L'Apeci est un think tank qui réunit des dirigeants de réseaux, de plateformes de distribution, de compagnies d'assurance, de sociétés d'asset management. Son président, Stéphane Vidal, nous fait part des positions de l’association sur les grands changements qui animent le marché de la gestion de patrimoine.

Décideurs. Quelle est la finalité de l’Apeci ? Comptant une cinquantaine de personnes, a-t-il vocation à accueillir de nouveaux membres ?

Stéphane Vidal. Nous sommes prêts à accueillir de nouveaux distributeurs ayant un axe différent de ceux déjà présents. Un numerus clausus a cependant été mis en place pour les assets managers. Notre priorité est de conserver notre agilité. L’association propose à ses membres une zone d’échange portant sur l’évolution de notre métier et du contexte dans lequel nous évoluons. Notre prochain séminaire portera par exemple sur les différents modèles de distribution et leur avenir. Faut-il privilégier un modèle intégré ? En architecture ouverte ? Il sera intéressant d’analyser les avantages et inconvénients de chaque solution. Nous travaillerons également sur les nouvelles compétences (soft skills) auxquelles il faut s’intéresser pour accompagner le développement de nos entreprises dans un monde qui évolue en permanence, avec un changement notable des modes de consommation, de communication, et de savoir être.

Votre action ne vient-elle pas interférer avec la communication d’associations comme France Invest ou l’Association française de gestion ?

Au contraire, je pense que nous sommes capables de nourrir notre réflexion avec l’ensemble des acteurs. Notre intérêt est de soutenir la croissance des sociétés indépendantes. Au sein de l’Apeci, tous les métiers sont représentés. C’est un réel avantage. Nous souhaitons simplement échanger sur la conduite de nos entreprises respectives et faire évoluer notre métier et nos savoir-faire dans le temps. Je dirais même que nous sommes à la disposition des autres associations pour leur faire part de nos expériences. Il est, à cet égard, assez rare d’avoir une association aussi transparente et bienveillante que la nôtre.

"Notre intérêt est de soutenir la croissance des sociétés indépendantes" 

Doit-on craindre un recul de l’architecture ouverte, pourtant une des grandes avancées apportées aux clients par l’essor des conseillers en gestion de patrimoine ?

L’objet de notre atelier au mois de mai ! Il y a deux écoles qui cohabitent :

La première qui prône l’architecture complétement ouverte est intellectuellement le meilleur des concepts auprès de nos clients. L’objectif étant alors d’aller chercher le meilleur produit, sans aucun biais décisionnel. Toutefois la rationalisation du nombre de partenaires producteurs semble être une tendance forte.

Cela permet également de conserver une configuration en ressources humaines, en moyens à mettre en œuvre (fonds propres réglementaires, règles de compliance et contrôle interne de la gestion) plus légère.

La deuxième école part du principe que le coût de la distribution augmente sous l’effet conjugué des investissements massifs de la digitalisation, nécessaires à une relation client de bon niveau, et des nouvelles règles de compliance très consommatrices de temps et de moyens humains. Le fait de pouvoir verticaliser la production / commercialisation est économiquement une bonne chose pour ces entreprises qui peuvent dans ce cas continuer à investir dans les solutions et les services au bénéfice de leurs clients.

D’autre part, la réglementation oblige à toujours plus de transparence et de maitrise des process opérationnels. La supervision complète de la chaine de valeur peut être vue comme un véritable atout dans la relation client.

Quel regard portent les membres de l’Apeci sur la réforme du système de retraites actuellement en discussion ?

Cette réforme nous aide à promouvoir l’intérêt d’une épargne longue auprès de nos clients. Dans ce monde régi par l’instantanéité, il est essentiel de faire preuve de pédagogie et d’aider nos clients à faire fructifier leur patrimoine sur le long terme. Les principaux acteurs du monde de l’épargne, les politiques mais aussi la presse portent un discours désormais en cohérence sur cette thématique. Tous s’accordent à dire qu’on ne peut plus gérer une épargne de long terme comme un placement sur le court terme.

"C’est maintenant que l’on verra les PER les plus différenciants et performants"

La loi Pacte fut quasi unanimement saluée par les professionnels de la gestion de patrimoine. Certains voient même en elle un véritable game changer. Quels sont les premiers retours des membres de l’Apeci sur la commercialisation du Plan d’épargne retraite (PER) ?

Le gouvernement a très bien communiqué sur le sujet. L’ensemble des acteurs de l’épargne a ensuite pris ce thème à bras le corps. Mais le meilleur reste à venir. C’est maintenant que l’on verra les PER les plus différenciants et performants. Autrement dit, ceux qui proposeront les offres les plus pertinentes en matière de gestion à horizon et de prise en compte du temps dans le placement. Je pense notamment à l’intégration de classes d’actifs de long terme comme le private equity ou autres classes d’actifs complémentaires permettant une décorrélation entre les différentes typologies d’investissement.

On parle beaucoup de la fin de l’ère du tout fonds en euros. Quelles sont les alternatives proposées aux épargnants ?

Une énorme majorité des encours placés en assurance-vie le sont encore sur des fonds en euros. En pratique, il est le placement privilégié des Français bancarisés. La répartition n’est absolument pas la même chez les acteurs indépendants.

L’époque où les épargnants disposaient d’un rendement très correct, d’une garantie permanente du capital et d’une totale liquidité au sein d’un même support est désormais révolue. Il ne faut cependant pas tuer le fonds en euros. Il faut simplement se faire à l’idée qu’il ne sera plus créateur de performance. Nous allons donc donner une seconde vie au fonds en euros : il doit participer à la fabrication des nouvelles solutions innovantes ! La « richesse » du fonds en euros, représentant plus de 1 300 milliards d’euros, doit nous aider, avec le concours des assureurs, à démocratiser certaines classes d’actifs, telles que le private equity, la private debt ou les investissements dans les infrastructures. La couverture de solutions en actifs cotés est aussi une force qui peut être mise à profit par les assureurs grâce cette richesse.

Propos recueillis par Aurélien Florin (@FlorinAurélien)

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