L’année 2018, restera dans les mémoires comme un exercice difficile pour les sociétés de gestion d’actifs. Pourtant, confiant sur la capacité de ses fonds à rebondir, DNCA met l’accent sur leur conformité aux exigences liées à l’investissement socialement responsable (ISR). Retour sur l’actualité de la société avec Éric Franc, son directeur général.

Décideurs. Quelle actualité anime le groupe DNCA ?

Éric Franc. Récemment, notre groupe a pris la décision de rendre trois de ses fonds conformes aux critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). L’un d’eux, le fonds Global Leaders, n’a pas connu de changement majeur. Son gérant, Rajesh Varma, a depuis toujours adopté des décisions qui prennent en compte les critères ESG, en favorisant notamment des entreprises en conformité avec les normes ISR. En revanche, pour les deux autres fonds concernés par ces dispositifs, le fonds infrastructures et le fonds dividendes, cette transition a impliqué une mise en œuvre plus importante. Notre actualité s’accompagne également du lancement de trois fonds au sein d’une gamme ISR dite « DNCA Invest Beyond ». Le premier d’entre eux sera un fonds diversifié, un modèle encore peu présent sur le marché ESG. Ce projet se distingue par sa capacité d’évolution de 0 à 50 %. Le second sera un fonds blend, constitué d’actions européennes. Enfin, le dernier sera un fonds obligataire.

Quel moteur a initié cette transition ESG ?

Bien que DNCA ne souhaite pas que l’ensemble de la société soit estampillée ISR, l’entreprise a su répondre aux nouvelles demandes formulées par ses clients institutionnels. Ces derniers attendent désormais de pouvoir travailler avec un gérant capable de combiner son talent de gestionnaire de convictions avec une approche ESG concrète. En dehors du fonds DNCA Invest Beyond Global Leaders géré selon une philosophie ISR, les deux autres fonds n’étaient pas en concordance totale avec ces normes. Afin de remédier à cette carence, nous avons fait le choix de nous entourer d’une équipe d’analystes ESG ayant une expérience solide sur le sujet en procédant à deux recrutements.

Comment percevez-vous la forme actuelle des marchés ?

La période actuelle connaît des performances peu satisfaisantes. Si les gérants valus et les gérants d’actions européennes ont traversé une mauvaise passe en 2018, les acteurs globaux ont doublement souffert du fait de leur exposition aux pays émergents. Ce phénomène est le résultat des différentes problématiques mondiales qui affectent le marché, telles que les guerres commerciales, la montée du populisme que certains États connaissent, ou encore les différentes conjonctures européennes.

Partant de ce constat, quelles sont vos perspectives pour le premier trimestre 2019 ?

À mon sens, l’environnement sera favorable pour les stocks-pickers pour qui la macro-économie n’est pas essentielle. Il sera nécessaire de se tourner vers des valorisations faibles. Mais un constat indéniable s’impose. La valorisation d’un certain nombre d’entreprises ne reflète pas objectivement la réalité. Si l’on se tourne vers les sociétés non-cotées, on constate au contraire que les multiples de valorisation sont particulièrement élevés, avec une quantité importante de cash à écouler. Alors que l’environnement n’est pas favorable, DNCA reste confiant sur la capacité de rebond des valeurs comprises dans ses portefeuilles.

Que pensez-vous du mouvement de consolidation du secteur ?

Aujourd’hui, on peut distinguer dans le secteur de la gestion d’actif deux stratégies antinomiques. De fait, les acteurs majeurs du marché jouent à la fois sur l’effet de la taille, en cherchant à être toujours plus importants, mais également sur l’économie de frais. À l’inverse, certains adoptent une stratégie dite multi-boutiques, qui présente l’inconvénient d’être plus longue à mettre en place. Le rachat des gérants suppose d’être vigilant, de façon à maintenir une gestion autonome de ladite boutique afin d’écarter tout risque d’ingérence de l’actionnaire. À titre d’exemple, chez DNCA le sujet sur lequel Natixis est particulièrement vigilant concerne les questions de conformité au risque. Désormais, il est indiscutable qu’une bonne gestion implique que l’actionnariat de chaque société adopte cette philosophie et cette manière de fonctionner. A contrario, un groupe prépondérant sur le marché qui opère le rachat de boutiques de taille moins importante, est le plus souvent animé par l’intention de les absorber. Le risque de cette politique, dans un secteur où la nature humaine est prépondérante, consiste à vider la structure de sa substance. Enfin, la nouvelle réglementation Mifid II n’est pas sans effet sur la consolidation du secteur en ce qu’elle impose la limitation de l’architecture ouverte. Le groupe DNCA a connu la possibilité de se développer grâce à ce système, un actionnaire prépondérant sur le marché étant nécessaire pour offrir à une société la possibilité d’avoir une force de distribution suffisamment conséquente. Grâce à ce modèle d’actionnariat, DNCA a su se positionner comme un acteur solide sur différents marchés comme l’Espagne, la Suisse et l’Amérique du Sud sachant que ses marchés historiques étaient et sont la France, l’Italie et le Bénélux. L’abondance et le poids des nouvelles réglementations, empêchera à terme la création d’entreprises de petite taille, aboutissant inéluctablement à un mouvement de concentration entre elles.

Propos recueillis par Yacine Kadri

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