Scandales financiers et guerres fratricides menacent la survie de l’UMP. Tour d’horizon des caciques du parti qui déclarent leur candidature à sa présidence.
À l’UMP, les affaires se suivent et confrontent le parti à des problèmes de financement. Prêt de trois millions d’euros, scandale Bygmalion, affaire Karachi…, le mouvement semble être au bord de l’implosion. Et ce, malgré une direction collégiale intérimaire censée apaiser les crispations nées autour de la personne de son ancien président, Jean-François Copé. Le 15 juin dernier, les trois anciens Premiers ministres, Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin et François Fillon ont effectivement pris provisoirement et collégialement sa tête. Christian Jacob, président du groupe à l’Assemblée nationale, l’avait annoncé le 27 mai à l’issue d’un laborieux bureau politique : «?Jean-François Copé a décidé de démissionner?», suivie par toute la tête de l’UMP au nom de «?la responsabilité collective devant les adhérents et les Français?», comme l’indique Valérie Pécresse, membre de l’équipe dirigeante. Reste que la décision prise à l’arraché n’a pas été évidente pour «?ce battant?», comme le confirment les députés Bernard Debré et Éric Ciotti.

Le scandale Bygmalion
La direction tripartite devrait durer jusqu’en novembre?2014. L’idée est celle d’une transition en douceur vers un congrès qui désignera à l’issue des votes du 29?novembre et du 6?décembre un nouveau président. Si Jean-François Copé a d’ores et déjà annoncé qu’il ne sera pas candidat, Alain Juppé n’a pas manqué de rappeler que «?le candidat à la présidence du parti devra s’engager à ne pas l’être aux primaires présidentielles?».
À l’origine du démembrement qui menace le parti, les révélations de l’hebdomadaire Le Point sur le scandale Bygmalion, nom d’une petite société de communication qui aurait empoché huit millions d’euros à la suite de l’organisation de plusieurs meetings et conventions. Outre le montant exorbitant de ces prestations ou la facturation d’événements n’ayant jamais eu lieu – annonçant Pierre Lellouche qui a depuis porté plainte pour usurpation d’identité –, il s’avère que les dirigeants de Bygmalion sont des proches de Jean-François Copé. «?Une chasse à l’homme?» pour ce dernier qui «?n’assume pas ce pour quoi il n’est pas informé?». Fin mai, Patrick Maisonneuve, avocat de la société, lâche une bombe en précisant que les factures correspondent en réalité aux meetings du candidat Nicolas Sarkozy en 2012. Budget : onze millions d’euros réglés par l’UMP. Pour sa défense, Jérôme Lavrilleux, directeur de cabinet de Jean-François Copé et ancien directeur de la campagne, parle d’un «?engrenage irrésistible?». Il reconnaît le système organisé de fausses factures pour couvrir les dépenses somptuaires, tout en assurant avoir émis des craintes à maintes reprises. «?On aura du mal à régler tout cela?», répétait-il…

Prêt de trois millions d’euros
Dernière affaire en date, celle révélée par Mediapart d’un prêt de trois millions d’euros accordé par Christian Jacob à l’UMP en 2012 pour contribuer au sauvetage financier du parti après la campagne présidentielle de 2012. Rien d’illégal, sauf que les députés n’étaient pas au courant. Sentant la colère monter dans ses rangs, Jean-François Copé dépose fin juin deux propositions de loi pour un contrôle accru des comptes de campagne et des comptes des partis politiques sur le bureau de l’Assemblée. Le président de cette dernière, le socialiste Claude Bartolone, annonce en parallèle dans un communiqué de presse qu’il va demander une révision «?du statut des groupes pour permettre l’exercice d’un contrôle sur l’utilisation qu’ils font des dotations qui leur sont versées?».

Nicolas Sarkozy en tête
Aussi étonnant que cela puisse paraître, cette affaire, comme toutes les précédentes – Tapie, Karachi, financement libyen supposé, écoutes téléphoniques, Bettencourt, sondages de l’Élysée… –, n’a que très peu d’impacts sur la popularité de Nicolas Sarkozy. Un récent sondage Ifop sur les primaires à l’UMP réalisé auprès des sympathisants place le jeune «?retraité?» de la vie politique très largement en tête des intentions de vote à 54?%. Mieux encore, depuis un an il n’est jamais descendu sous la barre des 50?% et ce en dépit desdites affaires. De leur côté, Alain Juppé et François Fillon sont respectivement à 22?% et 8?%. Quant à Christine Lagarde et Nathalie Kosciusko-Morizet, elles traînent à 4?% et 1?%. Toutefois, au lendemain de sa garde à vue et avant son intervention télévisée, un sondage CSA/Les Échos/Radio classique réalisé auprès des sympathisants UMP plaçait pour la première fois Alain Juppé devant l’ancien Président.
Deux ans avant la primaire socialiste, François Hollande ne dépassait pas les 3?% et tous lui déconseillaient de se présenter. Et c’est parce que Dominique Strauss-Kahn ne se présente finalement pas qu’il récupère les voix. C’est là tout le pari des cadres dissidents que de croire que le responsable UMP ne pourra se présenter à cause des scandales qui le suivent. Un pari osé que risquent bien de ne pas suivre les électeurs. «?Les Français préfèrent souvent l’efficacité à la vertu?», concède le politologue et directeur général délégué de l’institut de sondages Ipsos Brice Teinturier.

Malgré tout, Nicolas Sarkozy prépare son retour
«?Il va falloir que je m'y colle?», répète-t-il à son entourage. Fort des carences de leadership au sein de sa famille politique, Nicolas Sarkozy fait désormais parler de lui tous les quinze jours, en laissant habilement filtrer ses propos tenus en meetings et autres «?off?» aux journalistes, ou malgré lui lorsqu’il est mis en garde à vue au début du mois de juillet. Preuve, au passage, que l’ancien chef d’État continue de polariser le débat sans jamais disparaître. Le 19?juin dernier, il déclare au Figaro : «?Il faut réinventer le modèle démocratique français. Notre façon de faire de la politique, l’organisation des formations et les idées.?»
Au plan national, 38?% des Français désirent son retour. Signe que l’homme providentiel clive encore. Ils sont en revanche majoritaires au sein de l’UMP. À lui donc d’incarner autre chose que ce qu’il représentait entre?2007 et?2012. Pour cela, il voit du monde, beaucoup de think tanks notamment, le plus souvent en direct, puisque, comme on le rappelle rue de Miromesnil, siège de ses bureaux, les écoutes téléphoniques vont bon train. «?Il compte s’appuyer sur la nouvelle génération?», explique Geoffroy Didier, secrétaire général adjoint de l’UMP, «?et son horizon est large?».
Ses proches et ceux qui l’ont rencontré assurent qu’il reviendra en disant «?Je vous ai compris?» et, mieux, qu’il pourrait même changer le cadre institutionnel, envisageant une VIe République.


Pour aller plus loin :  Les candidats à la présidence de l'UMP s'affichent

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