Égalité des chances en entreprise : un "engagement à perpétuité"
En matière d’égalité, les lignes sont en train de bouger, notamment grâce à des outils comme l’index de l’égalité femmes-hommes qui oblige, depuis cette année, toutes les entreprises d’au moins 50 salariés de rendre compte du niveau d’égalité salariale entre les femmes et les hommes dans leur structure. Ainsi, expliquait Elisabeth Borne dans les pages du Parisien, en 2019 "17% des entreprises avaient des notes inférieures à 75/100", ce qui les contraignait à prendre des mesures correctives sous peine de pénalités financières. "Il n’y en a plus que 4% aujourd’hui", se réjouissait la ministre du Travail, signe que "beaucoup d’entreprises sont dans une dynamique de progression".
Pour Geoffroy Roux de Bézieux, ces bons résultats témoignent de l’implication des entreprises sur le sujet de l’égalité femmes-hommes. Le patron des patrons a rappelé, ce mercredi, combien "mesurer, mettre en valeur en valeur les bons élèves et encourager les plus mauvais" était préférable à "une approche coercitive et punitive de la question". Lors de la conférence de presse organisée à l’occasion de la présentation de l’édition 2020 du Baromètre de perception de l’égalité des chances en entreprise, Armelle Carminati-Rabasse, présidente du Comité entreprise inclusive, a souligné que les "outils de mesure ne faisaient pas tout". "L'égalité des chances, a-t-elle ajouté, cela se mérite, cela se travaille". Mais, "bonne nouvelle", cet engagement de tous les instants et "à perpétuité" peut également se mesurer au travers de "la perception qu’ont les salariés de la politique d’égalité des chances dans leur entreprise".
"L'égalité des chances, cela se mérite, cela se travaille".
Des perceptions contrastées
Et, en la matière, les chiffres parlent d’eux-mêmes. En effet, pour 90% des salariés du privé interrogés, le sujet de l’égalité des chances se classe en troisième position juste derrière les problématiques de santé/sécurité et de qualité de vie au travail (QVT). En revanche, ils ne sont que 74% à estimer que leur entreprise juge cette question importante ou prioritaire. Ils pensent celle-ci bien davantage investie sur les questions de santé/sécurité, de QVT, d’éthique, d’égalité femmes-hommes ou de RSE.
Certains répondants se montrent également peu informés des actions menées au sein de leur organisation. Ainsi, 31% d’entre eux reconnaissent ne pas savoir comment leur entreprise appréhende ce sujet. Ils sont, néanmoins, 69% à pouvoir identifier au moins une action. Les accords d’entreprise figurent au premier rang des actions citées par les salariés, tandis que l’adhésion à une charte ou à un label semblent connaître un léger recul. Si 8 salariés sur 10 sont convaincus que les actions mises en place sont efficaces, seules 24% des entreprises accueillent en leur sein une mission, un service ou un poste consacré à la question des diversités.
Seules 24% des entreprises accueillent en leur sein une mission, un service ou un poste consacré à la question des diversités.
La parité, priorité n°1
Dans un contexte qui semble favorable à la prise en compte des inégalités en tout genre, les salariés continuent de considérer la parité, salariale ou globale, comme l’enjeu le plus prioritaire. 57% d’entre eux citent en première place l’égalité salariale. Quant à l’égalité tout court entre les femmes et les hommes, elle arrive en seconde position avec 55%.
Sans surprise, on observe une différence de perception et d’attentes entre les collaboratrices et les collaborateurs. Côté femmes, 60% des interrogées placent l’égalité salariale en premier et 63% l’égalité globale. Ces chiffres tombent respectivement à 54% et 50% chez leurs pairs masculins. Ces derniers, néanmoins, se montrent sensibles à d’autres inégalités comme celles liées à l’origine sociale (37%) ou au lieu d’habitation (20%). A l’inverse, les femmes ne sont que 30% à évoquer la question de l’origine et 14% seulement la dimension géographique.
La crainte des discriminations
Si 4 salariés sur 5 estiment à présent leur entreprise représentative de la diversité, cela ne semble pas atténuer leurs craintes en matière de discrimination. En effet, trois-quarts d’entre eux pensent posséder au moins une caractéristique potentiellement stigmatisante qu’il s’agisse d’une origine sociale modeste, de l’âge ou d’un parcours atypique. Si "être porteur" de ces critères ne vaut pas systématiquement discrimination, 56% des personnes interrogées pensent néanmoins pouvoir en être victimes sur leur lieu de travail ou lors d’un entretien d’embauche.
61% des cadres craignent d'être discriminés contre 49% des ouvriers.
Cette crainte se révèle particulièrement forte parmi la population cadre. Ils sont 61% à faire part de leur inquiétude face à ce sujet contre 49% chez les ouvriers. Signe d’un "blues des cadres" pour Armelle Carminati-Rabasse, ce chiffre donne plutôt à penser pour le dirigeant de Securiteam, Alban Ragani, invité de la table ronde suivant la conférence de presse, que "l’égalité des chances demeure quelque part un problème de riches". Ou du moins, la question ne se pose pas avec la même acuité selon la taille des entreprises ou les territoires.
Quoiqu’il en soit, 3 salariés français sur 4 se montrent confiants quant à leur avenir au sein de leur entreprise, et ce alors même que l’étude a été conduite au moment du déconfinement. Plus largement, ce chiffre témoigne d’un regain de popularité du milieu économique. Ainsi, 72% des Français jugent, selon les mots de Geoffroy de Roux de Bézieux, que "les entreprises ont fait le job" durant la crise du coronavirus. Espérons, à plus long terme, qu’elles continuent de se montrer "à la hauteur" en matière d’égalité des chances.
Marianne Fougère