Âge, salaire, CSP, reports de voix, départements... Les résultats du second tour matérialisent des données que nous pressentions tous. Ils révèlent aussi des clivages intéressants pour les années à venir. Décryptage en infographies.

Départements : Marine Le Pen creuse son sillon

Le Rassemblement national s’ancre dans les territoires. Lors du second tour de la présidentielle de 2017, sa candidate avait remporté seulement deux départements : le Pas-de-Calais (52,06%) et l’Aisne (52,91%). Cinq ans plus tard, Marine Le Pen y augmente ses résultats puisqu’elle obtient respectivement 57,5% et 59,5% des voix.

Mieux encore, elle sort en tête dans 22 départements de France métropolitaine. Le RN s’appuie sur deux zones où il est particulièrement dynamique : le Nord-Est et la façade méditerranéenne. Ainsi, Marine Le Pen l’emporte dans le Pas-de-Calais, la Somme, département de naissance d’Emmanuel Macron (51%), l’Oise (52,7%), les Ardennes (56,7%), la Meuse (55,6%), les Vosges (52,4%), la Haute-Saône (56,9%), la Haute-Marne (57%), l’Aube (51,7%), l’Yonne (51,6%). Notons également qu’elle rafle la mise d’une très courte tête (50,1%) dans la Nièvre, terre d’implantation de François Mitterrand. Au sud, elle sort en pole position dans les deux départements corses, le Var (55,1%), le Gard (52,2%), le Vaucluse (52%), les Alpes-de-Haute-Provence (51,4%), les Pyrénées-Orientales (56,3%), l’Aude (54,9%), le Tarn-et-Garonne (52%) et le Lot-et-Garonne (50,5%).

Le RN remporte 18 156 communes contre 16 922 pour le candidat centriste. En Outre-mer, Marine Le Pen remporte à plus de 60% tous les territoires des Antilles : Guadeloupe, Martinique, Guyane. Elle est également à 60% à La Réunion et à 59% à Mayotte. Dans le Pacifique (Polynésie, Nouvelle-Calédonie et Wallis et Futuna), Emmanuel Macron est vainqueur.

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Emmanuel Macron : roi de l’0uest et des villes

Comme il y a cinq ans, Emmanuel Macron fait ses meilleurs scores dans les départements de l’ouest du pays. Certains comme le Finistère (67,5%), I’Ille-et-Vilaine (69,5%) ou la Loire-Atlantique (69,5%) ont une tradition plutôt de gauche. D’autres tels que la Vendée (62,5%) ou le Maine-et-Loire (66,5%) sont des bastions traditionnels de la droite.

Comme au premier tour, c'est dans les départements aisés de l’ouest de l’Ile-de-France que le président sortant fait ses meilleurs résultats du pays : Paris (85%), Hauts-de-Seine (80,4%), Yvelines (71%). Dans les grandes métropoles, le président sortant est plébiscité : 84,2% à Rennes, 81,1% à Nantes, 79,8% à Lyon, 78,7% à Grenoble, 77,5% à Toulouse, 77,6% à Strasbourg… Chez les 532 000 expatriés, Emmanuel Macron est à 86%.

Reports de voix

Le report des voix était une énigme de ce scrutin. Selon les premières données de l’institut Ipsos, les électeurs insoumis ont voté à 42%  pour Emmanuel Macron, soit dix points de moins qu’en 2017. En revanche, ils sont 17% à avoir opté pour Marine Le Pen, soit dix points de plus qu’il y a cinq ans. 41% ont voté nul, blanc ou se sont abstenus, soit un résultat stable par rapport au dernier second tour. À gauche, l’électorat de Yannick Jadot a, pour sa part, clairement fait barrage puisque 65% des votants EELV se sont tournés vers le président sortant.

À droite, la majorité des électeurs de Valérie Pécresse (53%) a voté Emmanuel Macron contre seulement 18% pour Marine Le Pen (soit quasiment la même proportion que les Insoumis). Sans surprise, Marine Le Pen a pu se reposer sur 73% des électeurs d’Éric Zemmour.

Âge

Emmanuel Macron réalise ses meilleurs scores chez les électeurs les plus jeunes et les plus âgés. Ainsi, il l’emporte largement chez les 18-24 ans avec 61%. Le président réélu peut également remercier les retraités qui lui permettent une confortable victoire puisqu'ils sont 68% à avoir voté pour lui. Chez les plus de 70 ans, il est même à 71%. Est-ce parce qu’il est parvenu à parler à ce segment ? Est-ce lié à l’éternelle faiblesse de l’extrême droite chez les citoyens les plus vieux ? Les études qualitatives le révéleront sûrement.

Chez ceux qui, pour paraphraser Georges Brassens, "balancent entre deux âges", le scrutin est très serré. Marine Le Pen prend la tête chez  les 50-59 ans (51%). Le président s’impose de peu chez les 25-34 ans (51%) et chez les 35-49 ans (53%).

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Catégorie socio-professionnelle

Cela revient à enfoncer les portes ouvertes, mais les données de l’Ipsos l’affirment : plus on est riche, plus on vote Macron. Ainsi chez les électeurs gagnant plus de 3 000 euros par mois, le président sortant obtient 65% des voix. De même, l’Ipsos révèle que 75% des électeurs parvenant à mettre de l’argent de côté ont reconduit le président sortant. En revanche, 54% de ceux qui reconnaissent avoir du mal à boucler leur budget glissent un butin Le Pen dans l’urne.

C’est donc sans surprise qu’Emmanuel Macron s’impose très largement dans les communes les plus riches de l’Hexagone : 82,6% à Neuilly-sur-Seine, 82% dans le XVIe arrondissement de Paris, 78% à Veyrier-du-Lac la banlieue chic d’Annecy… Les villes et villages aisés de la Côte d’Azur font figure d’exception.

69% des électeurs se déclarant "satisfaits de leur vie" ont voté Emmanuel Macron. Les "insatisfaits" votent Marine Le Pen à 79%

Inversement, Marine Le Pen séduit 67% des ouvriers et 57% des employés, ce qui lui permet de s’imposer dans les communes les plus pauvres de la "France périphérique" que décrit si bien le géographe Christophe Guilluy, 62% à Freyming-Merlebach en Moselle, 60,6% à Denain, 64,5% à Liévin, 65% à Sallaumines dans le Pas-de-Calais, 61% à Beaucaire dans le Gard.

Le vote Macron-Le Pen semble ériger une barrière entre les Français s’estimant "satisfaits de leur vie" et les autres. Ainsi, la première catégorie est macroniste à 69%, la seconde plébiscite Marine Le Pen à hauteur de 79%.

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Lucas Jakubowicz

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