Front républicain contre le FN ou « ni PS ni FN » ? Le secrétaire général de l'UMP tente de sortir de ce « vieux débat » qui anime son parti... sans réellement trancher.
Décideurs. Face à Marine Le Pen, deux lignes de conduite coexistent à l'UMP, l’une en faveur d'un front républicain contre le FN et l’autre lui préférant le « ni-ni ». Comment résoudre le problème de ce « vote protéiforme » en faveur du Front national que vous dénonciez déjà en 2013 ?

Laurent Wauquiez.
Ce débat est comme un serpent de mer du débat politique, et il ne conduit qu'à une chose : miner et affaiblir la droite sous les sarcasmes du Front national et les injonctions culpabilisatrices du parti socialiste et de ses alliés. J'en ai assez de revoir régulièrement ce vieux film des années 1990 !

Le vrai sujet est celui de la déception ou du désespoir d'une partie de nos électeurs, qui pensent trouver dans le vote FN un exutoire à leur exaspération. Je suis convaincu qu'au fond d'eux-mêmes, la majorité de nos électeurs déçus qui se tournent vers Marine Le Pen préféreraient voter pour l'UMP et qu'il faudrait peu de choses pour les ramener à nous.

La clé est de toujours tenir un langage de vérité et de responsabilité. Vérité pour ne pas nier ou relativiser les réalités de la France d'aujourd'hui, à commencer par le sentiment de menace sur notre identité et notre sécurité. Responsabilité pour, à la fois reconnaître nos erreurs passées et prendre des engagements clairs et crédibles.


Décideurs. Estimez-vous, à l’instar de Brice Hortefeux, que c'est le PS qui fait monter le FN ou, comme le déclare Bruno Le Maire, que la responsabilité de son ascension est « collective » ?

L. W.
Je refuse de m'attarder sur ces débats, qui n'intéressent que le microcosme parisien. Pendant ce temps, le chômage atteint des sommets, notre système de retraite est au bord de l'implosion, les Français étouffent sous une fiscalité confiscatoire et stérilisante, ils s'inquiètent de l'Éducation nationale et de l'avenir de leurs enfants, tandis que notre modèle de société est menacé par le terrorisme islamiste ! C'est cela qui préoccupe les Français.

Le nombrilisme de la sphère politico-médiatique ne fait qu'alimenter l'incompréhension ou la colère de nos concitoyens, qui attendent des politiques des réponses et un projet d'avenir.
Oui, d'un certain point de vue, la responsabilité dans la situation actuelle est collective. Mais peu importe, il est grand temps de cesser de s'apitoyer, il faut aller de l'avant.


Décideurs. Le FN est-il un danger pour la démocratie ? Pour la République ? Comment le combattre au mieux ?

L. W
. Nous devons combattre le Front national comme un adversaire politique qui participe à la vie politique et au jeu démocratique. Les mêmes qui le voient comme une menace pour la République devraient nous expliquer pourquoi il n'a jamais été interdit‎ depuis 1972. Les mêmes qui l’excluent de l'arc républicain ne disent rien lorsque François Hollande reçoit Marine Le Pen à l'Elysée comme il le fait pour d'autres chefs de parti.

Ce n'est pas ce débat qui m'intéresse, mais celui de l'avenir de la France, de la vision que nous devons avoir pour notre pays. La meilleure façon de combattre le FN n'est pas d'en dénoncer l'impureté républicaine, ce qui est insultant pour un grand nombre d'électeurs et choquant si l'on est un démocrate, mais de l'affronter sur ses propositions de fond, en démontrant les effets dévastateurs qu'aurait sa politique sur la situation économique et sociale. Mais cela ne suffit pas : il faut surtout que l'UMP affirme ses convictions et ses valeurs et porte un projet pour la France. Sans se déterminer en fonction de Marine Le Pen.


Propos recueillis par Julien Beauhaire

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