Patronne des deals chez BNP EMEA, Sophie Javary reconnaît que l'activité transactionnelle a ralenti ces derniers mois. Ses équipes ne dérivent pas pour autant de leurs objectifs de croissance.

Décideurs. Les dix-huit derniers mois ont été plutôt favorables au M&A. Partagez-vous ce ressenti du marché ?

Sophie Javary. L'année 2015 a connu une augmentation du rythme et de la taille des opérations de fusions-acquisitions. Depuis 2016, le marché rencontre une stagnation, voire une légère baisse en Europe où les volumes se sont compressés de 7 % par rapport à l'an passé sur la même période. Ce ralentissement surprend les analystes qui, pour la plupart, tablaient sur une croissance de 5 % à 10 %. D'une part, il y a eu moins de grosses transactions, et d'autre part, la région britannique – qui représentait 41 % des volumes en 2015 – a subi un certain attentisme des investisseurs en raison du Brexit. 

 

Décideurs. Et vous ne pouvez pas compter sur le marché ECM pour compenser la baisse des rapprochements entre sociétés en cette première partie d'année ?

S. J. Pour l'ECM (Equity Capital Market), on peut parler d'une véritable contraction des volumes. Elle est d'abord due à une raréfaction des introductions en Bourse, a fortiori lorsqu'elles sont d'ampleur significative. Le début d'année a été très chahuté mais aujourd'hui cela va un peu mieux. Pour autant, nous allons devoir redoubler d'efforts afin de relancer durablement la machine.

 

Décideurs. Tendances générales de marché mises à part, quelle est votre position dans l'environnement très concurrentiel des banquiers d'affaires ?

S. J. Nous faisons partie des dix ou douze premières maisons de conseil M&A en Europe. Et cela sans même avoir bénéficié des jumbo deals accompagnés par certains de nos concurrents. Je pense au rapprochement entre Nokia et Alcatel ou encore à la réorganisation du Crédit agricole, cette dernière opération ayant été créditée au profit de sa propre banque d'affaires. 

Concernant l'ECM, nous atteignons la neuvième place sur le plan européen et restons leader sur le marché domestique avec des parts de 15 %, tout cela dans la continuité de la croissance réapparue en 2015. Pour les mois prochains, s'il est toujours difficile de se lancer dans le jeu des pronostics, je crois que la stabilité des marchés devrait présager le retour des IPO. 

 

Décideurs. Vous supervisez l'activité corporate finance en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique. Comment articulez-vous la stratégie globale de la banque aux spécificités locales de chacune de ces régions ?

S. J. Rapporté à l'ambition de rester l'un des leaders de la banque d'investissement, l'enjeu est d'accroître notre part de marché en dehors de France. Nous sommes très bien implantés en Espagne ainsi qu'en Italie. Le cap doit être mis vers le développement de business en Allemagne et au Royaume-Uni. La réalisation de ces objectifs passe par le recrutement d'experts sur place. Par ailleurs, il ne faut pas négliger les zones plus éloignées concourant à la force de notre réseau : nos équipes à Dubai et en Europe de l'Est constituent un élément de différenciation qui compte pour nos clients.   

 

Décideurs. Les ressources humaines sont clés dans l'animation d'un tel spectre géographique. Quelle est la meilleure gouvernance ?

S. J. L'équipe de direction est assez resserrée. Le pilotage de cette activité se fait à la fois en termes d'engagements financiers qui sont pris par les différentes équipes et par le suivi d'un pipeline d'opportunités au plus près des clients. Tout cela s'inscrit dans un plan de développement à moyen terme (2016-2019) présenté par le département Corporate & Investment Banking et au sein duquel nous avons nos propres lignes directrices à suivre : à son terme, il est question de croissance des revenus ou, à défaut de contexte économique favorable, de hausse des parts de marché de BNP Paribas. La réduction de notre base de coûts et les défis liés à la digitalisation forment également le cœur de ce plan.    

 

FS

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