Annoncé par le président de la République, le lancement du troisième volet du programme d’investissements d’avenir (PIA) vise à préparer la France aux défis de demain. Louis Schweitzer, commissaire général à l’investissement, revient sur les grands enjeux du programme.

Décideurs Quel bilan faites-vous des deux premiers volets du programme d'investissement d'avenir (PIA) ?

 

Louis Schweitzer Ces programmes portent sur le long terme, on ne peut donc pas, et on ne le prétend pas, faire un chiffrage à court terme sur le nombre d’emplois par exemple. Quand nous soutenons un programme de recherche, nous aidons un certain nombre de chercheurs. Le fruit attendu, c’est une innovation qui aura un impact économique de premier ordre, mais à l’avenir. Pour évaluer cela, nous avons sollicité une commission d’experts indépendants qui a pu observer les premiers signes de l’efficacité du PIA. À l’issue de leurs conclusions, il est avéré que ce dernier était favorable et il va être développé dans d’autres pays. Nous avons également demandé à l’OCDE de procéder à une photographie de la France avant le lancement du PIA, une nouvelle en 2020, puis en 2030 pour voir si notre système de recherche, de développement et d’innovation a effectivement changé le paysage. Ma conviction est que oui. Grâce à une forte présence sur le terrain à la rencontre des différentes entreprises, nous avons observé des progrès avec la naissance de nouvelles entreprises. On a pu également noter l’augmentation des publications scientifiques de nos universités, et le nombre de start-up progresse lui aussi. On le voit, tous ces signes indiquent que le programme conçu par Alain Juppé et Michel Rocard touche juste. L’objectif du PIA est bien de favoriser la compétitivité hors coûts en France à moyen et long terme.

 

Comment expliquez-vous que le PIA ait survécu aux changements politiques ?

 

Cette continuité tient à deux éléments. Le premier est que sa conception a été réalisée en dehors de tout clivage politique. Nicolas Sarkozy qui l’a lancé, en a confié la conception à Alain Juppé et à Michel Rocard, deux personnes d’horizons politiques différents. Quand on construit l’avenir, il faut de la continuité. On ne peut pas avoir des programmes de recherche qui s’arrêtent au gré des alternances politiques. Ce serait la garantie de leur inefficacité. La seconde relève de son efficacité. Aujourd’hui, le constat est là, aux 35 milliards d’euros de Nicolas Sarkozy en 2010, l’actuelle majorité a ajouté 22 milliards d’euros. De plus, on n’observe aucune remise en cause par les candidats à l’élection présidentielle.

 

Une partie importante du budget sera consacré aux entreprises. Pourquoi une telle volonté de votre part ?

 

Les programmes d’investissement d’avenir 1 et 2 consacraient déjà une part importante de crédits aux entreprises. Dans le PIA 3, le pourcentage dédié aux entreprises n’a pas fortement évolué. Elles auront un budget de 4,1 milliards d’euros. La continuité de l’action vers les entreprises se justifie car il faut que les idées de développement et d’innovation se traduisent dans l’activité économique réelle, notamment par la création d’emplois. Toute la logique d’un tel système est d’aboutir à des projets concrets d’investissements et de recrutements portés par des entreprises, comme ceux visant au soutien des start-up ou de croissance.

L’une des faiblesses de notre économie est le manque de coopération entre les différents acteurs (entreprises, universités, etc.). La nouveauté dans ce troisième volet, c’est la proportion de fonds propres, quatre milliards d’euros, soit 40 % contre 15 % lors des précédents PIA. Cela s’explique par une insuffisance d’investissement direct au profit des entreprises favorables à la croissance et à l’innovation précédemment.

 

« L’une des faiblesses de notre économie c’est le manque de coopération entre les différents acteurs »

 

 

Le PIA comporte un plan numérique à l’école. Quels vont être les outils pour le mettre en place ? 

 

Nous nous sommes appuyés sur le plan de couverture numérique intégral pour amplifier les projets numériques innovants en milieu scolaire : il constitue notre socle depuis son lancement à l’issue du premier volet. Au travers de cette action d’un montant de 500 millions d’euros (dans le PIA 3), c’est la volonté d’instaurer une pédagogie nouvelle qui intègre pleinement l’utilisation du numérique et de ses instruments dans les enseignements en permettant aux enseignants de proposer des programmes éducatifs innovants. Cette action s’inscrira dans la continuité de ce que nous avons expérimenté lors du PIA 2.

 

Envisagez-vous un quatrième volet ?

 

Il est encore trop tôt pour se prononcer. Le troisième volet du PIA sera largement engagé d’ici trois ans. L’expérience a démontré que le temps de conception d’un PIA est de deux ans.

 

Propos recueillis par Gatien Pierre-Charles

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