Le ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, fait de la diversité dans la tech un cheval de bataille. Il revient sur le succès de certaines mesures et en détaille de nouvelles.

Décideurs. Votre ministère est depuis plusieurs années engagé sur la question de la diversité. Pourquoi ?

Jean-Noël Barrot. Le secteur de la tech est en pleine croissance mais fait face à des défis de recrutement. Les compétences nécessaires au développement des entreprises sont présentes chez de nombreux talents qui ne pensent pas à postuler dans des start-up, s’autocensurent car s’imaginent trop âgés, pas assez diplômés, non détenteurs des bons codes… Nous n’avons pas le choix ; pour continuer à se développer, innover, créer de la croissance, il faut aller chercher tout le monde et l’État a un rôle à jouer.

Quelles actions concrètes sont menées par le monde de la tech pour changer la donne ?

Plusieurs programmes peuvent être cités. Je pense notamment au French Tech Tremplin qui en est à sa troisième édition et permet à des personnes éloignées de l’écosystème entrepreneurial d’obtenir de l’aide, des conseils, de la formation pour lancer leur entreprise. L’initiative a du sens puisque, rappelons-le, 80 % des levées de fonds vont dans des entreprises franciliennes bien que 50 % des start-up soient créées en région. J’aimerais aussi évoquer le French Tech Community Fund qui a récemment réparti une enveloppe de 3,6 millions d’euros entre 129 lauréats. Sur la question de la parité homme-femme, les choses bougent aussi notamment grâce au Pacte Parité lancé en mai dernier et déjà signé par 69 start-up du Next40 et du French Tech 120 qui s’engagent à faire siéger 20 % de femmes dans leur board d’ici à 2024 et 40 % d’ici à 2028.

Le secteur peut aussi se reposer sur des mesures plus "générales" pour améliorer sa diversité. Lesquelles ?

La loi Copé-Zimmermann votée en 2011 qui impose 40 % de femmes dans les conseils d’administration est une législation avant-gardiste au niveau mondial. Plus récemment, il faut citer l’index de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes mis en place par Muriel Pénicaud et intégré à la loi Avenir professionnel en 2019. Il permet de mesurer et de corriger les inégalités salariales au sein des entreprises d’au moins 50 salariés, ce qui comprend de nombreuses start-up. Enfin, la loi Rixain, votée à la fin du dernier quinquennat, se concentre sur la parité dans les comités de direction. Une mesure comme l’allongement du congé paternité passé de 14 à 28 jours va également dans le bon sens.

"Dans la prochaine promotion du Next40/120 sera intégré un indice d'égalité professionnelle"

Les pouvoirs publics ne peuvent pas tout, les entreprises doivent également se montrer proactives…

Oui, et heureusement c’est le cas. L’État peut placer des curseurs de responsabilité, mais les start-up doivent aussi se montrer proactives. De nombreuses initiatives, dont le mouvement #TechYourPlace, mènent un travail remarquable en partageant de bonnes pratiques en matière de sourcing, de formation, de cas pratiques. Les initiatives menées permettent de montrer qu’une start-up qui prend à bras-le-corps les enjeux d’inclusivité gagne en croissance, en créativité et en dynamisme. La diversité est également une condition sine qua non pour intégrer le Next40/120, label créé en 2019 pour accompagner les start-up françaises les plus performantes… Il est essentiel que les entreprises dans la tech puissent devenir exemplaires. C’est pourquoi il sera demandé au candidat de réaliser un indice d’égalité professionnelle et la remontée des dispositifs mis en place pour favoriser la diversité. C’est le rôle de l’État d’encourager les entreprises dans cette voie et de faire émerger des parcours qui inspirent tout l’écosystème. Soulignons également qu’un bilan carbone sera requis.

Propos recueillis par Lucas Jakubowicz

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