Les 28 et 29 août s’est tenue la Ref, l’université d’été du Medef. Un événement qui est consacré à l’état des lieux du capitalisme en temps de crise.

C’est devant un parterre de leaders de l’économie et de responsables politiques venus de toute l’Europe que Bruno Le Maire a ouvert la Ref, nouvelle mouture de la traditionnelle université d’été du Medef. Les ambitions de Bercy et du premier réseau d’entrepreneurs de France semblent être à l’unisson pour « construire un nouveau capitalisme » soucieux d’équité et de justice fiscale. Des termes martelés tout au long de la Ref par le ministre. « Qu’il y ait des écarts salariaux entre salariés et dirigeants, chacun peut le comprendre. Mais qu’il y ait des écarts indécents, c’est incompréhensible, déclare-t-il avant de jouer les Cassandre du grand capital. Le temps où un dirigeant gagnait 300 à 350 fois plus que ses salariés est révolu. »

Agenda politique de Bercy

Lors de cette 21e édition, l’ordre du jour du ministère de l’Économie et des Finances a été révélé, de punchlines en prises de position marquées. Ainsi, sur le secteur secondaire et son renouveau digital : « L’industrie, ce n’est pas Zola ! C’est la vitalité de nos villes moyennes. Il faut la réhabiliter aux yeux des plus jeunes ». Ou, encore, ses prises de position à l’encontre de la Commission européenne : « Un certain nombre de dogmes sont dépassés. Je ne conteste pas la nécessité de règles de la concurrence, mais quand je vois que la Commission européenne a refusé la fusion entre Alstom et Siemens au motif que jamais CRRC ne viendrait en Europe, alors que CRRC a emporté des marchés avec l’opérateur tchèque Leo Express en décembre 2016, a signé avec les chemins de fer autrichiens en avril 2017, avec la Deutsche Bahn en juin 2018 et vient de faire une offre sur le groupe allemand de locomotives Vossloh, je me demande si nous parlons de la même réalité. »

Le capitalisme, l’antidote du futur ?

Avec les conférences tenues les 28 et 29 août, on a le sentiment que le Medef investit la problématique de la réduction des inégalités, certes, sur le tard mais, avec l’objectif de rassembler. C’est peut-être en ce sens qu’il fallait interpréter l’invitation – très critiquée, puis annulée – faite à Marion Maréchal pour parler du populisme. De Cécile Duflot, figure emblématique de la gauche et aujourd’hui directrice générale d’Oxfam France, à Valérie Pécresse, ancienne tête de liste des Républicains et présidente du Conseil régional d’Île-de-France, le Medef brasse large dans les mouvances politiques. Serait-ce pour faire peau neuve et assouplir son obédience de droite ? Il y a peut-être un cap à ne pas franchir.

Si les oppositions étaient parfois franches, les débats étaient animés par un réel souci de brainstorming. Au cœur de ces échanges : quel devenir pour un capitalisme qui botte en touche face aux inégalités et à la grande précarité ? « 1 % de la population possède 50 % de la richesse », a insisté Cécile Duflot, pointant du doigt un système dont le fonctionnement est « incapable de redistribuer au plus grand nombre ». La directrice générale d’Oxfam France soutient mordicus que le modèle économique de la redistribution n’est pas figé, que « les politiques sociales et économiques des États sont plus efficaces que les indicateurs de la croissance pour endiguer la pauvreté ». Pour elle, les entreprises ont un rôle plus actif à jouer dans la réduction des écarts sociaux. Elle insiste : « La France est la championne du monde de la redistribution des dividendes. »

Son espoir est douché par certains économistes, purs et durs. « L’État providence a été créé sur l’idée que le capitalisme pouvait créer une économie de plein emploi, analyse Jean-Marc Daniel, professeur émérite à l’ESCP Europe. Le capitalisme n’est pas armé pour résoudre la pauvreté, très liée aujourd’hui au chômage. » Un cul-de-sac pour le Medef ?

Nicolas Bauche

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