Klépierre a la cote
Klépierre fait une entrée fracassante au CAC 40 en remplaçant EDF dans l’indice phare de la Bourse de Paris. Mais pour ceux qui suivent la foncière, cette annonce n’est pas une véritable surprise. Elle n’est que l’aboutissement d’une stratégie bien rôdée qui a vu le groupe, détenteur du statut SIIC*, se hisser au fil des années à la deuxième place des leaders des centres commerciaux en Europe, derrière Unibail-Rodamco. Pour y parvenir, Klépierre a multiplié ces dernières années, malgré la crise et la morosité de la consommation des ménages, les opérations à succès et les acquisitions d’envergure sur son marché phare. Dans l’ordre : la création du centre commercial de la gare Saint-Lazare en 2012, l’une des opérations les plus marquantes de ces dernières années sur le marché du commerce français. Suit la sortie définitive, en 2013, du marché des bureaux avec un arbitrage très symbolique : la vente des murs du siège social du groupe, alors situé au 21 avenue Kléber, dans le 16e arrondissement de Paris. L’année suivante, nouvelle annonce d’envergure avec la plus importante cession de 2014 sur le marché français : celle d’un portefeuille de 126 galeries commerciales à Carrefour, pour près de deux milliards d’euros.
En ligne de mire : Unibail-Rodamco
La liste ne s’arrête pas là. En 2015, Klépierre a définitivement entériné l’absorption-fusion de Corio, qui a fait passer son portefeuille d’actifs de 14 à 21 milliards d’euros et lui permet de défier Unibail-Rodamco comme leader européen de l’immobilier commercial. Une opération qui n’altère en rien les capacités à investir du groupe qui, cette même année, acquiert Plenilunio, un centre commercial de référence à Madrid, qu’il compte restructurer. Montant de la transaction : 375 millions d’euros. Derrière toutes ces opérations, un objectif simple : « Créer le leader pure-play des centres commerciaux en Europe », comme l’assure Laurent Morel, le président du directoire. Autrement dit, prendre la place d’Unibail-Rodamco. Le chemin à parcourir peut être encore long, mais Klépierre a déjà réussi un pari : détrôner son principal concurrent de son statut d’unique foncière du CAC 40.
Simon, l’actionnaire décisif
Pour comprendre comment l’histoire de Klépierre s’est accélérée, il faut remonter à 2012 et l’arrivée de Simon Property Group en tant que principal actionnaire du groupe. Aujourd’hui détenteur de 20 % du capital, le géant américain des centres commerciaux a fait entrer la foncière dans une nouvelle ère, en lui faisant profiter de son expertise incontestable sur ce marché et de sa puissance de développement. L’arrivée de Simon a aussi acté le désengagement définitif de Klépierre du marché des bureaux, pour se focaliser sur son cœur de métier. Le groupe entend désormais se constituer un portefeuille de centres commerciaux de référence en Europe, dans les zones géographiques les plus porteuses en termes de croissance démographique. Klépierre en a recensé soixante et entend bien y être correctement représenté. Tout ce qui n’entre pas dans cette stratégie a vocation à être cédé, comme le portefeuille de neuf centres commerciaux aux Pays-Bas vendu à Wereldhave, en 2015, pour 770 millions d’euros. Aujourd’hui, Klépierre est à la tête d’un patrimoine de vingt-deux milliards d’euros, quasi uniquement composé de centres commerciaux. Son capital, la foncière le réalloue presque intégralement dans ses actifs, majoritairement dans des extensions, comme celle du centre commercial de Hoog Catharijne, à Utrecht et ses 70 000 mètres carrés, qui sera le plus grand de Hollande. Celle de Val d’Europe, qui Klépierre s’est néanmoins lancé dans la construction du centre commercial du Prado, à Marseille, sur 25 000 mètres carrés, en septembre dernier. Le tout, en affichant une solide situation financière, avec un ratio LTV de 40 %. « Nous avons réalisé plusieurs émissions obligataires à un coût très compétitif. Klépierre bénéficie d’une bonne notation de crédit (A-) et son papier est apprécié, souligne Laurent Morel. Nous avons au total 2,8 milliards d’euros de liquidités mobilisables sur nos 9,5 milliards d’euros de dettes. » De quoi réaliser encore quelques belles opérations.
S.D.C.
* Sociétés d’investissement immobilier cotées, exonérées d’impôt sur les revenus à condition qu’elles reversent 85 % de leurs revenus locatifs à leurs actionnaires.