En 2021, selon Eurostat, la France était le pays européen dénombrant le plus d’accidents du travail. Un triste record dont les jeunes et les seniors sont les premières victimes, parfois mortelles. Bilan d’une situation qui relève d’un enjeu capital de santé au travail.

La France a encore du pain sur la planche. Ses travailleurs et travailleuses ne seraient pas si bien traités qu’il serait permis de le penser : les accidents de travail pleuvent à flots. Selon Eurostat, en 2021, la France se retrouvait en première place des pays européens totalisant le plus d’accidents du travail non fatals et quatrième au classement des pays avec le plus d’accidents professionnels mortels.

1,8 décès pour 100 000 employés en Europe, contre 3,3 en France

Mauvaise élève du continent, la France a effectivement comptabilisé 674 morts au travail en 2021, soit deux par jour. La moyenne européenne s’élève à 1,8 décès pour 100 000 employés en Europe, et monte en France à 3,3. Aujourd’hui, les secteurs les plus touchés par ce phénomène sont l’agriculture, la construction, les transports ou encore la logistique. En 2021, les deux tiers environ (65,5 %) des accidents mortels faisaient des victimes parmi les travailleurs exerçant dans ces professions physiques. Les premières victimes de ces accidents : les seniors et les jeunes.

Des seniors davantage qualifiés mais plus vulnérables

Encore ancrées dans les mémoires, les manifestations contre la réforme des retraites ont soulevé une question capitale : l’espérance de vie tendant à s’allonger, est-il réellement possible de continuer à travailler jusqu’à 64 ans ?

Que ce soit en France ou dans le monde, le vieillissement de la population s’accélère depuis ces dernières années, à tel point que les Nations unies prévoient d’ici à 2050 un doublement de la population des 65 ans et plus : de 700 millions aujourd’hui, elle passerait à 1,5 milliard. Dans l’Hexagone, selon l’Institut national d’études démographiques (Ined), on compte trois aînés supplémentaires toutes les cinq minutes.

À lire :L’emploi des seniors : une bombe sociale ?

En 2022, selon une étude de la Dares, le taux d’emploi des 55-64 ans atteignait les 57 %. Un chiffre en dessous de la moyenne européenne qui place la France en treizième place du classement européen. Les entreprises ont pour responsabilité de prendre soin de leurs aînés et ont tout intérêt à se soucier de leur intégration et de leur bien-être physique et mental au sein des organisations. En effet, leur qualification et leur expérience sont un apport essentiel pour la performance des entreprises, mais leurs cadres de travail doivent être adaptés à leur condition physique (posture du dos, troubles musculosquelettiques, risques psychosociaux accrus).

Les aînés en première ligne

Les seniors sont moins sujets aux accidents du travail : selon une étude de la Mutualité française publiée en 2023, 25 % des accidents de travail touchaient les salariés de plus de 50 ans, alors qu’ils représentaient 29 % des salariés. S’ils sont moins fréquents chez les personnes âgées, ils sont en revanche plus graves, et même mortels dans certains cas : 58 % d’entre eux concernent les seniors, contre 11 % et 8 % chez les moins de 30 ans.

Par ailleurs, la durée des arrêts maladie dont bénéficient les employés les plus âgés augmente : la Mutualité rappelle dans son étude que si la durée moyenne d’un arrêt en France est de 35 journées pour l’ensemble des salariés, elle passe pour les plus de 60 ans à 75 jours. Ils sont particulièrement longs pour les personnes âgées de 50 à 59 ans : leur durée est en moyenne de 89,9 jours par accident, contre 79 jours pour les 40/49 ans et 44,2 jours chez les plus jeunes (de 20 à 29 ans). Moins aptes à se remettre d’un accident et fragilisés par les contrecoups physiques d’une longue carrière, les seniors sont naturellement plus touchés par des affections de longue durée.

Les moins de 25 ans formés aux sujets de santé et de sécurité en milieu professionnel pendant leurs années d’études connaîtraient deux fois moins d’accidents de travail que les non formés

La jeunesse mise en danger par le manque de formations

Les nouveaux travailleurs sont eux aussi plus souvent victimes d’accidents. En 2018, une étude de l’INRS révélait que la fréquence annuelle d’accidents du travail était de 10 % chez les jeunes Français de moins de 25 ans, tous secteurs confondus – soit 2,5 fois plus importante que pour le reste de la population active.

En cause, en plus du manque d’expérience : un défaut de formation en école au sujet des risques spécifiques liés au métier appris. L’approche santé et sécurité y étant abordée sous un angle global, les jeunes actifs n’ont pas acquis les réflexes à même de les protéger. L’étude met ainsi en évidence l’importance capitale de la formation en tant qu’outil de prévention : les moins de 25 ans formés aux sujets de santé et de sécurité au travail pendant leurs années d’études connaîtraient deux fois moins d’accidents que les non formés. C’est ce que souligne Stéphane Boini, responsable d’études épidémiologiques à l’INRS : "Sachant que 30 % des emplois occupés par les participants ne correspondent pas à leur formation initiale, et que les parcours professionnels actuels ne sont plus aussi prévisibles que par le passé, inscrire cette formation globale en santé et sécurité au travail dans l’ensemble des diplômes paraît incontournable."

Comme pour les seniors, les secteurs à risque pour les jeunes travailleurs sont l’agriculture, la construction et les transports. Les situations accidentogènes sont nombreuses dans ces branches : chutes depuis des points surélevés, accidents de la route ou incidents dus à l’utilisation de machines. Pour 15% des salariés fraichement recrutés, les accidents graves surviennent dans les trois premiers mois de l’embauche."La culture de la prévention des risques professionnels ne s’improvise pas et la formation joue un grand rôle dans sa construction. Il est essentiel de sensibiliser très tôt les jeunes à la prévention et à la santé et sécurité au travail", explique Gérard Moutche, responsable du département Formation de l’INRS, dans le rapport de 2023 sur la santé et la sécurité au travail.

Dès lors, encadrement et prévention permettraient de créer un rempart capable de protéger ces travailleurs encore novices.

Lisa Combe

Crédit image : Macrovector sur Freepik

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