Pour le managing director de BofA Merrill Lynch, la France conserve de grandes sociétés industrielles.
Décideurs. Après les nombreuses opérations du premier semestre 2014, comment envisagez-vous la fin de l’année et 2015?
Stéphane Courbon.
Nous assistons au redémarrage du marché primaire actions, qui offre une nouvelle porte de sortie pour les sponsors et les entreprises et alimente l’activité en fusions-acquisitions. Les taux d’intérêt sont bas, les financements accessibles, les sociétés ont assaini leur bilan et le cours des actions se situe souvent à un niveau élevé. Comme les conditions sont bonnes, les questions stratégiques portent en particulier sur l’émission d’actions et le bon moment d’en émettre pour financer une grosse acquisition, ou bien sur la vente d’actifs non stratégiques. En ce qui concerne le leverage, l’expérience des dernières années et le ralentissement de la croissance font parfois hésiter les entreprises qui envisagent d’augmenter de manière importante leur endettement et d’avoir recours à des financements de type LBO. D’autres en revanche, comme Numericable ou plus récemment Iliad, n’hésitent pas à mettre en place des financements agressifs. La décision sur des acquisitions de taille moyenne financées entièrement en cash et sans impact important sur le bilan est elle beaucoup plus facile. Pour les acquisitions vraiment importantes voire stratégiques, il est toujours plus difficile de définir une tendance car ce sont avant tout des histoires d’hommes. Quoi qu’il en soit, aujourd’hui les entreprises ont la capacité d’émettre des actions.
En ce qui concerne leur dimension géographique, les perspectives de diversification ont évolué. La vague des acquisitions dans les pays « émergents » s’est calmée. Dans ces pays, depuis 2013, l’existence du risque de change et sa perception ont augmenté, freinent les investissements et entraînent une réflexion sur des méthodes de hedging naturel. Aujourd’hui, les marchés historiques comme les États-Unis et l’Europe font donc naturellement leur grand retour.

Décideurs. Comment percevez-vous votre rôle aujourd’hui sur ces marchés vis-à-vis de vos clients, quelle place tenez-vous par exemple dans l’origination des deals ?
S. C.
Les clients connaissent leurs marchés mieux que personne. Nous apportons bien sûr une connaissance sectorielle et une analyse des acteurs et des tendances mais ce n’est pas suffisant. Notre vraie valeur ajoutée consiste à fournir à nos clients les éléments et l’analyse nécessaires à la prise de décision, à trouver le moment propice pour agir et à les aider à entamer des grandes évolutions stratégiques voire à y renoncer. Nous proposons une intelligence de situation, sur le timing, les hommes et le financement, car souvent les cibles sont connues.

Décideurs. Bank of America Merill Lynch a été récompensée lors des Trophées Leaders de la Finance en tant que meilleure banque d’affaires sur le secteur industrie. Qu’est-ce qui a fait la différence selon vous et comment percevez-vous ce secteur aujourd’hui ?
S. C.
Nous avons été impliqués sur la plupart des opérations des deux dernières années et l’industrie a toujours été un secteur important pour nous. On entend souvent les gens s’alarmer sur la désindustrialisation. C’est peut-être vrai pour les PME, mais la France conserve de grandes sociétés industrielles et ces sociétés sont le plus souvent des leaders mondiaux. Prenez Schneider, Safran ou Valeo par exemple. Nous n’en sommes pas assez fiers ! Dans ce contexte, l’industrie restera donc un secteur privilégié pour BAML, tout comme d’autres secteurs dans lesquels nous sommes déjà très présents : les télécoms, les médias, le luxe, l’énergie, la distribution, etc. La France a de très belles sociétés. Elle a peut-être du retard sur les PME, en comparaison avec l’Allemagne par exemple, ce qui limite sans doute sa capacité à faire naître les leaders de demain, mais peu de pays possèdent autant de leaders mondiaux.

Décideurs. Quel est le projet stratégique à cinq ans pour BAML ?
S. C.
Au niveau global, nous avons déjà reçu beaucoup de prix, nous avons ainsi reçu les trophées de Best Investment Bank 2014 et Best Global Transaction services Bank 2014 de la part d’Euromoney. C’est la première fois qu’Euromoney attribue ces prix à la même banque. Aux Trophées Leaders de la Finance aussi, notre expertise a été reconnue par nos pairs depuis plusieurs années déjà : Trophées d’or en marché de capitaux en 2013 et en fusions-acquisitions pour le secteur industrie en 2014. Cela démontre le chemin parcouru par la banque depuis la fusion, et la qualité de nos services. Notre objectif, pour les prochaines années, est d’être dans le top trois partout, aussi bien d’un point de vue géographique que sectoriel. En France, le marché est très concurrentiel. Les banques sont nombreuses et BAML est encore dans une phase de croissance. Mais si beaucoup de banques, suite à la crise, cherchent leur business model, ce n’est pas notre cas. Cela nous permet de continuer à nous développer notamment dans les secteurs healthcare, infrastructure et assurance où nous venons de faire plusieurs recrutements. Nous continuons ainsi à prendre des parts de marché et grâce à cela, nous espérons être en mesure de nous positionner sur chaque grand dossier de la place.

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