Laetitia Avia, candidat La République en marche, livrera la bataille des législatives à Paris dans la 8e circonscription. Le portrait de l’un de ces nouveaux visages, cette fois issu du monde du droit, qui pourraient participer au profond renouvellement de l’Assemblée nationale.

L’égalité des chances est son combat. Née à Paris le 24 octobre 1985, Laetitia Avia a grandi dans le 93, recevant une éducation en ZEP. Issue d’une famille populaire de quatre enfants, où le salaire de sa mère, aide-soignante, n’a jamais été loin du Smic, Laetitia suivra leur exemple d'une valeur « travail » chevillée au corps : ses résultats seront excellents. Elle est reçue à Sciences-Po, grâce aux conventions d’éducation prioritaire alors mises en place par son directeur Richard Descoings : « Il est vraiment venu nous chercher, dans nos quartiers, pour nous donner notre chance. »

Passé la joie et les congratulations avec ses amies, il a fallu affronter l’angoisse de s’intégrer dans cette institution prestigieuse, d’en faire un « chez soi », malgré « la frontière culturelle imaginaire formée par le périphérique ». Les premiers mois sont difficiles, mais les succès rencontrés à Sciences-Po auront deux vertus : d’une part, dissiper les dernières appréhensions, et d’autre part, la voir repérée par Jean-Michel Darrois, le fondateur du prestigieux cabinet d’avocats Darrois Villey – choisi par les groupes du CAC 40 pour leurs acquisitions stratégiques et contentieux majeurs. Elle le rejoint d'abord comme stagiaire, puis avocate.

 

Commission Darrois

Peu de temps après, Jean-Michel Darrois est choisi par le gouvernement pour former une commission de travail sur la réforme des professions juridiques. La « commission Darrois » cherche quelqu’un de neutre, de travailleur et qui ne saurait être intimidé : ce sera un second tremplin pour Laetitia Avia, qui en devient la secrétaire générale à 22 ans. Elle retrousse encore un peu plus ses manches et y rencontrera l’un des cinq rapporteurs : un certain Emmanuel Macron. Il sera intrigué par son parcours, son âge, et son ambition de devenir une grande avocate. La relation est en marche…

S’en suivent, pour la commission, des centaines d’auditions. « Nous avons pris et eu le temps d'écouter des personnalités incroyables, mis en lumière des barrières et des archaïsmes professionnels, et enfin, fait des propositions raisonnables pour des professions juridiques bien plus dynamiques et modernes. » L’enjeu est fondamental à ses yeux : redonner confiance en la Justice. 

Elle en tire deux satisfactions… et deux frustrations. Côté satisfactions, il y a d’abord la méthode, fondée sur l’écoute, et l’indépendance de la commission : alors que le projet de fusionner avocats et notaires était dans la lettre de mission, la commission Darrois rendra des conclusions divergentes. Côté frustrations : sur les cinquante propositions formulées, beaucoup ne seront mises en œuvre que de façon très lente, notamment dix ans après, via la loi… Macron.

 

Orienter sa propre voile

Alors que la direction du cabinet Darrois Villey change, et son modèle avec, elle décide de partir. Interpellée par un article sur le cabinet Deprez Perrot, elle le rejoint comme associée quelques semaines après pour développer la clientèle. Avec Adrien Perrot, l’entente est parfaite. Leur vision est progressiste, la communication et l’exercice moderne. En 2016, ils décident de fonder leur cabinet. Une année féconde : Laetitia rejoint également En Marche !, ralliant parmi les premières son groupe d’expert sur la justice. Elle consacrera tout son été aux fiches « Justice ». Le mouvement, impressionné, lui confiera le rôle de référente sur le 94. Mais sa grande fierté est que « le mouvement ait créé un cadre pérenne pour que les citoyens se réapproprient l’espace politique et co-construisent les propositions ». Le nombre de membres dans le 94 explose, passant de 2 000 à 10 000 adhérents en peu de temps. 

Le mouvement n’avait pas encore de programme mais déjà des valeurs (progressisme, optimisme, travail). Il n’avait pas d’élus, mais l’ambition de donner leur chance à ceux qui ont de la compétence, sans discrimination, ou égard pour l’ancienneté politique. Le focus sur l’égalité réelle se traduit par des mesures qui marqueront beaucoup Laetitia et les comités des banlieues de Paris, comme le dédoublement des classes de CP. Autre mesure clé : plutôt que d’espérer que les entreprises déménagent dans les zones difficiles, En Marche ! annonce que toute entreprise recrutant dans les quartiers difficiles recevra une prime, ce qui permettra l’émancipation par le travail, et aura un effet bien plus rapide pour rétablir l’égalité des chances. 

Comme Amin Maalouf, Laetitia croit au pouvoir de la volonté, capturée dans cette maxime : « Celui qui est à la barre ne décide pas d’où souffle le vent. Mais il peut orienter sa propre voile. »

 

DM

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