La femme : avenir du numérique ?
Initialement très actives dans le domaine du numérique, les femmes y sont dorénavant de moins en moins nombreuses. De 1972 à 1985, l’informatique était pourtant la deuxième filière comportant le plus de femmes ingénieures au sein des formations techniques. Aujourd’hui, elles ne représentent que 28 % des salariés du secteur contre 48 % dans le reste de l’économie et seulement 11 % des étudiants en écoles d’informatique. La raison ? L’évolution de la perception des métiers du numérique avec l’arrivée des ordinateurs sur le marché ciblant davantage les hommes que les femmes. Selon une étude de l’Union européenne de 2013, accroître la présence des femmes dans le secteur de l’économie numérique de l’Union permettrait d’augmenter de neuf milliards d’euros le PIB annuel. Précisons également qu’en 2012, seuls 17 % des métiers étaient mixtes en France. Le gouvernement a pour objectif qu’un tiers des métiers soient mixtes en 2025. Un défi capital. C’est dans ces circonstances que le gouvernement français a décidé d’intervenir en établissant un plan pour la mixité des métiers du numérique.
Un plan gouvernemental pour la mixité numérique
Le plan sectoriel pour la mixité dans le numérique, signé par le gouvernement et quinze structures actrices du secteur, a plusieurs missions dont notamment celle d’assurer la liberté de choix, en permettant à chacun(e) de choisir un métier en fonction de ses envies et compétences et sans tenir compte des pressions sociales. Par ce plan, le gouvernement compte bien lutter contre les stéréotypes et les manifestations sexistes au travail. Il affirme également sa volonté d’aboutir à l’égalité professionnelle en agissant contre les inégalités salariales entre hommes et femmes.
Les signataires de ce plan pour la mixité des métiers du numérique se sont engagés à mettre en œuvre des actions concrètes pour que les femmes soient de plus en plus nombreuses à travailler dans la filière du numérique. Pour ce faire, des programmes d’initiation au codage, des actions de sensibilisation dans les lycées et d’autres ateliers spécifiques seront mis en place au niveau académique. Les entreprises seront également incitées à embaucher de jeunes femmes mais surtout à féminiser des instances dirigeantes toujours aussi masculines.
Les freins à la mixité
Les stéréotypes véhiculés par la société restent la cause principale du manque de femmes dans les filières technologiques, le numérique étant généralement assimilé à un secteur « masculin ». Notons que 45 % des titulaires d’un bac scientifique sont des filles mais seulement 20 % d’entre elles deviennent ingénieures. La méconnaissance des métiers du numérique, souvent vus comme très techniques, est également un obstacle à l’intégration des femmes dans ce secteur en plein essor. Mais l’importante pression de la société concernant la conciliation vie familiale/vie professionnelle imposée aux femmes ne les encourage pas à s’investir dans un environnement déjà considéré comme sexiste. Marie-Amélie Frere, coprésidente de l’association Girlz in Web, affirme cependant qu’il n’y a « pas plus de sexisme qu’ailleurs ». Pour elle, il faudrait intervenir dès l’école primaire pour « changer les mentalités ».
Le digital au féminin
Beaucoup l’ignorent, mais les femmes ont joué un rôle essentiel dans l’histoire du numérique. Citons notamment Ada Lovelace (1815-1852) qui a créé le premier programme informatique, Hedy Lamarr (1914-2000), considérée comme l’inventrice du GPS, Grace Hopper (1906-1992) qui a conçu le premier langage de programmation, Anita Borg (1949-2003) qui a imaginé un système permettant d’analyser des systèmes mémoriels à haute vitesse et Margaret Hamilton (1936 - ) qui a développé un logiciel pour les missions Apollo de la Nasa ayant permis à l’homme de marcher sur la Lune. Mentionnons également le film Les figures de l’ombre (sortie le 8 mars prochain en France) qui retrace l’histoire de trois scientifiques afro-américaines de la Nasa qui, en pleine période de ségrégation raciale, ont entre autres permis à l’astronaute John Glenn d’effectuer son premier vol dans l’espace. Les femmes ont ainsi également eu un rôle clé dans la conquête spatiale des années 1960.
En juin 2016, plusieurs femmes actrices du numérique ont signé dans Les Échos une tribune intitulée « il est urgent de renforcer la présence des femmes dans la tech ». Elles y appellent le gouvernement à engager des actions décisives pour « permettre aux femmes de contribuer aux développements futurs dans le numérique ». Malgré leur présence plus importante que celle des hommes sur les réseaux sociaux, il est selon elles « urgent de montrer [aux femmes] à quel point leurs idées, leur expertise et leur créativité, leur manière de penser peuvent faire la différence dans cette industrie de produits et de services dont elles s'excluent ». Et les femmes investies dans le milieu du numérique ne comptent pas en rester là.
La 5e journée de la Femme digitale, créée par Delphine Remy-Boutang et Catherine Barba, aura lieu le 9 mars 2017 à la cité de la Mode et du Design à Paris autour de soixante personnalités influentes. On compte notamment parmi elles Viviane de Beaufort, professeure à l’Essec et auteure de Génération #Startuppeuse, Fanny Benedetti, directrice du comité national ONU Femmes France et Delphine Ernotte-Cunci, P-DG de France Télévisions. On y retrouvera également de nombreuses entrepreneures de la FrenchTech et plusieurs associations visant à donner de la visibilité aux femmes du numérique. Entre les conférences, les networking et la découverte d’innovations aura lieu la remise du prix Margaret, en hommage à Margaret Hamilton, qui vise à récompenser une femme intrapreneure et une femme entrepreneure engagées dans le digital. Cet événement devenu incontournable pour les actrices du secteur du numérique tournera autour du thème « For a better world » ( « Pour un monde meilleur » ).
Margaux Savarit-Cornali