De nombreux partis politiques réclament la mise en place d’un régime parlementaire. Mais cela suppose une capacité à dialoguer et à négocier que ne possèdent pas nos dirigeants. La réforme des retraites en est l’ultime preuve.

Article 49.3 qui prouve l’inutilité du travail de député, record d’abstention aux élections notamment chez les plus jeunes, toute-puissance du président de la République contraint de s’impliquer sur quantité de dossiers techniques… Oui, la Ve République comporte bien des défauts. Oui, il n’est pas anormal de rêver à de nouvelles institutions.

Sans verser dans la proportionnelle intégrale qui générerait des coalitions éphémères, un système de parlementarisme rationnalisé, à l’instar de ce qui se fait en Autriche, en Allemagne ou en Suède, serait la martingale pour certains.

Sauf que. Les dernières élections législatives ont marqué une rupture : pour la première fois les forces politiques performantes lors des présidentielles sont présentes de façon significative à l’Assemblée nationale ; notre mode de suffrage a enfin permis une certaine représentativité. Le RN peut se reposer sur un contingent de 88 députés, ce qui est "normal" pour un parti qui s’est hissé deux fois de suite au second tour d’une élection présidentielle, les Insoumis ont fait entrer 77 élus dans l’hémicycle, les Verts sont présents également et incarnent une vision de la société partagée par de nombreux citoyens. Le scrutin majoritaire à deux tours permet donc une représentation nationale qui ressemble au peuple.

La vie politique actuelle le prouve : notre classe politique n'est pas prête pour un régime parlementaire qui nécessite la maîtrise de l'art du compromis

Le problème réside dans notre classe politique. Elle n’est pas prête pour un régime parlementaire qui se caractérise par le compromis permanent. Or, depuis le début de la législature, l’invective, le clash, la haine, la volonté de plaire aux militants prennent le pas sur la défense de l’intérêt général au prix de quelques concessions.

En Allemagne ou en Autriche, des partis de bords opposés parviennent à gouverner en bonne intelligence. Actuellement, le gouvernement Scholz repose sur une coalition entre écologistes, socialistes et libéraux. Qui pourrait imaginer un contrat de gouvernement liant Sandrine Rousseau, Olivier Faure et Gérald Darmanin ? En Autriche, le pays est dirigé par une coalition entre droite et écologistes. Il suffit de songer à un accord entre Marine Tondelier et Éric Ciotti pour mesurer que, si le peuple peut être mûr pour le parlementarisme, ce n’est pas le cas de ses représentants. Même les alliés "naturels" ne semblent pas prêts à s’accorder. La réforme des retraites en est la preuve par l’absurde. LR défendait la retraite à 64 ans durant la présidentielle. Ce qui n’a pas empêché une partie du groupe de vouloir censurer le gouvernement. Son crime ? Défendre la retraite à 64 ans. De quoi désoler nos amis allemands et autrichiens.

Lucas Jakubowicz

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