Après avoir révolutionné le rapport employeur/employés, Uber compte tout simplement le supprimer. Depuis près de deux ans, la start-up américaine travaille à un prototype de voiture sans chauffeur. Les phases de test en condition réelle ont déjà commencé. En attendant sa généralisation, elle chouchoute « ses » chauffeurs pour amadouer les régulateurs. Culotté.

Le 14 septembre, Uber lançait officiellement son service de voitures sans chauffeur dans les rues de Pittsburgh aux États-Unis. Quatre Ford Fusion autonomes sillonnent désormais la ville où la start-up a installé son centre de recherche. Si pour le moment, deux employés d’Uber sont encore présents dans le véhicule – l'un pour respecter la législation qui interdit encore qu’une voiture circule sans conducteur, le deuxième assurant une veille technologique –, le nouveau géant espère bien que cette phase de test, réservée pour le moment aux mille clients les plus fidèles, aboutisse rapidement à une généralisation.

 

Changement de modèle

 

Plus qu’une révolution technologique, il s’agit également pour Uber d’un changement de modèle. Pour se développer, la start-up avait jusqu’à maintenant miser sur le recrutement d’une main d’œuvre peu chère opérant en tant que freelance.  Uber fait ainsi travailler plus d’un million de chauffeurs à travers le monde mais compte seulement 6 700 salariés. Grâce à ce modèle, l’entreprise a affiché une croissance impressionnante. En 2015, la start-up réalisait déjà un chiffre d’affaires de dix milliards de dollars, sans compter la part reversées aux chauffeurs.

 

Mais pour son futur, Uber voit encore plus grand. En se passant de chauffeurs, elle tente le pari fou de construire une société de service autour du capital. Un nouveau modèle qui ne laisse bien sûr pas insensibles les investisseurs. Depuis sa création, Uber a levé près de quinze milliards de dollars. Et, alors qu’elle emploie trente-deux fois moins d’employés que General Motors, sa valorisation atteint les 68 milliards de dollars, contre seulement 47 milliards pour le constructeur automobile américain.

 

Charmer les régulateurs

 

Après financé sa croissance en s'appuyant sur eux, Uber s’apprêtent à se séparer de ses chauffeurs. Une décision d’autant plus facile que ces derniers ne sont pas salariés. En attendant, elle continue pourtant de les chouchouter. Uber vient ainsi d’inaugurer aux portes de Paris, un espace d’accueil et d’information pour ses chauffeurs partenaires. Sur près de 500 mètres carrés, une vingtaine d’experts y accueilleront les chauffeurs partenaires de la plate-forme. Mais là encore, elle se soucie en réalité bien peu de leur bien-être. Son objectif est de convaincre les gouvernements de modifier les réglementations afin de créer des emplois. Pour cela, la start-up n’hésite pas à financer des études. La dernière en date, réalisée par Harris Interactive, estime que 39 % des chauffeurs étaient à la recherche d’un emploi au moment où ils ont rejoint la plate-forme, ou encore que 40 % d’entre eux n’ont pas le bac.  Un argument d’intégration qui vient de prendre du plomb dans l’aile.

 

Vincent Paes

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