Les deux candidats jouaient gros dans cette joute oratoire. L’enjeu ? L’incarnation du vote utile à droite. Si Éric Zemmour n’a pas commis d’erreur fatale, il a été mis en difficulté par sa rivale qui sort renforcée de la séquence.

"Ils ne vont pas dîner ensemble hein". À la fin du débat entre Valérie Pécresse et Éric Zemmour, un micro mal coupé diffuse à l’antenne une petite phrase d’un technicien de LCI qui, malgré lui, a parfaitement résumé le débat parfois plus que tendu entre la candidate de LR et celui de Reconquête.

Il faut dire que ce 10 mars au soir, les deux participants jouaient leur va-tout. La présidente de la région Ile-de-France devait faire oublier son meeting raté du Zénith et enrayer sa chute dans les sondages. Le polémiste, de son côté, devait réussir à prendre le dessus sur sa rivale pour incarner le "vote utile" de l’électorat de droite conservatrice. Pas de round d’observation, les deux rivaux ont lancé d’emblée les hostilités, bien aidés par les journalistes qui, en guise d'entrée en matière ont posé à Valérie Pécresse la question suivante : "Pourquoi Éric Zemmour serait un mauvais président ?".

Débats tendus

Les trois quarts du débat se sont axés sur des thématiques chères à l’électorat de droite : gaullisme, islam, immigration, identité, sécurité, expulsions... Les sujets tels que l’environnement ou l’économie n’ont été évoqués qu’en toute fin de d’émission. Dommage, puisque ce sont sur ces sujets que les deux candidats ont semblé le plus à leur aise.

Sur chacune des thématiques qui se sont succédé, Valérie Pécresse et Éric Zemmour ont cherché à discréditer l'autre. La gagnante de la primaire LR a décrit son adversaire comme un "idéologue", "un doctrinaire inhumain", un "président qui sera impuissant". Ce dernier a essayé de la dépeindre comme un clone d’Emmanuel Macron ("Madame Pécresse, c’est Madame 20h02. A 20h02, elle appellera à voter pour Emmanuel Macron"), une élue manquant de fermeté sur le régalien et adoptant à l’occasion une ligne communautariste mais également une "gaulliste de pacotille".

Les deux "boxeurs" ont également pratiqué le name dropping pour se nuire mutuellement. Ainsi, Valérie Pécresse a listé une série de "nazis" présents dans les équipes de d’Eric Zemmour, tout en pointant une proximité avec Tariq Ramadan. Le candidat de Reconquête a, pour sa part, fait l’inventaire des supposés "islamo-droitistes" présents chez LR, citant notamment "Jean-Christophe Lagarde, l’allié des islamistes".

La question de l’islam a longuement été évoquée, Éric Zemmour soutenant "qu’islam et islamisme c’est la même chose". Valérie Pécresse affirmant l’inverse et adoptant des propos proches de ceux d’Emmanuel Macron sur le sujet.

Valérie Pécresse marque des points

Si les sondages des jours à venir serviront de juges, Valérie Pécresse a clairement marqué des points. Pugnace, ne se laissant pas intimider, elle a eu le temps de dérouler son programme et de démonter à plusieurs reprises les arguments de son interlocuteur, notamment sur la question des aides sociales aux étrangers ou des expulsions. De quoi solidifier son socle ? C’est certain. De quoi faire revenir chez LR les électeurs hésitant entre elle et Éric Zemmour ? Probablement. Si son rival n’a pas commis de "boulette fatale", il a parfois été mis en difficulté et a montré aux yeux de tous qu’il n’était pas "imprenable en débat" (certaines séquences face à Jean-Luc Mélenchon ou Bruno Le Maire montraient déjà cela). En revanche, il semble s’être tiré une balle dans le pied en critiquant à plusieurs reprises Nicolas Sarkozy ou Jacques Chirac. Si ces attaques ont fait plaisir à ses fans, les électeurs de droite ont peut-être moyennement apprécié de voir des personnalités populaires critiquées de la sorte.

Lucas Jakubowicz

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