Patricia Damerval (Groupe Pierre & Vacances - Center Parcs) : « Notre développement est focalisé sur les marchés porteurs »
Patricia Dameval a démarré sa carrière en tant que contrôleur de gestion chez PSA en 1987. Elle entre trois années plus tard à la Société générale où elle devient directeur de la consolidation et de la comptabilité centrale puis adjointe au directeur de la gestion financière du groupe. En 2000, elle rejoint le Groupe Pierre & Vacances-Center Parcs en tant que directeur financier groupe. Depuis 2005, en tant que directrice générale adjointe, elle accompagne avec succès le développement du groupe en France et à l’international. Son parcours et ses initiatives réussies lui ont valu de remporter le trophée Leaders de la finance en 2015, dans la catégorie services.
Décideurs. En quinze ans, le Groupe Pierre & Vacances-Center Parcs a beaucoup changé. Comment avez-vous effectué vos arbitrages entre croissance externe et interne ?
Patricia Damerval. Le groupe s’est historiquement constitué par croissance organique, c’est même dans nos gènes. Tout d’abord sur le territoire français avec l’offre Pierre & Vacances. Nous avons appliqué nos savoir-faire immobilier et touristique à des stations de montagne et à des sites balnéaires. Puis, nous nous sommes intéressés à de nouveaux marchés, comme l’Espagne. Nous avons suivi le même modèle de développement pour nos Center Parcs – acquis en 2003 – dans l’Hexagone. La croissance externe s’est faite, elle, par opportunité. Nous avons uniquement réalisé des opérations dans notre cœur d’activité. D’une part, avec le rachat de concurrents (Orion Vacances, Maeva, MGM Résidences) et, d’autre part, en acquérant des cibles dont la proposition d’offre est similaire (Grand Dorado, Center Parcs, Sunparks). Nous avons également fait le choix de nouer des partenariats stratégiques avec, par exemple, la création d’une joint-venture avec Accor en 2007 pour développer un réseau de résidences urbaines en France et à l’international et devenir le leader sur ce marché sous la marque Adagio City Aparthotel. Notre développement est focalisé sur les marchés porteurs.
Décideurs. Vous avez mené une importante opération de refinancement en 2014 d’un montant de 300 millions d’euros. Quels en ont été les rouages ?
P. D. Le groupe devait faire face en 2015 à deux échéances importantes nous conduisant à rembourser l’ensemble de nos financements bancaires et de marché. Nous avons donc fait le choix d’anticiper ces échéances. La difficulté a été de tout gérer en même temps. Le 4 février 2014, le groupe lançait une émission d’une obligation remboursable en numéraire et en actions nouvelles et existantes (Ornane) d’un montant de cent millions d’euros avec une échéance au 1er octobre 2019. L’émission a été rapidement sursouscrite le matin même du lancement, bénéficiant d’un fort intérêt de la part d’investisseurs institutionnels de long terme, majoritairement français. Ce fut un premier succès. Dès le lendemain, les banques chefs de file ont par ailleurs annoncé qu’elles exerçaient en totalité l’option de surallocation, portant ainsi le montant de l’opération à 115 millions d’euros. Nous avons renouvelé simultanément notre crédit syndiqué à hauteur de 185 millions d’euros, renforçant ainsi notre liquidité (l’engagement résiduel s’élevait à 130 millions d’euros au 31 décembre 2013). Compte tenu de la faiblesse des taux début 2014, le groupe avait ainsi la garantie d‘obtenir des conditions attractives sur les deux opérations.
Décideurs. Vous avez entrepris en 2010 un important plan de transformation du groupe. Quels en ont été les objectifs et quel bilan en tirez-vous ?
P. D. Dans un contexte de dégradation du marché du tourisme européen, nous avons entrepris un programme de développement de nos activités et de transformation de notre organisation pour accroître à la fois les revenus du groupe et en réduire les coûts. Plusieurs axes ont été définis. Tout d’abord, une mise en commun des organisations opérationnelles Pierre & Vacances Tourisme Europe et Center Parcs Europe pour optimiser le portefeuille de marques et les synergies entre les métiers. Cette réorganisation a profondément modifié l’organigramme des structures juridiques et financières de ces entités. La réorganisation a également consisté à mutualiser les fonctions transversales et les outils de vente. Nous avons ainsi pu réduire nos coûts de 35 millions d’euros. Enfin, cette transformation s’est accompagnée de la mise en place des systèmes et processus communs avec la convergence des systèmes d’information back office et front office.
Décideurs. Vos fonctions s’étendent au-delà de la simple sphère financière. Est-ce le sens de l’évolution du métier de directeur financier ?
P. D. Vous ne pouvez pas être un bon financier en restant dans une tour d’ivoire. Le directeur financier n’a pas seulement un rôle d’accompagnement. Il est partie prenante des décisions courantes et stratégiques et pour ce faire doit être complètement impliqué dans l’opérationnel pour être plus pertinent dans la prise de décision.
Décideurs. Quelles sont ses qualités indispensables ?
P. D. Au-delà des compétences techniques qui sont indispensables, il doit aussi être ouvert d’esprit, orienté sur l’opérationnel et le business. D’excellentes capacités de communication et d’adaptabilité sont nécessaires. Enfin, je citerai le pragmatisme et l’audace.
Propos recueillis par Mathieu Marcinkiewicz