À la tête de la foncière aux 9,7 milliards d’euros de patrimoine, Olivier Wigniolle porte la transformation du groupe Icade en mettant l’accent sur l’innovation et un écosystème de travail transversal qui s’incarneront dans son nouveau siège, un hub collaboratif à Issy-les-Moulineaux.

Décideurs. À quoi reconnaît-on une entreprise « libérée » ?

Olivier Wigniolle. Toute entreprise se construit sur des valeurs, une vision, mais aussi sur une organisation qui lui permet de se structurer pour maximiser son efficience. Lorsque l’environnement de l’entreprise évolue très vite, les atouts d’hier peuvent se révéler des faiblesses aujourd’hui. Nous vivons une période de mutation profonde, du fait de la révolution digitale, mais aussi des enjeux environnementaux, des chocs géopolitiques à répétition, de la volatilité extrême des marchés financiers, de l’arrivée sur le marché du travail de collaborateurs plus jeunes aux attentes et aspirations très différentes… Les entreprises sont très fortement impactées par ces mutations ; elles se doivent de réagir sous peine de disparaître. Face à cette montée brutale concomitante du sociétal et du digital, celles-ci doivent se « libérer » de leurs modes d’organisation et de pensée anciens. L’entreprise libérée est donc celle qui arrive à se régénérer et à réinventer son modèle. Modes collaboratifs de management, innovation, place de la RSE ou modes d’occupation de l’espace sont des critères qui permettent de qualifier une entreprise de « libérée » (d’elle-même !).

 

Quels sont les avantages liés à ce type d’organisation et les risques qui en découlent ?

En termes de management et d’organisation, si les avantages semblent évidents, ces transformations ne sont pas exemptes de risques. La « flat » hiérarchie, le travail en mode projet, le management intergénérationnel (Accor, Icade et d’autres ont mis en place des Y board) et l’environnement de travail « dynamique » sont autant de facteurs clés de performance pour l’entreprise de demain. L’innovation est souvent la première étape de la « libération ». Chez Icade, nous avons ainsi créé un collège de l’innovation, totalement « a-hiérarchique » pour inviter celles et ceux qui avaient le désir de s’investir, à le faire. Les collaborateurs les plus jeunes sont en demande d’un état d’esprit plus ouvert et d’un management plus direct. Leurs attentes sont différentes de celles des générations précédentes et ils n’hésitent pas à challenger l’entreprise et à remettre en cause certains principes d’organisation. Les managers doivent en tenir compte. Les générations Y et Millenium s’impliquent par envie et non par devoir. L’entreprise libérée est aussi celle qui saura réussir l’alchimie entre les générations.

 

Comment s’organise le pouvoir dans une entreprise libérée ? Le leadership peut-il s’exercer hors d’une structure hiérarchisée ?

Il n’y a plus besoin de pouvoir dans l’entreprise libérée, mais celle-ci a besoin d’un leader, capable de porter une vision pour « embarquer » les collaborateurs. La difficulté est que ces qualités ne s’apprennent pas de manière magistrale dans les grandes écoles ! Si diriger, c’est avant tout décider, la décision devient de plus en plus partagée. Enfin, le collaboratif et la suppression d’échelons hiérarchiques ne signifie pas absence d’organisation ou d’organigramme ; un système d’organisation matriciel viendra très utilement favoriser la transversalité.

 

Quelles sont les qualités essentielles d’un leader au sein d’une organisation libérée ?

L’exemplarité, l’accessibilité et le courage. Et le leadership managérial se doit d’être accompagné d’une profonde dose d’humanisme sous peine d’être dénué de sens et de portée. Souvenons-nous de Jean Bodin : « Il n’est de richesse que d’hommes ».

 

Propos recueillis par Laetitia Sellam

 

GUIDE ET CLASSEMENTS

> Guide 2024

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail

{emailcloak=off}