marque en Espagne. Et puis au-delà, nous avons des visées sur l’Angleterre et l’Allemagne. Cette articulation entre les différents pays s’organise. Colliers restera néanmoins un assemblage hétéroclite selon les pays en conservant son empreinte, un standard de qualité et d’excellence. Le propre de notre identité est d’être à l’écoute des marchés locaux sans appliquer un modèle universel.
Les modes de travail et l’immobilier de bureau vivent une profonde mutation. Quel est selon vous le sens de l'histoire ?
À l’évidence, plein de choses se passent dans l’univers des environnements de travail. Les annonces sur le bien-être, le design, les nouveaux modes de travail s’enchaînent, d’autant que la France a un certain retard en la matière par rapport à d’autres pays. Mais une fois que l’on a dit cela, on n’a pas dit grand-chose… Il s’agit de ne pas confondre la forme et la substance et il me semble que c’est plutôt la forme qui l’emporte dans ces annonces ainsi que dans beaucoup de projets. Derrière ces évolutions, la problématique de fond est celle des modèles managériaux. L’entreprise française est aujourd’hui vraiment questionnée et remise en cause dans ses fondamentaux, comme la dimension statutaire du bureau, un certain manque d’autonomie... Dans ce contexte, l’évolution des espaces de travail peut être un levier de transformation des entreprises. Ensuite, le métier de conseil en immobilier doit à la fois proposer une durabilité certaine tout en s’adaptant aux flux de changements rapides des entreprises. A nous de gérer cette complexité, de parvenir à rendre les espaces « durablement modernes », de ne pas confondre gadget et substance. Je crois en effet que l’on se lasse de tout sauf de ce qui est beau et durable. La forme n’est pas anecdotique mais elle est aujourd’hui suramplifiée. La substance alliée à une créativité durable est la voie de Colliers International France.
Propos recueillis par Laetitia Sellam