Foncière des Régions poursuit une stratégie de développement axée sur une culture partenariale avec de grands comptes. Un modèle payant. Christophe Kullmann, son directeur général, nous en livre les clés.

Décideurs. Quelles sont les principales clés du succès du business model de Foncière des Régions ?

Christophe Kullmann. Foncière des Régions s’est effectivement construit à partir d’importantes opérations d’externalisation au début des années 2000, avec de grands groupes tels qu’EDF, Orange, Thales, Eiffage, Accor dans l’hôtellerie ou Telecom Italia en Italie. Cette culture partenariale est une démarche vertueuse, qui s’incrit dans la durée. Elle va plus loin que le simple produit et vise à comprendre l’ensemble des besoins des utilisateurs afin d’apporter une réponse globale et structurelle à leurs problématiques immobilières. C’est également un levier de performance pour notre groupe qui nous donne une grande visibilité sur nos cash-flows futurs, avec des durées de baux qui s’allongent, comme c’est le cas  pour Telecom Italia. Nous venons ainsi de renouveler tous leurs baux, ce qui a plus que compensé la baisse des loyers. À travers cette démarche partenariale, nous plaçons le client avant le produit et c’est ce qui fait son succès.

 

Décideurs. Vous axez également votre stratégie sur la création de valeur.  Comment se reflète-t-elle dans votre pipeline d’investissement et de projets ?

C. K. Notre modèle partenarial, parce qu’il s’inscrit dans la durée, est en soi créateur de valeur, notamment sur le marché des bureaux. Un autre axe de création de valeur a été la mise en place, en interne, d’une équipe dédiée à la promotion immobilière qui réfléchit à de nouveaux projets pour compte propre. En 2015, nous avons ainsi pu livrer pas moins de neuf opérations de bureaux en France, louées à plus de 80 %. Depuis 2011, nous avons lancé vingt-neuf projets pour 823 millions d’euros, avec une durée moyenne ferme des baux signés de 9,7 ans. Notre rendement sur coût de revient s’élève à 7,5 % et la création de valeur réalisée est supérieure à 20 %. Notre pipeline se renouvelle également grâce à notre modèle partenarial : dans le cadre de toutes nos opérations d’externalisation, nous avons acquis du foncier ou des opérations à redévelopper. Une bonne partie du sourcing de notre pipeline est de fait interne et lié au patrimoine engrangé.

 

Décideurs. Qu’en est-il du côté des acquisitions ? Foncière des Régions n’a pas été très active ces derniers temps...

C. K. Depuis le début de l’année, nous avons réalisé plus d’un milliard d’euros d’investissements part du groupe en Europe sur nos trois métiers, soit près de 1,5 milliard d’euros en part totale ! Pour ce qui concerne plus spécifiquement les bureaux, le marché de l’investissement reste compliqué, avec des valeurs d’actifs aujourd’hui élevées qui ne procurent que peu de rendement. Mais nous restons attentifs et vigilants quant aux opportunités qui pourraient se présenter.

 

Décideurs. Vous basez une partie de votre croissance sur l’Allemagne, et notamment le marché résidentiel. Là encore, quelles sont vos clés du succès ?

C. K. L’Allemagne n’est pas un nouveau marché pour nous, nous y sommes présents depuis 2005 et y avons acquis une compétence importante. Notre patrimoine s’y élève à 3,3 milliards d’euros, sur des marchés porteurs tels que Berlin, Hambourg, La Rhénanie du Nord-Westphalie… Le logement est une industrie qui requiert des équipes locales, ce dont nous disposons. C’est un marché qui offre de bons fondamentaux : des prix au mètre carré raisonnables, un potentiel locatif très favorable, une rentabilité locative comprise entre 5 % et 5,5 %, ainsi qu’une réglementation claire et stable. Les acteurs qui investissent dans le résidentiel allemand savent où ils vont, à la différence de la France. Nous allons continuer à allouer à ce marché une enveloppe importante, qui s’élèvera à près de 500 millions d’euros en 2015, mais nous allons aussi poursuivre nos arbitrages des actifs non stratégiques.

 

Décideurs. Vous souhaitez accélérer votre développement en matière d’immobilier hôtelier en  Europe. Quelle est votre stratégie ?  

C. K. Nous avons poursuivi, sur le marché hôtelier, la même stratégie partenariale que celle menée sur celui des bureaux, en nous positionnant d’abord sur de grandes opérations d’externalisation avec Accor ou B&B et en accompagnant aujourd’hui des projets de développement. C’est ce que nous faisons avec Meininger ou Motel One. Actuellement, 85 % de notre patrimoine hôtelier se situe en France. Nous allons continuer à nous développer dans l’Hexagone, mais nous souhaitons aussi nous positionner à l’étranger. Notre principale zone de développement est l’Allemagne, et notamment Munich. Mais nous regardons également des opérations en Espagne, aux Pays-Bas et en Belgique.

 

Décideurs. Sébastien Bazin, P-DG d’AccorHotels, a créé une filiale destinée à acquérir des murs d’hôtels. Comment s’intègre votre partenariat dans cette nouvelle stratégie ?

C. K. Un portefeuille immobilier doit vivre avec la stratégie de ses occupants et Foncière des Régions a toujours été ouvert aux discussions sur les différents modes de détention d’un actif. Nous venons d’ailleurs d’annoncer un accord majeur avec AccorHotels. Nous avons déjà connu des situations similaires avec Orange notamment, lorsqu’ils ont souhaité racheter un certain nombre de sites qu’ils avaient externalisés. Il faut que chacun s’y retrouve et savoir anticiper le coup d’après.

 

Décideurs. L’immobilier coté est-il, selon vous, suffisamment valorisé ?

C. K. La Bourse valorise aujourd’hui les foncières au-delà de leurs actifs. Elle valorise leur capacité à créer de la valeur dans le temps. De nombreuses foncières créent de véritables morceaux de ville et sont devenues de réels opérateurs immobiliers intégrés. Notre métier a changé et l’industrie des SIIC (sociétés d’investissement immobilier cotées) est devenue incontournable. La plupart des grands projets urbains sont portés par des SIIC. Elles ne sont pas qu’un investisseur financier mais ont un vrai rôle dans l’économie. Elles sont aujourd’hui reconnues pour cela.  

 

Propos recueillis par Sophie Da Costa

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