Co-fondateur d'Astorg Partners, Thierry Timsit revient sur la longue histoire de Sebia, le leader mondial du diagnostic in vitro, avec le capital-investissement. Astorg et Montagu viennent de réaliser une belle vente auprès du trio CVC-Téthys-CDPQ.

Dealmakers. Avant d'être une belle sortie de portefeuille, Sebia c'est d'abord une longue aventure entrepreneuriale que vous avez soutenue durant de nombreuses années. Pouvez-vous revenir sur la croissance rapide du leader mondial du diagnostic in vitro ?

Thierry Timsit. Nos premières discussions avec le fondateur concernant un LBO datent de la fin des années 90 et nous avons signé avec lui le LBO primaire de Sebia en 2000. C'est une histoire faite d'accompagnement plutôt que de transformation. Au départ, Sebia était bien plus pondérée sur son marché domestique, et axée sur une activité, le monitoring du myélome multiple, un cancer relatif à la moelle osseuse. Aujourd'hui, la société est beaucoup plus internationale et s'est élargie à d'autres applications telles que les maladies de l'hémoglobine ou le suivi du diabète. Les dernières années ont aussi connu un double changement de direction puisque le fondateur Guy Barouh a organisé sa succession en confiant les rênes de l’entreprise à Benoît Adelus en 2007, alors qu'en 2017, c'est ce dernier qui passe le témoin à Jean-Marc Chermette.

 

Concernant Astorg précisément, vous partagez une histoire actionnariale de près de 20 ans avec Sebia. Vous avez presque voué à la société un amour inconditionnel, non ?

C'est vrai que les relations fonds-société, sur des durées aussi longues, sont assez rares pour être signalées. Après notre premier LBO sur Sebia, nous avons cédé la société à Montagu mais nous sommes revenus comme minoritaire aux côtés de Montagu. En 2010, c'est au tour de Montagu de laisser sa place à Cinven, et nous avons de nouveau conservé une position minoritaire aux cotés de Cinven. Sauf que l'histoire ne s'arrête pas là – et c'est peut-être ici que cet amour devient inconditionnel – car en partenariat avec Montagu, nous avons proposer à Cinven de reprendre conjointement le contrôle en 2014. Aujourd'hui, c'est l'esprit serein que nous laissons notre position au trio CVC-Téthys-CDPQ.

 

Vous êtes majoritaire puis minoritaire au capital de Sebia. Pourquoi décider de revenir sur le devant de la scène en 2014 avec Montagu ?

D'abord, si nous sommes revenus conjointement avec Montagu, c'est que nous n'avions pas la capacité financière de faire le deal tout seul. Tout s'est fait très vite car on a eu la même idée en même temps, et on s'est vite rendus compte qu'une alliance rapide nous autoriserait à faire un « préemptif » discret et rapide. Notre thèse d'investissement commune était fondée sur une forte pénétration du marché du suivi du diabète, où nous pensions que Sebia pouvait rapidement devenir un co-leader mondial. C'est le moteur de croissance qui nous paraissait le plus intéressant car il créait à la fois une augmentation des revenus et de l'Ebitda mais aussi une diversification des activités, stratégiquement intéressante. Cet objectif pouvait faire sortir Sebia de sa niche du myélome multiple, et donc de lui donner une valeur substantielle pour des acquéreurs potentiels dans des métiers du diagnostic plus généralistes. Par ailleurs, nous avions aussi décelé un potentiel de croissance non négligeable en matière de dépistage des maladies liées aux défauts génétiques de l’hémoglobine.

 

La cession s'est faite en deux temps puisque CDPQ est rentré un peu avant le duo CVC-Téthys. Des explications ?

CDPQ nous a fait une offre préemptive durant l'été, et sachant que ce fonds n'a pas le mandat pour prendre des positions majoritaires, il a acquis une participation minoritaire. Lorsque l'on a regardé cette offre minoritaire de CDPQ, alors même que nous préparions un processus de vente au troisième trimestre 2017, nous avons été très séduits par cette démarche atypique car elle nous permettait de réaliser un premier retour sur investissement tout en gardant le contrôle sur la gouvernance et la liquidité future de Sebia.

 

Dans quels termes cette première opération vous mettait en position de force dans la négociation future de la cession du contrôle majoritaire ?

Premièrement, le prix est déjà validé par un acteur compétent du secteur et c'est un avantage pour nous. Ensuite, on est assez sécurisé sur le rendement global de l'opération puisque la cession partielle nous apporte déjà une partie de la valeur de la société. Cette première étape, qui ouvre beaucoup d’options, dont celle de rester nous-mêmes actionnaires pendant plusieurs années supplémentaires, permettait donc d'être très exigeants sur le choix d’éventuels acquéreurs pour nous faire sortir intégralement.

 

Le nom de Temasek est sorti à plusieurs reprises. Ils n'ont pas fait le deal finalement...

Temasek a effectivement exprimé un intérêt. Ils ont fait le choix de ne pas poursuivre pour des raisons qui leur appartiennent.

 

FS

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