(06/2011) Le Grand Paris cotitue un défi immee qui réclame gouvernance et se aigu du coeus. Trois a après avoir été imaginé par Nicolas Sarkozy, le projet enchaîne les scandales, un leadehip douteux et les remises en question financières.

(06/2011) Le Grand Paris constitue un défi immense qui réclame gouvernance et sens aigu du consensus. Trois ans après avoir été imaginé par Nicolas Sarkozy, le projet enchaîne les scandales, un leadership douteux et les remises en question financières. État, collectivités territoriales et établissements publics ont désormais bien du mal à croire à ce pari que beaucoup voudraient perdu.

Après les révélations du Canard enchaîné sur ses achats de cigares sur des fonds du ministère et sa démission du gouvernement, Christian Blanc répondait à L’Express qui l’interrogeait (5 juillet 2010) : « Je n’ai pas du tout l’impression d’avoir été sacrifié. J'ai estimé en mon âme et conscience qu'il fallait démissionner. Ma décision remonte à quelque temps déjà. Cela devait se faire en juillet, ce fut le 4 juillet. C'était le meilleur moment pour le président de la République, c'est ainsi. Toute cette affaire a été volontairement exagérée. »

Soulagement 

 Dans le dossier du Grand Paris (GP), Christian Blanc a souvent opéré en conciliabule, oubliant au passage de consulter les interlocuteurs habituels dont les élus parisiens. Son départ constitue pour l’opposition du véritable pain béni. La région et la mairie de Paris résument la touche « Blanc » dans ce dossier à une ébauche de tracé de métro, à une dizaine de pôles économiques imaginés autour de la capitale et à un manque de souplesse évident. Elles espèrent désormais qu’avec sa démission le gouvernement revoie sa copie. « Peut-être que le départ de Christian Blanc pourrait conduire l'exécutif à reréfléchir un peu à cette vision », lance Bertrand Delanoë. Le départ de l’ancien patron d'Air France et de la RATP, longtemps surnommé « l’homme des missions impossibles », est un loin d’être un handicap. C’est même un soulagement pour Nicolas Sarkozy. Outre la polémique très bling-bling des cigares, l’image de Christian Blanc est trop rapidement associée aux notions de force, d’urgence et d’incompréhension. C’est le noeud gordien des tensions qui entourent le plan d’agglomération du Grand Paris. Il a beau être l’homme qui a fait adopter le projet de loi du GP au Parlement en avril 2010, le président de la République souhaite avant tout renouveler le dialogue brisé à gauche avec la région. Son idée de la double boucle de métro longue de 130 km a finalement été votée. Elle réclame un investissement – non financé – de 21,4 milliards d'euros. C’est à la Société du Grand Paris (SGP) que revient la réalisation du chantier.

Délais serrés

L’échéance de 2012 est dans toutes les têtes. Nicolas Sarkozy a tout intérêt à ce que le marché des métros et des garessoit affecté avant cette date. Les délais sont serrés et le travail de séduction est entamé. Pour s’épargner des obstacles inutiles et chronophages, l’Élysée chouchoute l’opposition. Elle a libéré du pilori le projet de rocade ferroviaire de Jean-Paul Huchon, Arc Express, et le soumet, comme celui de la double boucle de Christian Blanc, à l’enquête non sans humour, l’intéressé déclare : « J'ai été élu à l'unanimité. Sur 14 voix, effectivement, il manquait les voix des six conseillers généraux de gauche. Je suis sûr qu'on se retrouvera. »

Petits arrangements entre amis

Dans l’opinion, c’est un tollé. André Santini, c’est l’homme qui aime – aussi – les cigares et qui a été mis en cause pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêts dans l’affaire de la Fondation Hamon. Au Château, on refuse de commenter. Les souvenirs de la nomination du fils Sarkozy à la tête du quartier d'affaires de La Défense (Epad) sont encore dans toutes les têtes.

Pour beaucoup, ce ne sont que des petits arrangements entre amis, un « symbole supplémentaire de la dérive du système Sarkozy », un merci rendu sans doute pour avoir rapidement lâché François Bayrou. Gêné, Nicolas Sarkozy propose à Bertrand Delanoë d’assurer la présidence de l’Atelier international du GP. L’offre faite à la gauche doit permettre de rééquilibrer les couleurs et tendances politiques entre l’Atelier, les dix équipes d’architectes et la SGP.

Le maire de Paris décline l’offre. Pour deux raisons. La première est politique. Elle est donnée par le député ex-PCF de Seine-Saint-Denis, Patrick Braouezec qui rappelle qu’« à dix-huit mois de la présidentielle et vu l'ambiance, on peut comprendre sa défiance face aux propositions qui viennent de l'Élysée ». La seconde est financière. « La priorité, c'est le transport et son financement », déclare Bertrand Delanoë. La double boucle de métro de Christian Blanc développée par la SGP et le projet concurrent de la région socialiste, Arc Express, cohabitent tant bien que mal. La dotation initiale en capital de 4 milliards d'euros – venant du remboursement en 2014 de prêts de l'État aux constructeurs automobiles et couverte par des emprunts, soutenue par Christian Blanc lors du débat parlementaire – a disparu du dernier dossier à destination de la commission du débat public. C’est Michel Mercier, ministre de l'Espace rural, qui reprend le maroquin de Christian Blanc. Marc Véron, son ex-directeur de cabinet est nommé par ce dernier juste avant sa démission. Tous espèrent rondeur, consensus, écoute et pragmatisme pour faire avancer un pari en pleine crise existentielle de leadership.

Crise du leadership

À gauche aussi, et en son sein même, on peine à s’entendre sur une vision cohérente du GP. Dès le début, Bertrand Delanoë souhaitait en finir une bonne fois pour toute avec « cette capitale enfermée dans ses frontières », avant d’ajouter « le temps est venu, de créer Paris métropole, véritable institution de l'agglomération où s'exprimera, à cette échelle, la solidarité, y compris fiscale ». Moins internationaliste, Jean-Paul Huchon, soutenu par les Verts, déplore la mise sous tutelle ministérielle et « le jacobinisme caricatural » d’un Blanc ou d’un Santini aux manettes du projet. C’est pour lui la reprise en main des affaires régionales. Pareil projet nuirait à l’efficacité et à la pertinence des politiques de proximité par le transfert des compétences sociales des départements supprimés. La sacro-sainte décentralisation en prend un coup et, pour la première fois dans l'histoire de France, un ministre se voit confier une compétence territoriale. Peu nombreux demeurent les irréductibles à croire encore au GP tant le départ de Christian Blanc, le transfert du chantier au ministère de l'Espace rural, l’avenir incertain réservé à la dotation de 4 milliards d’euros et les échéances électorales à venir pèsent dans le pari. Les jeux sont faits. Rien ne va plus.
Pour en savoir plus, lisez l'interview de Jean-Paul Huchon, président du conseil régional d'Île-de-France

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