Le 8 septembre dernier, Myriam El Khomri recevait les lauréats de U-spring (1) et saluait les initiatives de ces « entreprises apprenantes ». L’occasion pour la ministre du Travail de rappeler que, face à l’enjeu de la formation, entreprises et pouvoirs publics se devaient d’être « alliés ».

Décideurs. L’événement d’aujourd’hui en dit long sur l’évolution de la formation professionnelle en France…

Myriam El Khomri. Il montre que les entreprises ne perçoivent plus uniquement la formation comme un coût à supporter mais comme un investissement. Cette évolution est essentielle car face au défi que représente la lutte contre le chômage, les politiques publiques doivent être accompagnées d’initiatives privées. Lorsque celles-ci émergent, il faut savoir les reconnaître et les valoriser. C’est pourquoi je tenais à saluer ces entreprises qui s’engagent et innovent dans le domaine de la formation : elles permettent de challenger toutes celles qui ne le font pas.

 

Quels bénéfices concrets peut-on espérer de ces nouvelles initiatives en matière de formation ?

Investir dans la formation et rendre chacun acteur de sa vie professionnelle crée un cercle vertueux : c’est bon pour les entreprises, bon pour la compétitivité de notre économie mais surtout bon pour la société et pour les personnes qui espèrent une progression de leur carrière. C’est pourquoi la formation ne doit pas bénéficier qu’à quelques-uns.

 

« Dans le domaine de la formation, État et entreprises doivent devenir des alliés »

On a longtemps dit la France en retard dans ce domaine. Est-ce toujours le cas ?

La France souffre d’une image très négative en matière de formation, celle d’un pays dans lequel le diplôme resterait déterminant. Néanmoins on constate une évolution. C’est pourquoi nous jugeons essentiel d’accompagner le développement de plans de compétence avec les partenaires sociaux dans les entreprises. Les métiers évoluent, il est donc impératif que les compétences suivent le mouvement. Et pour cela, la formation continue doit s’ajouter à la formation initiale. Beaucoup d’outils innovants existent aujourd’hui pour cela, notamment dans le domaine digital.

 

Le fait que les entreprises s’emparent de ces sujets est évidemment une bonne chose, mais cela ne pointe-t-il pas une carence en matière de formation professionnelle ? 

Je dirais au contraire qu’il s’agit  là d’actions complémentaires. Nous n’avons pas suffisamment formé les demandeurs d’emploi dans notre pays, c’est une réalité dont nous avons tous conscience. Mais nous avons essayé de faire bouger les lignes, notamment en ouvrant le compte personnel de formation aux demandeurs d’emploi alors que celui-ci était autrefois réservé aux salariés. Le fait de doubler le nombre de formations pour les salariés les moins qualifiés s’inscrit dans la même dynamique. Dans ce domaine, État et entreprises doivent devenir des alliés. Les politiques publiques doivent être centrales mais on ne pourra pas parler d’écosystème si nous-mêmes, pouvoir publics, nous ne sommes pas en capacité de travailler avec ces initiatives privées qui ne représentent pas une concurrence, mais une vraie complémentarité. La loi de 2014(2) met du temps à être appliquée, mais le fait de partager ces enjeux contribue à nous faire avancer.

 

Reste que, pour l’heure, seules les grandes entreprises se sont attelées au sujet. N’est-ce pas discriminant pour les salariés des petites entreprises ?  

C’est pour cela que la loi est là : le compte personnel d’activité, qui sera en place dès le 1er  janvier 2017, crée un droit universel à la formation dont l’objectif est de permettre à n’importe quel salarié de se former. Par ailleurs, les moins qualifiés bénéficieront d’un doublement de leurs heures de formation. Cette mesure concerne non seulement l’ensemble des salariés français, mais également les demandeurs d’emploi, les artisans, les commerçants.

 

 

Propos recueillis par Caroline Castets et Capucine Coquand

 

(1) Journée dédiée aux meilleures pratiques en matière de formation et de corporate learning: nouvelles formes de pédagogie, révolution digitale, formation distancielle, business models et certification des universités d’entreprise. http://www.u-spring.fr/

(2) Loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail

{emailcloak=off}