Jérôme Stubler (Vinci Construction) : « Des villes comme Bordeaux permettent une reprise de l'activité »
Décideurs. L'année écoulée a été marquée, pour Vinci Construction, par la signature de grands contrats à l'international. Qu'en est-il du marché français ? Quelles sont vos perspectives ?
Jérôme Stubler. L'année 2015 est une année de rebond pour Vinci Construction, le carnet de commande est globalement stable et en légère croissance en France. Cette évolution est très satisfaisante car elle s’inscrit dans un contexte difficile, marqué par la baisse des commandes publiques en France et par la chute du prix du pétrole, impactant les marchés africains. En dépit de cela, nous avons connu plusieurs succès à l'international, en y réalisant 45 % de notre chiffre d'affaires, avec l'objectif d’y réaliser 60% de notre activité en 2020. Dans l’Hexagone, la dynamique est contrastée. En Île-de-France, nous avons remporté quatre projets majeurs : le chantier de la Samaritaine, la rénovation de Roland-Garros, la jonction des deux aérogares de l'aéroport d'Orly, et la tour Trinity à La Défense. En revanche, la baisse des dépenses d’investissement des collectivités locales rend le reste du marché français difficile, même si nous anticipons une légère reprise de l'activité pour 2016, notamment en province où certaines villes, comme Bordeaux, affichent de belles perspectives.
Décideurs. Quels sont les projets d'ampleur sur lesquels œuvre Vinci Construction et qui reflètent votre savoir-faire ?
J.S. Le projet le plus emblématique est incontestablement celui de la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux pour un montant de six milliards d'euros, dont les travaux de génie civil et de terrassement ont été achevés en avance, le dernier tronçon de rail ayant été soudé la veille de Noël 2015. Il s’agit du projet le plus important réalisé sur investissements privés en France. Ce chantier, réalisé en un temps record, a mobilisé jusqu'à 7 000 collaborateurs et sous-traitants lors du pic d’activité. C’est l’un des plus beaux témoignages de la capacité du groupe Vinci à maîtriser tous les aspects d'un projet complexe. Citons également l’extension de l'aéroport de Santiago, au Chili, un projet gagné en conception, construction et concession, dont la phase d’étude représente une prouesse technique puisque menée en « full BIM », pour un projet qui sera réalisé sans interruption de l'activité. N'occultons pas, pour autant, les projets de plus petite ampleur : Vinci Construction travaille actuellement, dans le monde, sur 12 000 projets.
Décideurs. Concernant vos travaux sur les villes durables et les écoquartiers, en quoi consiste le programme Blue Fabric ?
J.S. La question des bâtiments écologiques et des écoquartiers n'est plus à conjuguer au futur, mais bien au présent. À ce titre, nous avons regroupé toutes nos initiatives en la matière sous une offre unique : « Blue Fabric ». Aujourd'hui, entre 80 et 90 % des bâtiments neufs que nous livrons ont été réalisés selon cette méthode. En termes de performance énergétique, nous garantissons d’atteindre les performances demandées et vérifions la conformité au label après livraison. L’utilisation de matériaux bas carbone est aussi l’une de nos préoccupations. Nous sommes aujourd’hui le leader, en France, de la construction bois avec la marque Arbonis. Enfin, nous encourageons l’utilisation de nouveaux bétons à faible empreinte carbone utilisant du ciment moulu et mixé avec des résidus de l'industrie sidérurgique. Ces bétons innovants émettent beaucoup moins de CO2 et sont tout aussi résistants.
Décideurs. Qu'entreprenez-vous pour améliorer le respect de l'environnement et la sécurité en phase de chantier ?
J.S. « Le Manifeste Vinci », est un formidable engagement pour tous nos collaborateurs. Un engagement dont nous sommes fiers et qui crée un sentiment de solidarité autour d’une charte comportementale et de valeurs que nous partageons. En matière d'environnement, nous focalisons nos efforts sur la gestion des déchets, en les valorisant. Cette préoccupation est au coeur des enjeux du Grand Paris, principalement pour les déchets géotechniques (ndlr : tri des terres polluées). Côté sécurité, nous menons un travail de fond, à la fois sur les équipements et sur la formation, qui nous a permis de réduire le taux de fréquence des accidents de 30 % en deux ans, taux que nous souhaitons à nouveau diviser par trois d'ici cinq ans, afin d’être le leader mondial de la profession en termes de sécurité sur nos chantiers. Nos actions sociales s’expriment aussi sur le terrain, en cherchant à procurer des emplois durables à des personnes éloignées du monde du travail, notamment grâce à Vinci Insertion Emploi (VIE).
Propos recueillis par Boris Beltran