S’il fait bon vivre en France, il faut croire qu’à l’étranger la vie n’est pas si mal. Le nombre de non-résidents français progresse, et l’accompagnement international en gestion privée s’avère particulièrement utile au regard de la complexité juridique et fiscale. Éclairage avec Benoist Lombard, président de Laplace.
B. Lombard (Laplace) : "En l’espace de vingt ans, les Français de l’étranger ont doublé"
Décideurs. Pouvez-vous nous faire un point sur l’organisation du groupe Crystal ?
Benoist Lombard. Crystal demeure la holding globale et la marque corporate, avec trois ramifications. Tout d’abord, une branche B-to-C de la gestion de patrimoine sous une marque unique "Laplace" a été créée, incluant les CGP de Laplace ainsi que Crystal Finance et Expert & Finance. En B-to-B, Zenith Group réunira Zenith Capital, WiseAM et l’activité immobilière Pierres by Crystal. Enfin, notre filiale Fintech, "Kwarxio", développe une solution numérique propriétaire, inédite et exclusive, dénommée SIO2 à destination de nos conseillers.
Qu’en est-il de la gestion privée pour non-résidents ?
Je rappelle qu’en l’espace d’une vingtaine d’années, le nombre de Français établis hors de France a plus que doublé, pour s’évaluer à plus de 3,5 millions. Historiquement, nous avons une double casquette sur l’activité internationale. En premier lieu, nous sommes présents dans une dizaine de pays afin d’accompagner les Français de l’étranger qui, de manière temporaire ou pour une période indéterminée, s’expatrient pour des raisons professionnelles ou personnelles. Cette ramification internationale nous permet également de suivre et conseiller les enfants de nos clients, qui font des études à l’étranger ou s’y installent à l’issue de leur cursus académique.
Afin de répondre à la technicité des besoins de cette clientèle étrangère, nous proposons des solutions dédiées façonnées, notamment, par notre filiale de courtage de produits assurantiels au Luxembourg, la société CGEFI. Les acteurs du groupe à l’origine de Laplace conseillaient une clientèle internationale importante installée à l’étranger. Ils disposent dorénavant d’une palette d’outils élargie.
Avez-vous une équipe spécialisée sur ces sujets ?
Le conseiller à la base de la relation client dispose de supports techniques et de compétences internes, notamment pour leur clientèle internationale. Notre Groupe dispose d’une des plus importantes équipes d’ingénieurs patrimoniaux, composée de vingt-cinq personnes, dont les compétences en matière de fiscalité internationale, mais aussi de problématiques juridiques transfrontalières est unique. Elle travaille de concert avec les cinq seniors advisors de notre département Gestion privée, au service de nos 180 conseillers.
Le département de Gestion privée épaulée par l’ingénierie patrimoniale constitue une task force au service de chaque problématique complexe. Le haut niveau de technicité de nos collaborateurs, disposant d’un solide bagage académique, ayant pour certains exercés la profession d’avocat, juristes de renom, travaillant au sein d’une équipe soudée, insuffle un dynamisme revigorant. Nous posons les bonnes questions, nous construisons des solutions, souvent, aussi, en parfaite coordination avec les conseils professionnels du droit et du chiffre de cette clientèle exigeante.
Quelles sont les principales préoccupations des non-résidents en matière de gestion de patrimoine ?
Sur le plan fiscal, l’incompatibilité des différents systèmes est certainement la problématique la plus commune. Ce qui pourrait être considéré comme la panacée dans un pays peut s’avérer être un cauchemar dans un autre. Il faut ainsi pouvoir donner un conseil avec des instruments "passeportables" d’un État à un autre, afin de réussir à résoudre la quadrature du cercle en fonction des objectifs qui nous sont donnés.
"L’incompatibilité des différents systèmes est certainement la problématique la plus commune"
Nous jouissons par ailleurs en France d’une bonne protection sociale, ce qui n’est pas le cas, loin s’en faut, dans tous les pays. Le non-résident doit alors pourvoir s’aménager l’épargne nécessaire afin de couvrir ses besoins futurs de revenus et aussi assurer sa protection sociale. Notre département d’ingénierie sociale est d’un recours précieux sur ces sujets.
Nous pouvons également être confrontés à des problématiques juridiques, puisque le droit qui va régir une succession n’est pas le même d’un pays à l’autre. Nous devons éviter les conflits entre les héritiers et nous mettre dans les meilleures conditions par rapport aux objectifs des clients et à la configuration de leur famille. Nous pouvons par exemple aujourd’hui définir la loi sous l’empire de laquelle une succession au plan civil sera réglée. L’instrument testamentaire, fort utile, est un des outils qui, combiné à d’autres, adresse la succession là où nos clients le souhaitent.
En matière d'allocation d'actifs et d'investissements, observez-vous des différences entre résidents et non-résidents ?
La différence fondamentale repose sur la devise des actifs. Le choix de la monnaie est guidé selon la zone géographique où l’on se situe, de sa devise correspondante et de la destination de son investissement. De manière générale, et indépendamment de toute volonté spéculative, il faut raisonner dans la devise où la dépense doit avoir lieu. Imaginons que je travaille aux États-Unis mais que je compte prendre ma retraite en France ; alors il faudra épargner en vue d’une dépense en euros et gérer les flux en considération de la fluctuation de la parité euro-dollar. Pour des devises faibles, il est prudent d’épargner quoi qu’il arrive en monnaie forte.
"Il faut toujours raisonner dans la devise où la dépense doit avoir lieu"
Si les problématiques locales de taux et d’inflation constituent d’autres éléments à prendre en compte, l’allocation d’actifs globale entre un non-résident et un résident est identique à profil de risque comparable.
Précisons que l’IFI, dont les non-résidents sont redevables sur leurs actifs immobiliers détenus en France, peut perturber l’allocation. Et les conventions fiscales visant l’ISF, couvrant en principe l’IFI, sont peu nombreuses pour permettre d’éliminer totalement, le cas échéant, la double imposition.
Quelles différences observez-vous entre résidents et non-résidents ?
Beaucoup de non-résidents bénéficient d’une enveloppe disponible nette après impôt bien supérieure à ce que l’on connaît en France. C’est une des raisons pour lesquelles certains d’entre eux ne souhaitent pas revenir. C’est un frein au retour hexagonal malgré le régime des impatriés, applicable aux seuls salariés.
Propos recueillis par Marc Munier