Emmanuel Macron compte sur le projet de loi de Finances pour redorer son image. Du côté du gouvernement, le message est clair : le budget 2019 sera celui du pouvoir d’achat. Selon l’exécutif, six milliards d’euros seront reversés aux ménages français. Mais, à y regarder de plus près, ce chiffre paraît trompeur. Inquiétant ?

Entre une croissance économique atone et une opinion publique défavorable, le gouvernement connaît une rentrée difficile. Pour sortir la tête de l’eau, l’exécutif mise beaucoup sur le projet de loi de Finances pour 2019. Alors que celui de l’an dernier avait donné l’image d’un Président des riches avec la suppression de l’ISF, cette édition doit être celle du pouvoir d’achat. Ainsi, selon le gouvernement, les ménages gagneront 6 milliards d’euros. Ce montant comprend 4 milliards d’euros dus à la baisse des cotisations sociales des salariés, 3,8 milliards d’euros au titre de la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des Français et 700 millions d’euros pour l’exonération de cotisations salariales des heures supplémentaires. À cela, il faut retirer les nouvelles taxes sur les carburants (2 milliards d’euros) et sur le tabac (500 millions d’euros).

3,5 milliards d’euros

En réalité, le gain devrait être plus faible. En effet, le gouvernement avait déjà comptabilisé une partie de la baisse des cotisations sociale lors du budget précédent. Il faut également ajouter le gel des pensions, des APL et des allocations sociales qui va peser sur le pouvoir d’achat des Français. En août dernier, l’Elysée avait décidé de décorréler leur revalorisation de l’inflation. Ainsi, alors que ces prestations augmenteront de 0,3 %, la hausse des prix à la consommation devrait être comprise entre 2 % et 2,5 % en 2018. Pour l’OCDE, le pouvoir d’achats ne progressera que de 3,5 milliards d’euros. Un chiffre bien loin donc des 6 milliards d’euros annoncés en grande pompe par le gouvernement.

Cette hausse sera-t-elle suffisante pour relancer la consommation des ménages français et, in fine, la croissance ? Pas sûr, car ce « pactole » est loin d’être répartie équitablement. Les grands gagnants sont les salariés issus de la classe moyenne. Or, pour ces tranches de revenu, une légère progression de leur rémunération n’entraîne pas automatiquement une augmentation de leur consommation. Il y a un fort risque que ce cadeau fiscal se tourne plutôt vers l’épargne. À l’inverse, les retraités aux hauts revenus, qui dépensent plus facilement, sont les grands perdants de ce budget. L’autre inquiétude porte sur les classes défavorisées qui, avec le gel des allocations et la hausse des taxes sur l’essence et le tabac, seront fortement impactées. Ce sont pourtant eux qui sont le plus à même de transformer du pouvoir d’achat en consommation.

Un avenir incertain

L’exécutif joue gros. Si la consommation ne repart pas, l’année prochaine, il n’aura plus de marge de manœuvre. Et pour cause, le déficit public atteindra déjà 2,8 % du produit intérieur brut (PIB) en 2019. Quant à la dette, elle s’élèvera à 98,7 % du PIB. Dans le même temps, l’OCDE a revu ses prévisions de croissance à la baisse passant de 2 % à 1,6 %. Si la France est sortie de la procédure de surveillance pour déficit excessif (supérieur à 3 %), elle reste dans le collimateur de Bruxelles qui craint un nouveau dérapage. Au gouvernement, on demeure néanmoins confiant. Selon Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie et de Finances, la fin de la transformation du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en 2020 devrait permettre au déficit public de redescendre à 1,4 % du PIB. Encore une histoire de chiffre…

Vincent Paes

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