Le vice-président M&A de Safran revient sur la stratégie d'acquisition du groupe et la gestion de la confidentialité. 
Décideurs. En quelques mots, comment résumeriez-vous la stratégie d'acquisition de Safran ?
Pascal Picavet. Safran privilégie aujourd'hui des cibles avec un fort potentiel stratégique. Nous avons ainsi identifié une cinquantaine de domaines dans lesquels le groupe peut, en fonction des opportunités, réaliser des acquisitions. Il s'agit de favoriser la proactivité du groupe en amont du démarrage d’une potentielle transaction. En effet, le nombre d'acteurs sur notre marché étant fortement limité, une véritable course à la montre s'enclenche dès qu'une occasion se présente sur certains actifs rares.

Décideurs. Quelle est votre politique pour articuler croissance et risk management ?
P. P. Les dossiers de croissance externe peuvent être proposés par les sociétés du groupe ou par le siège, mais dans les deux cas, sauf rares exceptions où le dossier est porté directement par le siège, le management de la société du groupe concernée devra se porter garant de l’intérêt industriel et stratégique de l’opération, des synergies anticipées, de l’intégration de la cible ainsi que du plan d’affaires sous-jacent. L’exécution de l’opération de M&A est, en revanche, conduite par l’équipe M&A du siège selon une procédure qui décrit chacune des étapes du processus d’exécution. Chaque étape consiste en un jalon à franchir qui nécessite une approbation du comité d’investissement du groupe auquel participent les principaux dirigeants de Safran. À noter que les opérations importantes exigent une validation par le comité stratégique et le conseil d’administration [de Safran]. Le premier jalon correspond à une validation de l’intérêt stratégique de l’opération afin de commencer à étudier un dossier. A ce staden, le sponsor de l’opération doit expliquer en quoi l’opération proposée contribue à la stratégie de développement de sa société. Le second jalon correspond à l’autorisation d’émettre une offre indicative non engageante, sur la base d’une première évaluation du plan d’affaires de la cible, des synergies anticipées et d’une première réflexion sur l’intégration de la cible au sein de la société sponsor. L’émission de cette offre permet généralement d’entrer dans une phase de due diligence qui va permettre d’analyser les risques potentiels liés à l’acquisition. Cette phase est structurée autour de plusieurs dimensions (aspects juridiques, financiers, fiscaux, commerciaux, industriels, environnementaux, RH, IT…), avec une équipe affectée à chacune d'entre elles, pilotée par un responsable clairement identifié. Chaque équipe identifie les risques relatifs à son domaine et évalue leur gravité (deal breaker, impact financier ou juridique...). En fin de due diligence, chaque responsable d’équipe doit s’assurer que chacun des risques identifiés a en contrepartie une solution de mitigation du risque qui peut prendre diverses formes : une prise en compte dans le plan d’affaires et/ou dans la valorisation, une clause spécifique dans le contrat d’acquisition, une action à mettre en place par l’équipe d’intégration ou encore des demandes d’information supplémentaires. Un tableau listant tous les risques et les solutions de mitigation identifiées est mis à jour tout au long du processus et sert de trace auditable des travaux de due diligence. Le troisième jalon permet ensuite d’autoriser l’émission d’une offre ferme et d’un mandat de négociation. Le quatrième jalon permet de valider les termes de la négociation vis-à-vis du mandat de négociation et d’autoriser la signature d’un contrat engageant. D’autres jalons existent pour marquer le closing de l’opération et la mise en œuvre du processus de suivi des intégrations.

Décideurs. Comment gérez-vous la question de la confidentialité ?
P. P. En préalable, il convient de s'assurer d'une parfaite fluidité de l'information entre toutes les parties prenantes au dossier. Pour la gestion de la confidentialité en elle-même, nous veillons à rappeler régulièrement les obligations en la matière, ainsi que son intérêt. Des accords de confidentialité sont également signés. Malgré toutes les précautions qui sont prises, la fuite n'est pas impossible. Nous travaillons donc avec notre département communication, en amont, au cas où la confidentialité serait brisée. Des projets de communiqués de presse, par exemple, sont rédigés pour pouvoir réagir le plus rapidement possible.

Propos recueillis par Mathieu Marcinkiewicz

Safran en chiffres 
CA 2013 : 14,7 MD€
Nombre de collaborateurs à fin 2013 : 66 300
Dernière acquisition : activités de distribution électrique et de solutions cockpit d’Eaton en mai 2014

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