Obligation née de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, la première vague des entretiens professionnels biennaux et des entretiens récapitulatifs (à six ans) aurait dû s’achever précisément le 7 mars 2020 (la loi du 5 mars 2014 étant entrée en vigueur le 7 mars 2014). Crise sanitaire oblige, le législateur a reporté à plusieurs reprises cette échéance, mais cette fois-ci les entreprises ne bénéficieront pas d’un autre report.

Les premiers entretiens professionnels biennaux auraient normalement dû être réalisés en mars 2016 et mars 2018, et les premiers entretiens récapitulatifs à six ans avant le 7 mars 2020 pour l’ensemble des salariés présents dans les effectifs des entreprises depuis la date d’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2014. La crise sanitaire ainsi que le premier confinement de mars 2020 ont cependant bousculé ce calendrier légal.Le législateur a décalé au 31 décembre 2020 la date limite de réalisation des entretiens récapitulatifs, avant de la décaler à nouveau à la date du 30 juin 2021.Bien que le ministère du Travail ait refusé de modifier à nouveau cette échéance, un énième report a finalement été introduit par le biais d’un amendement sénatorial lors de l’adoption de la loi relative à la gestion de la sortie de la crise sanitaire : la sanction relative à l’abondement correctif du CPF ne sera effective qu’à compter du 1er octobre 2021.

Vérification des critères : un droit d’option applicable jusqu’au 30 septembre 2021

L’employeur dispose de deux options pour vérifier le respect des critères à l’occasion de l’entretien professionnel récapitulatif :

- application des dispositions issues de la loi du 5 mars 2014 et vérification que le salarié a bénéficié des entretiens tous les deux ans et d’au moins deux des trois mesures suivantes : formation, acquisition d’éléments de certification et progression salariale ou professionnelle ;

- application des dispositions issues de la loi du 5 septembre 2018 et vérification que le salarié a bénéficié des entretiens tous les deux ans et d’au moins une formation « non obligatoire ».

Cette option concerne tous les entretiens récapitulatifs réalisés avant le 30 septembre 2021. Ce droit d’option s’applique de manière individuelle, l’employeur pouvant appliquer l’option salarié par salarié. À noter que la dernière version du ques-tions-réponses relatif à l’entretien professionnel (21 juin 2021) indique que le cofinancement d’une action de formation suivie dans le cadre du CPF peut satisfaire à l’obligation d’avoir fait bénéficier à son salarié d’au moins une formation non obligatoire.

Un report de l’application de la sanction au 1er octobre 2021

En cas de non-respect de ses obligations, l’employeur de plus de 50 salariés doit verser un abondement correctif de 3 000 euros sur le compte personnel de formation du collaborateur. L’application de cette sanction est toutefois neutralisée jusqu’au 30 septembre 2021. À partir du 1er octobre 2021, c’est donc la date de l’entretien récapitulatif, le cas échéant reporté jusqu’au 30 septembre, qui sera prise en compte pour apprécier l’application de l’application de la sanction ou non.

En pratique, le report de l’application de la sanction au 1er octobre 2021 donne aux employeurs qui n’ont pas réalisé les entretiens avant le 30 juin 2021 un délai supplémentaire jusqu’au 30 septembre 2021 pour réaliser les entretiens sans encourir de sanction

Options envisageables pour échapper à l’abondement correctif

La première alternative consiste à retenir la même position que celle récemment adoptée par la cour d’appel de Paris en considérant que si l’employeur ne démontre pas avoir organisé les entretiens professionnels, il échappe néanmoins à l’abondement correctif dès lors le salarié a bénéficié des autres mesures (notamment une action de formation et une progression salariale). Selon cette approche, l’abondement est dû, si et seulement si, le salarié n’a bénéficié ni des entretiens ni des mesures prévues (interprétation restrictive retenue en l’espèce par la cour d’appel). Même en l’absence d’entretiens professionnels, le simple fait de respecter les autres mesures permettrait d’échapper à la sanction.

Cette position de la cour d’appel apparaît antinomique avec l’esprit de la réforme, car tant les partenaires sociaux (lors de la négociation de l’ANI ayant précédé la loi du 5 mars 2014) que le législateur entendaient imposer des critères cumulatifs à l’employeur, cette nouvelle obligation légale constituant l’une des contreparties à la suppression de l’imputabilité fiscale de leurs dépenses de formation. L’ administration a d’ailleurs eu l’occasion de préciser dans son questions-réponses que "le CPF du salarié est abondé lorsque qu’il est constaté au cours de l’état de lieux du parcours professionnel que ce dernier n’a pas bénéficié des entretiens professionnels prévus et d’au moins une formation autre qu’une formation "obligatoire". Les conditions à remplir sont donc cumulatives".

La prudence doit donc être de mise s’agissant de la portée de la solution retenue par la cour d’appel de Paris, d’autant plus que sa décision a fait l’objet d’un pourvoi en cassation qui pourrait aboutir finalement à une autre solution. La seconde alternative consiste à négocier un accord d’entreprise afin de modifier la périodicité des entretiens biennaux et prévoir que cette modification soit applicable de façon rétroactive sur la première période 2014-2021. La loi permet en effet aux entreprises de négocier un accord collectif afin de modifier la périodicité des entretiens pro-fessionnels, de sorte qu’il est possible de prévoir par exemple une récurrence triennale plutôt que biennale. Sur ce point, le dernier questions-réponses de l’administration précise que l’accord collectif modifiant la périodicité des entretiens "s’applique, sauf stipulation contraire, pour l’ensemble du cycle d’entre-tiens en cours et pour les cycles d’entretiens suivants. Ainsi, les conditions d’application de la sanction prévue à l’article L. 6323-13 du Code du travail s’apprécieront au regard des nouvelles règles de périodicité fixées dans l’accord d’entreprise ou de branche à la fin de la période de six ans, même si ces règles ont été adoptées pendant le cycle d’entretiens". Cette alternative permettrait donc aux entreprises de conclure des accords collectifs portant sur le cycle "en cours" et donc de modifier la périodicité des entretiens pour la période 2014-2020.

Par Sabrina Dougados, avocat associée, et Foucauld du Pradel, avocat. Fromont Briens

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