De New York à Paris, de la terre à la mer, un seul point d’ancrage : l’humain. Le parcours de Christine Duboÿs, directrice du bureau français d’abrdn Investment, est une leçon de vie pour toute personne craignant de ne pas être à la hauteur. Portrait.
Christine Duboÿs, symbole de la force tranquille
Au cœur de la foule et du brouhaha, des salles de marchés à l’ambiance électrique aux services commerciaux où l’ego est roi, difficile de se faire sa place lorsque tout s’oppose à une nature calme et réservée. Et pourtant, c’est un défi que Christine Duboÿs a su relever haut la main, passant d’un poste à un autre en restant elle-même et surtout, à l’écoute des autres.
Une question de passion
Des bancs de l’école, Christine Duboÿs ne retient qu’une chose : l’économie la fascine. Bien que la finance soit de prime abord assez éloignée de son environnement familial, elle choisit de poursuivre dans cette voie. Un chemin qui l’amena à découvrir le monde des marchés financiers, dont elle tomba amoureuse. Mais c’est au fil de ses stages dans des banques d’affaires qu’elle découvre un nouvel aspect du métier souvent mis de côté, et qui pourtant déterminera le reste de sa carrière : le contact humain. Elle décide alors de troquer les doubles écrans d’ordinateur et les graphiques contre des présentations et intègre, en juillet 2001, l’équipe commerciale de Credit Suisse Asset Management.
Un événement choc
Après un an à New-York en salle des marchés à la Société Générale, Christine Duboÿs décide en septembre 2001 de retourner dans la Grosse Pomme pour renouer avec la vie new-yorkaise qu’elle avait tant aimée. Elle rêvait de s’y installer, mais la réalité fut brusquement bouleversée. Le 11 septembre, l’attentat commandité par Al-Qaïda frappe le World Trade Center, faisant des milliers de morts et transformant la skyline de la ville à jamais. "Ce qui m’a réveillée, c’est le silence inhabituel de Manhattan." Bloquée sur place, à une époque où les smartphones et les réseaux sociaux n’existaient pas encore, Christine Duboÿs ne réalise pas tout de suite l’ampleur et la tournure que prennent les événements. À son retour en France, les salles de marchés, normalement bouillonnantes, restaient calmes, plus rien ne s’y passait. Une phrase la marque alors, au milieu du silence de l’open-space de Credit Suisse AM : "ça y est, tout est foutu, rentrez chez vous, achetez de l’huile et du sucre !" Une phrase et une période qui marquèrent la jeune commerciale durant des années, l’encourageant à vivre les crises de 2008 et 2020 avec plus de recul et de philosophie.
Réussir ensemble
Addition de connaissances, d’expériences et de rencontres, la vie de Christine Duboÿs est un jeu d’équilibre constant. Chacune de ses routines a été bousculée par l’ouverture d’une nouvelle perspective. D’abord lorsqu’elle gravit les échelons de l’équipe commerciale, puis lors du rachat de Credit Suisse Asset Management par abrdn, qui suscite de nouveaux process et une nouvelle organisation, jusqu’en 2015 où le poste de directrice commerciale lui a été proposé. De nouvelles responsabilités et de nouvelles régions à superviser l’amenèrent quelques années plus tard à la tête du bureau français de la société de gestion, en 2024. Un parcours enrichissant qui repose avant tout sur une personnalité inspirante et profondément passionnée par l’humain. 'Il n’y a pas de business performant sans individus engagés et motivés.' Enfant, elle souhaitait être psychologue afin d’aider les personnes à aller mieux. Désormais, cette femme d’affaires tient particulièrement à l’épanouissement individuel de chacun au sein de son équipe. Une qualité inhérente au métier de commercial ? Peut-être. Mais c’est cette volonté de toujours apprendre, à gagner ensemble, et ce dans le respect, en mettant le plaisir au cœur du métier, qui fait avant tout de Christine Duboÿs la femme brillante qu’elle est aujourd’hui.
"La chose la plus importante dans la vie est de pouvoir se regarder dans le miroir le soir en rentrant chez soi." Nombreuses sont les personnes inspirantes rencontrées au fil des années, et pourtant, Christine Duboÿs retient cette phrase de son premier patron, Gildas Orio. Plus qu’un conseil, une ligne de conduite à laquelle elle essaye de ne pas faire défaut en 23 ans. Malgré tout, elle confie que son plus grand regret est de ne pas avoir toujours su oser. Peur d’être trop jeune, pas assez légitime, trop peu expérimentée… Les barrières qu’elle pensait insurmontables sont pourtant toutes tombées au gré de cette alternance de rythmes qu’elle affectionne tant, oscillant entre zone de confort et changement de repères, mais également à chaque nouveau client conquis. Si à son tour, elle ne devait donner qu’un conseil, ce serait d’apprendre à se connaître et de ne pas idéaliser de profils types. Car rien n’est universel et chaque personne a sa place.
Une goutte d’eau au milieu de l’océan
Parmi les thématiques qui comptent, la finance à impact fait partie des grandes préoccupations de cette mère de trois enfants – mais elle déplore que l’intérêt des investisseurs pour le sujet ait diminué ces dernières années. Elle n’hésite pas dans ses loisirs pas à s’octroyer de temps à autre quelques jours en famille pour prendre le large. "L’endroit le plus agréable au monde est sur un voilier." C’est au milieu de nulle part, en pleine mer, sous un ciel étoilé, que Christine Duboÿs se sent le mieux. Entourée de nature, en pleine conscience : pour elle, rien n’égale ce sentiment de puissance mêlé à la grande vulnérabilité humaine.
Marine Fleury