Quand les constructeurs automobiles lâchent le volant

Si le prototype de Google a récemment été mis en cause lors d'un accrochage avec un bus, l’avenir de la voiture autonome n’en est pas moins tout tracé. C’est le premier accroc survenu au cours des 2,2 millions de kilomètres déjà parcourus. En attendant que cette nouvelle technologie s’impose dans nos vies, le géant du Net profite de ce type d’expérience pour enrichir l’algorithme de ses futurs modèles. Un empirisme qui pourrait à terme rendre leur utilisation encore plus fiable, en réduisant les accidents de 80 % d’ici vingt-cinq ans.Selon Marc Daneau, directeur des projets de l’innovation véhicule pour l’alliance Renault-Nissan, « le véhicule autonome est une tendance incontournable du futur de l'automobile.» Alors que la commission économique pour l’Europe des Nations unies (Unece) vient d’autoriser les systèmes de conduite automatisée sur les routes sous certaines conditions (conformité avec les règlements des Nations unies et possibilité de repasser en mode manuel), les constructeurs automobiles ont tous compris le potentiel de ce marché. Pour s’y assurer une place de choix, chacun a sa stratégie, dont trois émergent.

1- Miser sur les acquisitions

General Motors se distingue en rachetant Cruise Automation, une start-up américaine de quarante salariés, spécialisée dans les logiciels d’automatisation automobile. Si le montant de l’acquisition n’a pas été rendu public, le site internet Recode l’estime à 985 millions d’euros. Avant ça, la firme était également rentrée au capital de Lyft (9 %), le concurrent d’Uber, grâce à un investissement de 500 millions de dollars. Un placement ayant pour but de développer des voitures sans conducteurs. De quoi se positionner en tant que concurrent de taille face à Google et Tesla, qui, selon Elon Musk, pourra vendre son premier modèle autonome dès 2018 grâce à son système « autopilote ».

2- Coproduire

De son côté, Ford lance aussi l’offensive. Mark Fields, le P-DG, déclare que son modèle autonome pourra être commercialisé dans les quatre prochaines années. Ken Washington, le vice-président du département R&D, affirme avoir déjà collaboré avec plus de 2 000 start-up pour continuer à développer le projet. Il confie aux Échos que « des Ford Fusion hybrides sans pilotes seront testées en Californie début 2016. » Autre collaboration en vue, celle avec Google, qui permettrait d’allier le savoir-faire technologique de l’un avec l’expertise automobile de l’autre. Mais la stratégie de Ford n’est pas un cas isolé. Peugeot et IBM, par exemple, coopèrent afin de développer les nouvelles fonctionnalités automobiles de demain.

3- Développer en interne

D’autres font le pari de miser sur leurs propres ressources. C’est le cas de Toyota qui refuse toute collaboration avec Google et Apple. Le plus grand constructeur mondial vient de recruter une équipe de seize experts en logiciels de mobilité. Ils doivent rejoindre la division Toyota Research Institute (TRI), afin de piloter le projet des modèles autonomes. Concernant Renault-Nissan, Marc Daneau affirme avoir « une équipe Alliance dédiée au projet. Les ingénieurs de Renault et de Nissan travaillent ensemble et mettent les technologies développées à disposition des équipes produits de chacune de nos marques »,  sans pour autant vouloir préciser les montants investis. Il n’en est pas moins optimiste : « L’Alliance va lancer un véhicule équipé d’une fonction de conduite autonome monovoie cette année : sur autoroute, la voiture adapte sa vitesse et maintient sa position dans la file automatiquement. En 2018, elle pourra changer de voie et en 2020, elle sera capable de gérer les intersections dans un contexte urbain. C'est à partir de 2020 que nous pourrons offrir un véhicule entièrement autonome, permettant au conducteur d’optimiser son temps passé en voiture en se divertissant, en travaillant… » Selon lui, dix modèles autonomes seront lancés d’ici quatre ans.

R. T.

Article mis à jour le 25/03/2016