Décideurs. Quelle est votre définition du leadership ?

Frédéric Poux. Je conçois le leadership d’une manière tout à fait personnelle. Ce n’est pas quelque chose de réfléchi. Je n’ai jamais cherché à identifier les recettes qui feraient de moi un leader. Au contraire, c’est un cheminement qui s’est naturellement inscrit dans mon développement professionnel. Le leadership ne se décrète pas, il s’impose dans les yeux des autres. En d’autres termes, ce sont mes collaborateurs et les actionnaires du groupe qui, par leur confiance, me confèrent des qualités de leader.

 

Décideurs. Certaines étapes de votre parcours illustrent-elles cette évolution vers un statut de leader ?

F. P. Je suis un pur produit de la maison Afflelou. J’y ai fait mes premiers pas en tant que stagiaire ! Ces années passées au sein du groupe m’ont évidemment permis de mesurer ma capacité à susciter une certaine adhésion. D’abord auprès de mes équipes, puis des fournisseurs. Le temps passe et vous vous apercevez alors que votre nom circule au-delà des frontières de l’entreprise, pour finalement accéder à la direction opérationnelle du groupe. Je vous épargnerai toute modestie de circonstance : ces instants sont aussi flatteurs que rassurants.

 

Décideurs. Sur quelles valeurs votre leadership s’appuie-t-il ?

F. P. Sans l’ombre d’un doute, la culture du résultat. C’est une condition que j’estime essentielle à l’émergence de tout leadership. C’est l’un de mes traits de caractère : je suis pragmatique. Mes décisions s’appuient sur la réalité. Ce principe, vous le retrouvez jusque dans la gouvernance actuelle du groupe. La société traverse actuellement sa quatrième opération de LBO. Un contexte qui implique une tension permanente et des objectifs particulièrement ambitieux. Dans ces conditions, il faut être en  mesure de conjuguer la culture d’entreprise initiée par le fondateur Alain Afflelou et le style d’une nouvelle génération de managers. En l’occurrence, ce sont vingt-deux professionnels qui m’aident à piloter aujourd’hui le groupe.

 

Décideurs. Le leadership est régulièrement présenté comme un instrument favorisant l’essor des équipes…

F. P. Je m’inscris effectivement dans cette ligne de pensée. Le leadership n’est pas autosuffisant. Bien qu’incarné par une personne, sa mise en oeuvre repose sur l’action d’un groupe. Cela passe par votre capacité à faire de vos collaborateurs les promoteurs de votre propre leadership. Les écouter, les laisser exprimer leurs idées, les laisser apprendre et commettre des erreurs. Autant d’actes de management qui favorisent non seulement l’éclosion de leaders mais assurent également la diffusion des valeurs cardinales de l’entreprise.

 

Décideurs. Entre inné et acquis, quelle est votre religion concernant le leadership ?

F. P. Inné, indiscutablement. Certes, des événements favorisent l’émergence des qualités qui font un leader. Il est ainsi éminemment difficile de gagner ses galons de leader sans une solide expérience managériale, elle-même légitimée par vos performances et votre exemplarité.

 

Décideurs. Parmi les directions opérationnelles lesquelles favorisent le développement du leadership

?

F. P. Tout dépend de l’actionnariat de la société. Dans un groupe sous LBO comme le nôtre, un profil financier constitue un atout majeur. J’ai moi-même reçu une formation d’expert-comptable… Pas sûr cependant qu’un groupe familial plébiscite le même type de professionnels.

 

Décideurs. Pourriez-vous citer trois personnalités qui incarnent selon vous le leadership ?

F. P. Un premier nom me vient naturellement : celui d’Alain Afflelou. En quarante années d’exercice il a réussi à imposer le groupe au sommet de son marché et n’a cessé de réinventer l’offre commerciale. Son leadership dépasse d’ailleurs les frontières et irradie le secteur de l’optique à l’échelle continentale. Dans un autre domaine, mais pour des qualités que j’estime assez proches, je citerai Xavier Niel. Infatigable entrepreneur, il est parvenu au sommet, en dépit de toutes les résistances. Difficile en revanche d’identifier une troisième personnalité. Cette course à la normalité, qui vire désormais à la crise de conscience, constitue un frein colossal à l’émergence de nouveaux leaders.

 

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