Jean-David Chamboredon (France Digitale) : « Le numérique doit être un élément essentiel de la présidentielle »
Décideurs. Quelles sont les premières conclusions de votre réunion du 6 juin dernier ?
Jean-David Chamboredon. Il est encore trop tôt pour tirer des conclusions. Nos observations nous montrent cependant que les entrepreneurs pourraient faire plus en termes de croissance du chiffre d'affaires, de création d'emplois ou d'internationalisation. Le contexte actuel les pousse encore à se limiter pour ne pas prendre trop de risque. Ce constat général est regrettable. C’est pourquoi nous pensons que pour faire évoluer la situation, il est important de mettre l’accent sur notre secteur, à savoir le numérique.
Décideurs. Quels types d’obstacles rencontre encore le digital en France ?
J.-D. C. Ils sont multiples. Il y a d’abord le sujet du financement. Aujourd’hui, il n’y a que trop peu de business angels ou d’investisseurs prêts à s'engager dans le secteur. Il est important de développer cet axe de financement. Concernant l’emploi, notre secteur est en « chômage négatif ». Cela nécessite de mettre en place des formations au numérique pour que ces postes trouvent des candidats. D’autre part, la France n'est pas suffisamment attractive aux yeux des talents internationaux dans ce domaine. C'est un frein pour l’économie hexagonale qui a également besoin que la culture d’entreprise soit développée dès le plus jeune âge afin de faire de ce pays une nation majeure de l'entrepreneuriat digital.
Décideurs. Selon vous, quel est l’intérêt de faire du numérique un sujet de débat public ?
J.-D. C. Si nous voulons retrouver de la croissance, il est nécessaire de prendre des mesures. Alors que le digital ne correspond aujourd’hui qu’à 5 % de notre produit intérieur brut (PIB), sa part est de 10 % au Royaume-Uni. Ce décalage prouve que nous avons du retard mais révèle également un fort potentiel d’amélioration. C’est pourquoi l'élection présidentielle peut servir de tremplin pour accélérer la transformation digitale.
Décideurs. Comment comptez-vous faire ?
J.-D. C. L’idée générale, c’est de faire des propositions originales et consensuelles qui ne soient ni de droite, ni de gauche. Pour faire passer notre message, les médias ont un rôle important à jouer. Mais ce n’est pas encore l’heure de dévoiler notre plan d’action. Ce qui est sûr, c’est que certains hommes politiques ont bien compris que, contrairement à des sujets plus classiques, le numérique peut permettre de séduire des électeurs.
Décideurs. Vous pensez qu’entre les problèmes actuels liés à l’insécurité, aux mouvements sociaux et à la dette publique, vous allez pouvoir faire passer votre message ?
J.-D. C. Je l'espère. La classe politique semble plus à l’écoute qu’il y a quelques années. Nous avons par exemple déjà été approchés par des candidats à la primaire du parti Les Républicains. Ainsi, nous avons pu échanger avec des personnalités telles qu’Alain Juppé, François Fillon, Bruno Lemaire ou encore Nathalie Kosciusko-Morizet. Ils ont tous le souhait d’entendre et de comprendre nos propositions.
Décideurs. Comment se déroulent ces échanges ?
J.-D. C. Nous commençons par leur poser des questions sur leur programme pour mieux connaître leurs ambitions sur le sujet. Puis, nous leur présentons notre vision et discutons des orientations à mettre en œuvre pour faire avancer les choses. Nous leur présenterons notre constat et des propositions pour qu’ils intègrent le numérique comme un élément essentiel de leur campagne. Une vision de l'économie du XXIe siècle...
Décideurs. Sur quelles forces vous appuyez-vous pour les convaincre de prendre en compte vos suggestions ?
J.-D. C. Nos résultats nous rendent crédibles et légitimes. Parmi nos adhérents, nous comptons de belles histoires comme celles de Criteo et Blablacar, qui connaissent aujourd’hui un succès planétaire. Ce type de réussite est à la fois une aubaine pour l’image de la France, mais aussi une réelle opportunité pour son économie. Notre objectif est de faire éclore de nouveaux champions du numérique année après année. Une position qui nous permet d’être entendus par les personnalités du monde politique qui savent désormais que le digital est un secteur qui compte pour le pays.
Propos recueillis par Richard Trainini