Le milliardaire italien, président du conseil d’administration d’EssilorLuxottica s’est éteint à Milan à l’âge de 87 ans. Retour sur la success story d’un dirigeant qui aura marqué le marché de l’optique.

Un self-made man passé des bancs de l’orphelinat au rang de grande fortune italienne et de milliardaire visionnaire. Voici comment résumer en une phrase l’existence de Leonardo Del Vecchio. On le dit visionnaire et intuitif, généreux avec ses employés, à qui il offrira 9 millions d’euros en actions à l’occasion de ses 80 ans, intraitable avec ses bras droits, mais aussi discret, voire mystérieux. Entrepreneur de talent parti de rien, fondateur et président exécutif de Luxottica, champion de la monture de lunettes coté à la Bourse de Milan et à celle de New York, propriétaire de category killers comme Persol, Ray Ban et Oakley et fournisseur de marques telles que Chanel, Armani et Versace, l’homme était également à la tête du conseil d’administration d’EssilorLuxottica, le leader mondial de l’optique (verres correcteurs, montures et lunettes de soleil) né de la fusion avec le Français Essilor. Le tout, sans diplôme ni réseau.

Success story à l’italienne

De quoi transformer le parcours de Leonardo Del Vecchio en authentique success story à l’italienne, et lui-même en parfait symbole de revanche sociale. Dernier né d’une fratrie de quatre garçons, orphelin de père et confié à un orphelinat dès son plus jeune âge, il commence à travailler à quatorze ans dans une petite fabrique de montures, tout en suivant des cours du soir pour s’initier au  design. En 1958, il ouvre son propre atelier de montures de lunettes à Agordo, en Vénétie. Trois ans plus tard, celui-ci compte une dizaine d’employés et devient Luxottica. Leonardo Del Vecchio a vingt-cinq ans. Il faudra une décennie à la toute jeune entreprise pour commencer à produire pour son propre compte et dix de plus pour qu’elle prenne pied sur le marché américain et, de là, connaisse une croissance fulgurante à l’international, portée par la volonté d’un fondateur reconnaissant lui-même avoir toujours "détesté dépendre des autres". D’où sa stratégie d’intégration verticale qui, au fils des ans, le conduira à multiplier les rachats autant que les ouvertures de filiales, et à faire de son groupe un géant de 82 000 salariés et 7 000 points de ventes dans le monde.

"Empire de l’optique"

Jusqu’au coup de théâtre : le rapprochement avec le français Essilor, numéro un mondial du verre correcteur et pionnier dans le domaine des technologies appliquées à l’optique. Une opération présentée comme une  "fusion entre égaux" qui avait suffisamment inquiété les autorités de la concurrence pour que celles-ci mettent des mois à donner leur accord, permettant ainsi la création d’un véritable empire de l’optique. Une multinationale de 150 000 salariés et de 16 milliards d’euros de chiffre d’affaires qui, à elle seule, contrôlerait désormais 15 % du marché mondial de l’optique.

Turnover…

Voilà pour le côté exemplaire. Côté obscur, il y aura bien sûr les démêlés avec le fisc, comme ceux qui, en 2009, lui vaudront une amende de 300 millions d’euros pour évasion fiscale et une instabilité remarquée, ces dernières années, à la tête du groupe dont démissionneront pas moins de trois directeurs généraux en dix-sept mois pour cause de désaccord avec le fondateur. Un turnover qui conduira ce dernier à reprendre les rênes du groupe en janvier 2016 sans pour autant désigner l’un de ses six enfants, nés de trois unions différentes, à la tête de l’entreprise. Motif invoqué : il ne les "condamnerait jamais à diriger une société aussi grande". Dont acte.

Olivia Vignaud

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