Frank Maassen croit aux bénéfices économiques et humains d’une organisation libérée autant qu’à la nécessité d’y conserver un leadership fort, seul moyen, selon lui, de fixer un cap commun et de donner à chacun les moyens de l’atteindre. En toute autonomie mais aussi en harmonie avec l’ambition et les valeurs collectives.

Décideur. Quels sont les critères qui caractérisent une entreprise libérée ?

Frank Maassen. Une organisation peu hiérarchique qui renforce la responsabilisation de chacun des collaborateurs au sein de son périmètre et plus généralement du collectif. C’est aussi une organisation réactive qui démontre quotidiennement sa capacité à prendre des décisions rapides avec des collaborateurs qui connaissent, partagent et mettent en œuvre la stratégie. Enfin, une entreprise libérée implique une culture orientée vers la notion de tests, qui reconnaît le droit à l’erreur, favorisant ainsi la curiosité, l’enthousiasme, l’envie, le plaisir à trouver des solutions plus que des excuses.

 

Quels sont les avantages mais aussi les risques qui découlent de ce type d’organisation « horizontalisée » ?

Une telle organisation est probablement plus réactive et agile. Chaque collaborateur se comporte comme un véritable entrepreneur au service de la dynamique du groupe. C’est aussi une question culturelle : les pays nordiques pratiquent depuis des années une organisation beaucoup plus horizontalisée que des pays comme la France. Si l’on bascule trop rapidement d’un modèle à l’autre, sans définition de règles et de processus, une société pourrait perdre en efficacité et certains collaborateurs se sentir déstabilisés par le manque de cadre et par le fait d’évoluer au sein d’une structure perçue comme peu définie. Pour ma part, je suis convaincu que les avantages d’une organisation horizontalisée compensent largement les inconvénients.

 

Comment s’organise le pouvoir dans une entreprise libérée ?

Une organisation moins hiérarchique signifie plus d’autonomie et de responsabilisation des équipes. La confiance, l’autorégulation y sont les maîtres mots. Cela s’apparente à une organisation en mode projet avec des livrables identifiés au service de la vision. Les équipes qui sont pluridisciplinaires comprennent l’enjeu global et sont capables de s’ajuster et de corriger une trajectoire si nécessaire.

 

Le leadership peut-il s’exercer hors d’une structure hiérarchisée ?

Le leadership reste fondamental. Une organisation horizontalisée ne signifie pas l’absence de cap commun, bien au contraire. Celui-ci doit être clair afin que chacun trouve en lui les ressources pour l’atteindre et l’incarner quotidiennement dans ses décisions et actions. La collaboration des équipes doit être orchestrée en permanence pour s’assurer que l’harmonie fonctionne au service du projet d’entreprise.

 

Quelles sont les qualités essentielles d’un leader dans une entreprise libérée ? En quoi diffèrent-elles de celles requises dans une structure classique ?

Le leader est plutôt un généraliste animé par le plaisir de travailler et de faire travailler en équipe. Il n’est pas hiérarchique dans son mode de fonctionnement, ni dogmatique dans les chemins permettant d’atteindre l’ambition commune. Il est capable d’adapter son style de management à l’hétérogénéité des équipes. Surtout, je dirais qu’il sait transformer la pression de l’enjeu en plaisir de faire pour l’ensemble de ses équipes.

 

Propos recueillis par Caroline Castets

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