Membre de l’ORSE, l’Observatoire de la RSE, Esperanza Duval Galache, responsable de l’engagement sociétal chez Covéa, et Lydie Recorbet, chargée de missions au sein de l’association, apportent leur éclairage sur une tendance mise en lumière par une étude récemment menée par BNY Mellon Investment Management, le fossé entre l’investissement des femmes face à celui des hommes.

Décideurs. Si les femmes investissaient autant que les hommes, cela représenterait plus de 3 000 milliards d’actifs sous gestion en plus d’investis. Quels sont les facteurs qui pourraient expliquer cet écart ?

Lydie Recorbet.  L’un des facteurs prédominants et qui explique en partie ce phénomène est la peur du risque et de la prise de risque de la part des femmes qu’on leur a inculquée. Leur place au sein des marchés financiers, notamment dans la profession, est bien plus effacée que celle des hommes. Le fait que, culturellement, les femmes se considèrent et soient considérées comme moins habiles avec les chiffres et, par conséquent, avec l’argent marque l’écart des investissements que met en lumière cette étude. De ce fait, les femmes vont moins vers ces métiers, donc sont d’autant moins jugées compétentes. In fine, leur relation à l’argent s’en ressent. C’est un cercle vicieux. Il est devenu de plus en plus difficile de se faire une place sur le marché de la finance du fait de stéréotypes et d’autocensure.

Quelles sont les thématiques que les femmes privilégient ?

L. R. Leurs investissements sont principalement concentrés dans le domaine du "care" au sens large, avec un attrait sur les questions environnementales, sociales, durables et à impact positif. Les fonds investissant sur les thématiques de la parentalité liée à l’enfance, aux soins, ainsi que les secteurs d’activité liés à la mode et la cosmétique plaisent beaucoup également car elles s’y sentent plus légitimes. 

"Il faut démystifier l’investissement des femmes pour qu’elles se sentent compétentes"

Esperanza Duval Galache. Globalement, les femmes cherchent à investir sur des secteurs qui ont du sens. Par exemple, la MAAF est partenaire de l’événement "Be a boss", qui vient mettre en lumière les cheffes d’entreprises. L’objectif de ces événements est d’accompagner toutes les dirigeantes, notamment dans les métiers du numérique et des start-up car ce sont des secteurs où il y a un déficit de femmes.   

Comment les acteurs de la place financière pourraient-elles agir afin de pousser les femmes à investir davantage ?

E. D. En tant qu’assureur, nous nous plaçons sur l’accompagnement social. Nous apportons une attention particulière aux choix des partenaires et à leurs valeurs. Au sein des investissements, nous agissons au travers de l’intégration des critères ESG, ainsi nous fléchons nos investissements en particulier vers des entreprises socialement responsables, et celles gérées par des femmes en font partie.

L. R. L’un des leviers des investisseurs est d’attirer les femmes sur les domaines qui les intéressent, mais ce n’est que la moitié d’un levier. Il faut également démystifier l’investissement des femmes pour qu’elles se sentent compétentes. La montée en confiance, en compétences, les comprendre, ne pas être dans un sexisme bienveillant. Cela doit se faire dès le plus jeune âge. Nous souhaitons aller vers une optique d’acquérir plus d’autonomie financière et d’indépendance. La déconstruction des stéréotypes est indispensable pour réussir à percer les plafonds de verre.

Propos recueillis par Marine Fleury

 

Pour en apprendre un peu plus :

Les normes masculines en entreprise, Sylviane Giampino et Brigitte Grésy

Les réseaux féminins en entreprise, Hélène Sabatier et Lydie Recorbet 

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