En partenariat avec Dirigeants & Partenaires, Décideurs a organisé une table ronde destinée à décrypter la place occupée par la RSE dans les entreprises.

Avec la participation de : Françoise Raffin, directrice des ressources humaines, Air Liquide ; Patrick Plein, directeur des ressources humaines, Vinci Energies International & Systems ; Olga Damiron, chief people & talent officer & EVP CSR, Technicolor Group ; Marion Azuelos, global head of human ressources & executive committee member, BNP Paribas Asset Management ; Catherine Benet et Valérie Desclerc, associées, Dirigeants & Partenaires

Décideurs. Quel état des lieux pouvez-vous faire quant à la mise en place de la RSE dans vos entreprises ?

Françoise Raffin. Chez Air Liquide, la question de la responsabilité environnementale est majeure, elle est donc séparée de la RSE même si nous travaillons de concert.

Patrick Plein. Chez Vinci, nous avons toujours eu la dimension "entreprise citoyenne", c’est-à-dire une entreprise qui va au-delà de la simple logique business, et qui œuvre pour la dynamique de son territoire. Dans de nombreux domaines, les questions de responsabilité sociétale des entreprises sont rattachées à la DRH. On constate en effet que les deux tiers des sujets de RSE sont des sujets RH. Le "s" de social est à interpréter largement et concerne également les aspects sociétaux.

Olga Damiron. Pour Technicolor c’est le grand écart car nous avons une activité très industrielle mais nous sommes poussés par nos clients et investisseurs. Nos clients sont Netflix, Amazon et les grands prestataires de films et ils ne peuvent pas envisager de travailler avec une entreprise qui ne mise pas sur la RSE. Nous avons constaté qu’ils sont souvent prêts à accepter un prix supérieur si nous nous engageons sur la diversité et l’inclusion.

"La question de la responsabilité environnementale est majeure", Françoise Raffin, Air Liquide

Marion Azuelos. Ce qui est essentiel chez BNP Paribas Asset Management, c’est l’investissement socialement responsable. Tous nos fonds intègrent les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance. Nous avons également créé un Sustainability Center. Il y a quelques mois, nous avons souhaité mettre en adéquation notre "strapline" avec nos engagements et nous nous présentons désormais comme le "Sustainable investors for a changing world". Faisant partie des asset managers leader en investissement durable, nous souhaitons pousser l’ensemble de nos collaborateurs à se sentir responsables. Pour ce faire, des formations en ligne leurs sont accessibles, des certifications ESP (plus de 80 collaborateurs en ont déjà bénéficié) et nous réalisons régulièrement des enquêtes pour mesurer leurs préoccupations du moment sur le sujet. D’un point de vue RH, nous insistons également sur les sujets d’inclusion et de diversité. C’est une préoccupation majeure, surtout pour une entreprise comme la nôtre qui opère sur tous les continents. En tant qu’employeur, BNP Paribas AM met l’accent sur la responsabilité sociétale de l’entreprise et son rôle dans la construction d’une culture du développement durable auprès de ses équipes. Le sujet RSE doit être géré par quelqu’un qui peut travailler avec tout le monde : il faut avoir un rayonnement interne et externe avec une prise en compte de l’inclusion et de la diversité. Nous nous efforçons également de minimiser l’écart entre ce que nous demandons aux entreprises dans lesquelles nous investissons et ce que nous faisons en interne. Nous voulons être exemplaires et que ce sujet devienne la préoccupation pour tous nos collaborateurs !

Quels sont les risques associés à la mise en place d’une politique RSE ?

Patrick Plein. Le risque est devenu important sur le plan de l’image et de la réputation de l’entreprise, il faut donc être très vigilant quant au fait de diffuser une communication authentique.

Marion Azuelos. Pour parvenir à l’excellence, il est essentiel de joindre la parole aux actes. En tant qu’asset manager durable, nos pratiques RH en matière de RSE doivent au moins égaler les standards que nous attendons des entités dans lesquelles nous investissons.

"Deux tiers des sujets de RSE sont des sujets RH", Patrick Plein, Vinci Energies International & Systems

Catherine Benet. Chez Dirigeants & Partenaires nous sommes dans une approche individuelle avec les dirigeants accompagnés. Sur l’enjeu RSE, notre rôle est de les éveiller et de les questionner. Mais on constate une vision très contrastée de leur propre conscience personnelle, en fonction de leurs parcours. Cela témoigne des difficultés des entreprises à faire "percoler" ces sujets auprès des salariés.

Valérie Desclerc. La RSE n’est plus une option aujourd’hui. La capacité d’un dirigeant à en comprendre les enjeux et à embarquer les équipes sur ces sujets est un marqueur de leadership. Pour s’assurer qu’un candidat en transition professionnelle dispose du bagage nécessaire pour répondre à cette exigence, il faut vérifier les soft skills comme l’animation de la coopération, la curiosité et la créativité.

Quelles sont les actions concrètes que vous avez mises en place ?

Olga Damiron. "Percoler" auprès des salariés est l’action qui a le plus fonctionné. Le rôle de la DRH consiste alors à coordonner et animer pour s’assurer que l’ensemble de l’organisation se saisisse de la question. Technicolor a créé une académie diplômante pour développer, accroître et actualiser les compétences, et nous avons entre 750 et 1 000 personnes certifiées. Sur le volet diversité et inclusion, nous avons lancé des "focus groupes" : LGBTQ+, labellisée, ethnicité, race et handicap.

Françoise Raffin. Au niveau global nous avons mis en place un index HR avec un pourcentage de femmes, de jeunes, qui sensibilise la communauté RH. Par ailleurs, Air Liquide a créé sa fondation sur l’aspect responsabilité sociale. L’objectif de la fondation est, entre autres, la santé et le business inclusif. Plus récemment, dans le cadre de la politique qu’on appelait Acte, nous avons laissé à tous les salariés la possibilité d’actions personnelles : la possibilité de s’investir. Et tous ces dispositifs ont été induits par la DRH, exceptée la Fondation.

"La RSE n’est plus une option aujourd’hui", Valérie Desclerc, Dirigeants & Partenaires

Marion Azuelos. Nous intégrons le développement durable dans nos activités opérationnelles et citoyennes avec pour priorité l’égalité hommes-femmes au sein de nos effectifs, la réduction de nos déchets et de nos émissions de CO2 ainsi que l’inclusion des jeunes. Pour généraliser nos pratiques RSE à travers l’ensemble de nos équipes, nous avons créé un réseau de 150 collaborateurs, les "ESG Champions", qui relaient les initiatives mises en place et participent au partage collectif de nos valeurs. Par ailleurs, des objectifs et des KPIs ont été fixés pour les membres du comité exécutif, notamment sur les sujets de diversité et d’inclusion : ils ont chacun des objectifs chiffrés pour faire grandir la population de femmes dans nos équipes. Enfin, nous avons adapté notre politique de rémunération en y ajoutant une annexe dédiée ESG qui a été validée par notre comité de rémunération.

Patrick Plein. Vinci Energies International & Systems intervient dans 40 pays différents et l’idée est de savoir comment fédérer des entreprises et des collaborateurs qui ont des cultures et des réalités très différentes. Nous avons positionné la RSE comme l’un des éléments politiques de nos axes de développement. Aujourd’hui, ce sujet est devenu une figure imposée : les grands groupes sont de plus en plus regardés, scrutés et observés. Et le moindre écart est mis en lumière. De plus, ce sujet devient une question d’attractivité : la question de notre politique environnementale est par exemple régulièrement posée par les candidats en entretien de recrutement.

"La question de la quête de sens est lancinante", Catherine Benet, Dirigeants & Partenaires

Quel est le rôle du DRH dans la mise en place de cette politique ? Est-ce le même en temps de crise ?

Patrick Plein. L’année dernière, malgré la pandémie, nous avons mis en place plus d’une centaine d’initiatives : "Sharing and acting together". Le rôle des ressources humaines est d’avoir un coup d’avance sur ce qui va arriver, de sensibiliser, de faire en sorte que cela se mette en route, que ce soit intégré, acquis dans les comportements de tous pour que cela devienne quelque chose de naturel. Le rôle de la DRH doit transmettre une la vision, mais dans la façon de faire c’est aux fonctions terrain que cela revient.

Marion Azuelos. Le rôle de la RH est vraiment de former, de sensibiliser, de s’assurer que des initiatives seront définies et respectées. Mais c’est surtout un travail qui doit être la préoccupation de tous. En ce sens, une communication régulière sur ces thématiques est primordiale pour que chacun se sente impliqué et responsable. Avec la pandémie, nous avons poursuivi et intensifié différentes actions en lien avec notre politique RSE : nous avons notamment organisé des ateliers et des webinaires sur les questions de diversité et d’inclusion, et nous avons lancé Pride@AM, un réseau de collaborateurs pour soutenir la communauté LGBT+, et nous avons davantage suivi les indicateurs, notamment d’empreinte carbone avec une révision par exemple de la politique de voyage pour l’avenir.

Comment sera le DRH de demain ? Quel sens donnera-t-il à sa fonction ?

Catherine Benet. La question de la quête de sens est lancinante. Les cadres dirigeants en transition s’interrogent : revenir dans une grande entreprise ou rejoindre une ETI ? Tout l’enjeu est de savoir comment ils incarneront demain leur poste et trouveront les repères pour répondre à ces nouveaux besoins.

Marion Azuelos. L’élément qui a été déterminant dans mon poste a été de réussir à faire partager ces objectifs de RSE avec les managers et membres du comex, notamment en matière de diversité et inclusion. À partir du moment où les objectifs sont partagés, tout le monde est garant et c’est un réel progrès. Avec nos nouveaux modes de travail dans lesquels le digital et le distanciel font partie intégrante de notre quotidien, l’un des principaux enjeux du DRH de demain sera de maintenir une culture d’entreprise, un esprit collectif, autour de nos valeurs RSE.

Françoise Raffin. Il faudra faire attention aux petites entreprises. Dans les grands groupes, le board pousse les actions, mais dans les petites structures cela n’est pas encore ni courant, ni fréquent.

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